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 Commençons en l’année 800 et arrêtons-nous à la veille de la Révolution de 1789. Un millénaire de petite et grande histoire au galop.

La vie des paysans, nos ancêtres à 90 % et plus

On vit par saisons au rythme des saints Martin, Michel... et les jours n’ont pas de numéros. L’heure de l’aube est celle du coq et la cloche donne l’heure selon l’humeur du sacristain. L’angélus sonné : aube, midi et fin du jour, ce sera à partir du XIIème siècle.

Le paysan n’est alors plus achetable-vendable. Il se lève tôt et rentre tard dans la maison en bois. Dans l’unique grande pièce au plancher de terre battue, on allume le feu au milieu de la pièce; la fumée s’échappe par un trou dans le toit. La cheminée ne viendra dans les chaumières que trois ou quatre siècles plus tard. Vers le XIIIème siècle un gong de cloche en fin de soirée indique qu'il convient de couvrir les feux pour éviter les incendies. On l'appelle le "couvre-feu". Pour garder la chaleur on bouche les fenêtres avec du foin; la vitre n’arrivera qu’à la “Renaissance”. 

 

 

Une chaumière de paysan du moyen Âge, d’après un livre de classe (Histoire cours élémentaire, Fernand Nathan, années 1950).

 En hiver, on introduit quelques animaux qui dégagent de la chaleur mais aussi amènent des mouches qui bourdonnent sans cesse. Les deux couples, le vieux et le jeune, dorment dans le lit; les enfants sur des tas de paille.

On exécute les travaux à la main, à la bêche et à la faucille. Plus tard, l’Ancien Régime interdira l’usage de la faux, coupable de faire perdre des grains et de priver les pauvres de chaume. On lèvera l’interdiction en 1791, mais il faudra attendre une vingtaine d’années pour son utilisation généralisée, permettant de doubler la productivité avec 50 ares de blé moissonnés par jour de travail contre 20 à la faucille. Cependant, on garde parfois la faucille utilisée par les femmes payées moins cher. On reproche aussi à la faux de couper les tiges trop bas et de détruire les nids de caille.
La chape à capuchon protège du soleil et de la pluie et on se désaltère avec de l’eau de sa gourde en peau de chèvre. La braie flottante ne viendra qu’au Moyen Âge et la chemisette au XIVème siècle. Un réel progrès fut la charrette à quatre roues tirée par des boeufs fin du XIIème siècle, du moins pour les laboureurs les plus aisés.  

La convivialité villageoise

     La grande fête de “Pâques” est célébrée le dimanche suivant la pleine lune postérieure au 21 mars. Puis, au quarante et unième jour, on jeûne dix jours entre Ascension et Pentecôte. Le lieu central du village est une modeste église où l’on se tient assis, à genoux ou debout sur le foin. On s’autorise des réactions spontanées qui déclenchent l’hilarité. Les animaux de compagnie y sont autorisés.

     Avec la montagne de Sainte-Geneviève de Paris, l'autre butte sacrée sur la rive gauche, était un "monceau" sur la route romaine de l'ouest. En 542, CHILDEBERT Ier, revenant de guerroyer en Espagne, rapporta la croix d'or de Salomon et des reliques de Saint-Vincent. Il fit construire une basilique pour abriter ces précieux restes. C'est l'actuelle Saint-Germain-des-Prés. L'église prit ce nom lorsque la tombe de l'évêque Germain fut devenue un lieu de miracles. Elle fut le centre d'un des plus importants monastères du moyen-âge. Elle a été la seconde nécropole des rois francs. DAGOBERT inaugure la troisième, Saint-Denis.

     Le vitrail médiéval tient une place importante avec le développement des églises et des cathédrales entre 950 et 1240. Les thèmes peuvent aussi bien évoquer des rois et reines, l'Empereur Charlemagne en 1225 à Chartres,... mais aussi le boucher, boulanger, charpentier, drapier, le forgeron ou le simple porteur d'eau. Il présente des scènes de la vie religieuse et donne lieu à des ouvrages de grande qualité dont la Rosace sud de Notre-Dame de Paris du XIIè siècle avec ses 12 mètres de diamètre. Fabriquer un vitrail c'est aussi être proche d'une forêt et d'une rivière ou d'un fleuve car il fallait mélanger à la cuisson du sable avec des cendres de bois et de fougères. La couleur du verre émanait d'adjonctions d'oxydes métalliques : oxyde de cuivre pour le rouge, cobalt pour le bleu et du fer pour le vert. Pour fixer la peinture - dite "grisaille" - sur les morceaux de verres peints, on doit faire fondre de la poudre de verre et chauffer un four à 650° C. On associe avec des clous un moule en fer composé de deux parties bien étanches en y versant du plomb fondu.

Les couleurs ne sont pas mélangées : le blanc indique la pureté et la justice le bleu le ciel et la vérité éternelle comme le manteau de la Vierge Marie et des rois de France  ,

Le brun est couleur des saltimbanques, des poètes et musiciens, le jaune couleur des menteurs, trompeurs et tricheurs,  le  rouge est symbole du Christ, du sang et du feu  le vert désigne les créatures maléfiques, démons, dragons ou serpents Après l’art roman, les églises profiteront de l’art gothique du XIIIème siècle. Il faudra attendre le XIVè siècle pour rétablir bon ordre avec une chaire qui domine l'assemblée. 


Nota AG : Ah!les couleurs et leurs significations à travers les âges et selon les peuples! Dans cette grande civilisation indienne, et ce monde "indo-européen" à l'origine des langues sanskrit, hittite, iranien, arménien, grec, latin, et langues romanes, slaves, germaniques, baltes, celtiques, ... HOLI est un grand rendez-vous de la religion hindouiste. On s'y maquille en se lançant des produits colorés à la figure. Surtout célébrée dans le nord de l'Inde, elle s'étend de nos jours à tout le pays et à l'étranger. La joie de célébrer le printemps dans cette période de dernière lune marquant la fin de l'hiver se déroule dans les temples et surtout dans la rue. C'est une fête collective avec de jolis costumes, des colliers ou des bracelets de fleurs.

Chaque couleur a une signification : le rouge : l'amour, le vert : l'harmonie, le jaune : une bonne santé, l'orange : l'optimisme et la force, le bleu : la vitalité.


   On découvre progressivement des animations avec les “Pardons”, les “ballades” et kermesses avec des ripailles, jeux rustiques, chants, musiques et danses bien racontées plus tard au XVIème siècle, par Noël du Faïl. 
Le "TRO BREIZH" (tour ou traversée de la Bretagne) est un pèlerinage vers les lieux de cultes des sept saints fondateurs de la Bretagne. Il fut inventé par l'Eglise catholique au XIIè siècle pour asseoir son autorité dans une région restée longtemps farouchement indépendante du pouvoir Franc (dont l'évéché de Dol-de-Bretagne créé par Nominoé). Ce pèlerinage s'est toutefois inspiré de la tradition de la "TROMéNIE", qui signifie "le tour du domaine", dont les racines sont nettement celtes...

Période "charnière"à la "césure de l'AN 1 000", certains situent alors une "grande croissance" par l'effondrement de l'Etat carolingien au profit de la féodalité. Selon le médiéviste rennais Florian Mazel ,"Nouvelle histoire du Moyen Age",:  "il faut surtout insister sur la RéFORME GRéGORIENNE qui s'étire sur une longue période d'un siècle et demi, allant du milieu du XIè jusqu'au début du XIIIè. L'Eglise s'émancipe alors du pouvoir politique pour pénétrer tous les domaines de la vie sociale, économique et politique. On doit à cette réforme, entre autres, le célibat des prêtres ou le sacrement du mariage qui a bouleversé les rapports entre hommes et femmes... Il y a en Europe un héritage chrétien, avec plusieurs formes. Et il y a également un islam ibérique ou sicilien qui ont joué un rôle majeur dans l'époque médiévale." D'une manière générale, en Europe on indique que le Moyen-Age débute avec la fin de l'Empire Romain d'Occident en 476 et l'année 1453 qui marque la chute de Constantinople prise par l'Empire Ottoman. Ce qui achève l'Empire Romain d'Orient. On peut aussi prolonger le Moyen-Age jusqu'à 1492 et les découvertes des Amériques avec Christophe Colomb et Americo Vespucci.

 

 

La danse des paysans par Brueghel l’Ancien.

Mais la malnutrition et la malpropreté amènent la peste et la lèpre.

"La Quarantaine au Moyen Age" : A l'époque médiévale, contrairement à ce qui est parfois suggéré, les règles d'hygiène étaient bien observées. Les gens effectuaient une toilette journalière et se lavaient les mains avant et après les repas. C'est à compter de la "Renaissance", au XVIè siècle, que ces comportements évolueront car on prétendait alors que l'eau ouvrait les pores de la peau, laissant ainsi entrer les maladies dans le corps... Au Moyen Age, outre les actes réalisés par les chirurgiens, que l'on appelait des barbiers, et la présence de sages-femmes qui utilisaient beaucoup de remèdes à base de plantes tels que du thym ou des clous de girofle, il existait une autre médecine qui empruntait ses recettes à la MAGIE et à la chimie. Les personnes aisées portaient, par exemple, autour du cou une Pomme d'Ambre. Il s'agissait d'un bijou dont la cavité intérieure était garnie d'ambre gris et qui était censé protéger des maladies. Pour se préserver de la PESTE existait une autre superstition. Les personnes les plus riches pensaient qu'il fallait porter à la main gauche un diamant et on prétend que ce serait l'origine du "solitaire" qui symbolise de nos jours la bague de fiançailles... Lors de la pandémie de PESTE NOIRE qui a ravagé l'Europe de 1347 à 1352, on a pris conscience qu'il fallait isoler les malades en "quarantaine". Les personnes atteintes de la peste ou de maladies telle que a lèpre ou la dysenterie étaient alors placées dans des "MALADRERIES". Cette précaution de "quarantaine" allait à l'encontre des moeurs de l'époque médiévale car, lorsque l'on se sentait en fin de vie, on se rapprochait de sa famille. Cette attitude, malheureusement, permettait aux épidémies de se propager plus rapidement." par Stéphanie Vincent-Langlois  www.legendesethistoire.com O.F. 11/5/20

      

    La PESTE fut très active dans le bassin de Rennes, allant vers Janzé entre 1563 et 1640. A cela s’ajoutent les famines qui peuvent durer plusieurs années et entraînent le brigandage avec des routiers, des cottereaux qui ne craignent pas la pendaison par bandes entières.

Les puissants

L’aristocratie féodale est née de la pratique professionnelle de la guerre à cheval. Les  “barbares” étrangers de l’Est de l’Europe font découvrir l’étrier au début du VIIIème siècle. Cet atout décisif permettra à Charles Martel d’en équiper sa cavalerie et de vaincre en 732 les Arabes d’Abd al Rahman ibn Abdallah, qui y meurt. Le roi confisque alors les terres ecclésiastiques pour financer l’équipement d’un guerrier.Celui-ci représente alors le coût d’une vingtaine de boeufs. Et le cheval mange des céréales... L’aptitude de conduire un cheval à la guerre et à la chasse sera une marque culturelle amenant la chevalerie.Charlemagne sera un guerrier qui réalisera cinquante-trois campagnes militaires dont trente-quatre réservées aux Saxons. En 782, il en fera trancher la tête à 4 500 dans une journée. Pendant quarante-six années de règne, sa seule défaite sera devant Saragosse en Espagne (face aux Musulmans ou aux Vascons?), avec la fameuse retraite par Roncevaux. 

L'historien acignolais Alain Racineux : RONCEVAUX, "Ce ne sont pas des Sarrasins mais des Vascons, alias les Basques, qui ont tué Roland pour venger le sac de Pampelune ("Vita Karoli Magni", oeuvre écrite entre les années 829 et 836 par Eginhard, moine et chroniqueur). Les Vascons massacrèrent Roland et toute son armée à Roncevaux. Le roi Charles Ier, futur charlemagne, conduisit ses troupes à Saragosse en Espagne à la demande du wali de la ville Soliman ibn al-Arabi. Mais ce dernier ayant été remplacé entre-temps, Charles y trouva les portes de la ville closes. Pour compenser cet échec l'aile occidentale de l'armée franque, conduite par le roi, s'en prit à la ville navarraise de Pampelune qui avait pourtant résisté à la pression musulmane, mais dont les Francs rasèrent les défenses. Le 15 août 778, en représailles, des Vascons rattrappèrent et anéantirent l'arrière-garde de l'armée du roi Charles, lourdement armée, alors qu'elle progressait dans une vallée encaissée depuis Roncevaux. Roland et quelques autres nobles y trouvèrent la mort, ainsi que le comte du palais Anselme le preux. Et les Vascons reprirent le "BUTIN de PAMPELUNE".

La "CHANSON de ROLAND" fut créée pour glorifier la Maison de Charlemagne dans une période de crise dynastique. Une autre version fit jour avant la seconde croisade, vers 1146, pour servir les plans du prêcheur saint Bernard et la lutte contre les Sarrasins. 

 

 

L’empereur à la barbe fleurie reçoit la soumission des Saxons (Mon Histoire de France, Hachette, début du XXe siècle).

 Le paysan, quant à lui, se contentera d’une invention considérable : le collier rigide d’épaules, posé au cou des chevaux de trait, pouvant tirer très fort.

Au Xème siècle les Capétiens pratiquent la chasse à courre pour se procurer du gibier ou détruire les grands animaux ravageurs des forêts et des champs. Le chevalier et homme d’épée, bien en selle avec ses étriers, domine le manant à qui il n’autorise pas le droit de chasse.

Il est dit que le “percheron” aux proportions parfaites serait issu d’un apport des chevaux arabes capturés à la bataille de Poitiers. Et aussi de chevaux tartares de prisonniers mongols. Et que dire du cheval “breton” de plus petite taille, léger et vivace, qui fit le bonheur des Bretons de Nominoé, tels des Indiens lançant leurs lances contre les Francs à la bataille de Ballon près de Redon en 845.

 Le pouvoir monarchique concentré sur la région parisienne veut s’agrandir avec l’apport de mariages dotés de territoires. Les guerres se succèdent contre les Plantagenets d’Angleterre, ces Normands aidés par 30% de Bretons qui ont conquis l’Angleterre en 1066. Le pape Urbain II lance la première croisade pour délivrer Jérusalem en 1096. Il en faudra huit, fort ruineuses, jusqu’à Saint-Louis qui mourra du scorbut. Et pourtant l’Orient disposait de tous les fruits qui l’auraient guéri : pastèque et melon, abricot, pêche originaire de Chine, le citronnier originaire des pieds de l’Himalaya, le cerisier, mais aussi les épinards et les échalotes, le céleri diurétique, l’asperge ainsi que l’artichaut, nourriture des ânes, et les prunes. Les chevaliers seront impuissants pour s’emparer de Damas, “pour des prunes”! En 1148, à la deuxième croisade, un moine ramène un prunier de Damas. On le "croise" avec un prunier cerise européen. Pour en faire un pruneau on sèche les prunes dix-huit heures au four, on les réhydrate trente minutes dans une eau à 80°C puis on les pasteurise au four pendant cinq heures. Le fruit sec de couleur noire sera un bien précieux, riche de vitamines, de fibres et de minéraux. Il s'adapte bien sur les bords du Lot. On dit "pruneau d'Agen" car il y embarquait pour rejoindre le port de Bordeaux.

Les premiers croisés ont rapporté la technique du moulin à vent, inventé au VIIème siècle par les Perses. Ils auraient pu aussi revenir avec une brouette d’Orient, inconnue en Occident. Le sucre ne sera importé d’Alexandrie qu’au XIIIème siècle.

Le vin et le tabac tracent leurs routes

     Avec la conquête romaine de la gaule la vigne gagne des terres d'est en ouest et vers le nord. Au IIIème siècle, le cépage gaulois s'étend selon les axes commerciaux de Béziers à Narbonne et Bordeaux par la Garonne, et le long des vallées du Rhône et de la Saône. Le christianisme renforce la place du vin dans la société. Les références à la vigne dans la Bible sont nombreuses. Les viticultures épiscopales et monastiques sont encouragées par le Concile d'Aix-la-Chapelle en 816. Pendant tout le Moyen-Age, la France est le premier exportateur de vin. 

     Dans l'église primitive, le fidèle se donne lui-même la communion, il peut même emporter chez lui des fragments de pain consacré pour communier en cas d'urgence. Jusqu'au XIIIè siècle, il est admis à la communion sous les deux espèces. (L'orthodoxe continue cette tradition). A partir de cette époque, pour éviter les abus, le vin est réservé à l'officiant. Le concile de Constance tint bon contre les Hussites et celui de Trente contre les Protestants qui réclamaient la double communion.La "consécration de l'eucharistie" : miracle par lequel Jésus devient présent dans les epèces consacrées.

 

« Mythologie celtique. Les origines de l’art roman ». Pour décoder les églises.

 Au concile de Latran de 1215,il fut décrété que toute la substance du pain et du vin était changée en chair et en sang de Jésus : la "transsubstantiation".

Le concile de Trente promulgua à nouveau ce dogme.Dans la vie courante, le petit peuple se contente du pain "gris" avec son mélange de froment et de l'enveloppe de son. Les nobles mangent  le pain blanc" du seul froment; le pain rassis, coupé en grandes tranches, sert d'assiette jusqu'au XVè siècle. A la fin du repas, on le donne aux animaux ou aux mendiants.

Dès le XIIème siècle, fuyant les pillages de Vikings sur les bords de la Loire, des moines de Saint-Martin de Tours récupèrent des terres à Chablis grâce à Charles Le Chauve. Il se produira une concurrence directe avec les moines cisterciens de Pontigny. Et à l’arrivée une grande qualité du vin de Chablis.

On raconte aussi qu’un moine de Sancerre aurait utilisé vers 1040 son abondant vin pour l’associer au mortier servant à reconstruire son église détruite par le feu. Au XIIIème siècle, sainte Hildegarde ajoutera du houblon à la cervoise aromatisée au gingembre. On aura la bière. Au XIVème siècle, les papes français d’Avignon font couler le vin à flot dans la cité dénommée la “Babylone du siècle”. Tavernes et maisons de passe contribuent à ce surnom. Le pape Jean XXII y aura fait planter le “chateau neuf” (du pape). Sous Henri IV toutes les provinces donnent du vin, exceptés Normandie et Picardie, puis la Bretagne, qui préfèrent le cidre. Louis XV interdit les nouvelles plantations afin de limiter la production de vins médiocres. Les progrès techniques favorisent l'apparition de vins de qualité. La notion de "cru", référence de qualité, n'émerge qu'au XVIIIème siècle. Trois régions s'affirment : la Bourgogne, la Champagne et l'Aquitaine. Louis Pasteur localise les micro-organismes à l'origine de la fermentation. Il met au point la "pasteurisation" permettant notamment d'éliminer les bactéries aigrissant le vin. La rapidité des transports concourt à une meilleure qualité de conservation des vins. De nos jours le vin biologique et sans sulfites ajoutés permet une plus saine dégustation.

Parmi les découvertes de Christophe Colomb de 1492 à Cuba ou des Portugais au Brésil, le tabac mettra du temps à trouver le succès. Il faudra attendre 1559 pour que l’ambassadeur de France au Portugal, Jean Nicot, soigne son cuisinier avec un emplâtre de cette plante. 

 

 

 

Jean Nicot et son « médicament ».

 Le pétrin de poudre envoyé pour soigner les migraines de Catherine de Médicis lancera une mode et les apothicaires distribueront du tabac sous forme de lavements ou de purges. Bien que les brésiliens l’appellent “petun”, la plante sera l’herbe à Nicot (nicotine), mais aussi l’herbe sainte. Au début du XVIIème siècle on lui donnera nom de “tabago” provenant du roseau qui entoure les feuilles roulées. On le prise, on le chique et on le fume “en pipe”. Mais d’autres pays considèrent le tabac comme du poison : en Perse on coupe le nez aux priseurs et les lèvres aux fumeurs; en Turquie on perce le nez avec un tuyau puis on promène le damné sur un âne; enfin au Japon on devient alors esclave...

L’époque moderne pointe son nez

     La "Renaissance" est cette période qui s'étend du règne de Louis XII (1498) à l'assassinat d'Henri IV (1610). Avec les fastes des cours princières d'Europe, le renouveau artistique et scientifique sera aussi celui des herbes aromatiques qui complètent les épices mais surtout des consommations de légumes (artichauts, aubergines, asperges, choux-fleurs, concombres, melon, ..); des légumes auparavant ignorés car "poussant dans la terre", trop "peuple" devant s'abaisser à ramasser sa nourriture. L'apport des relations avec l'Italie et Catherine de Médicis sera décisif. Si les fruits sont également appréciés, les pâtes mettront du temps pour devenir un produit habituel contrairement au sucre qui détrône le miel ancestral sur les tables. Le "couvert" est une façon de couvrir son écuelle au Moyen-Age, par crainte d'empoisonnement. La fourchette est l'amie du péché de gourmandise et ne sera généralisée qu'au XVIIIè siècle. Même l'élégant Louis XIV mangeait avec ses doigts...Cependant, malgré son immense fortune, il devait lui aussi au terme de sa vie, s'adonner aux bouillies et mets hâchés. On y perdait alors facilement ses dents avec le grand âge.  Pour la cuillère et le couteau, chacun en avait comme compagnon de voyage. D'ailleurs ce couteau individuel qui se déplie avec sa pointe fine survivra dans nos campagnes jusqu'aux années 1960.

L’agriculture moderne tient dans l’oeuvre retenue dans l’ouvrage de 1600 de l’agronome calviniste Olivier de Serres “Théâtre d’agriculture et mesnage des champs”. Mais ce sera le fin M. de Sully, Maximilien de Béthune, qui fera autorité et déclarera : “labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France”.

Période de prospérité achevée avec l’assassinat du bon roi Henri. Sous les deux cardinaux-ministres qui lui succèdent les impôts doublent et les famines – “des orties, ils font leurs soupes” – , la peste et les guerres font des ravages. En 1675, Madame de Sévigné rapporte que les “bonnets bleus”, coiffure des pêcheurs de Cornouaille et région de Carhaix (Poher), demandent la suppression de tous les droits seigneuriaux comme “attentatoire à la liberté de la province Armorique”. Ils décident d’envoyer six députés aux Etats provinciaux et rédigent un “CODE PAYSAN” : abolition des corvées, des dîmes, de la banalité du moulin et réduction des droits sur le vin reçu de l’étranger. L’argent des “fouages anciens” devra être employé à acheter du tabac, distribué avec le pain bénit aux messes paroissiales. Le droit de chasse sera réglementé (à interdire du 1er mars au 15 septembre); les colombiers seront rasés; pleine liberté sera rétablie pour tous de tirer sur les pigeons; recteurs et curés seront salariés par leurs paroissiens; la justice ne sera plus rendue par le seigneur mais par un juge salarié; les mariages seront permis entre noblesse et paysannerie; les successions seront partagées équitablement... En fait, il faudra attendre encore un peu. 1675, également année de la révolte des “bonnets rouges” et du “papier timbré”.

 

 

Plaque de la rue du Papier Timbré à Rennes (photo de XIIfromTOKYO).

 

Le siècle des Lumières

En 1700 le royaume de France totalise 21 millions d’habitants, soit un Européen sur quatre. On aura ensuite 75 années, dit un presque siècle des “Lumières”avec des révolutions des esprits, de l’agriculture et de la technologie. Le servage royal sera aboli en 1779. Louis XIV, pour des raisons liées autant à l'aspect défensif des côtes qu'à la connaissance de son Royaume, va demander à une Académie des Sciences de réaliser des mesures et des cartes améliorées. L'usage des journées de chevauchées servait alors pour déterminer les distances. A partir des années 1730, quatre générations de la famille CASSINI vont procéder à des triangulations dans un axe Ouest vers Strasbourg puis les frontières et la carte générale référencée 1744. Pour les côtes bretonnes et normandes, l'opération aura lieu en 1736/1737. Des équipes se relayaient tous les 20 km (10 000 toises) pendant six mois. Voir site Géoportail

     Et nos colonies aux "Antilles" : bien que Louis XIII ait interdit par décret leur esclavage - les français étaient venus pour les évangéliser - les Caraïbes (Callinagos) ont du s'exiler sur les îles de la Dominique et de Saint-Vincent suite au traité signé en 1660 avec les colons. Les Petites Antilles avaient précédemment été peuplées par des Amérindiens venus du delta de l'Orénoque (Vénézuéla) : les ARAWAKS, des agriculteurs, chasseurs et potiers . Selon le "Petit Robert", le terme "cannibale" proviendrait des Caraïbes antillais qui pratiquaient certains rites anthropophages avec une pratique rituelle et non coutumière : seuls étaient mangés les guerriers Arawaks valeureux dont ils espéraient acquérir la force. Les Callinagos pratiquaient la culture sur brûlis et l'irrigation. Ces grands chasseurs, guerriers redoutables, étaient aussi à la période de l'arrivée des européens en 1493 des "nomades de la mer" allant de la Guyane à l'est de l'île de Saint-Domingue. Avec leur "Code noir" de 1685 les colons français ont fait des esclaves des "biens meubles", les plaçant ainsi au même niveau que les animaux ou les outils de travail. Les maîtres étaient tout-puissants, jusqu'à punir de torture et de mort les "marrons" (fugitifs" repris). Aboli une première fois par la Convention en 1794, l'esclavage est rétabli par Napoléon en 1802 - à la demande de Joséphine de Beauharnais son épouse créole! Bien qu'interdit en 1815, il faudra attendre la deuxième République de 1848 et Victor Schoelcher pour abolir l'esclavage. Il y avait alors 73 500 esclaves en Martinique sur une population de 125 000 habitants, et 87 000 esclaves en Guadeloupe, pour 130 000 habitants (dont 30 000 "gens de couleur" libres). L'abolition entraîna une baisse de la production sucrière, par manque de main d'oeuvre. Pour y remédier, des travailleurs indiens et chinois, sous-payés,mais aussi des Syriens du Liban, furent amenés dans les îles à la fin du XIXème siècle (25 000 en Martinique et 40 000 en Guadeloupe). L'esclavage a enrichi la bourgeoisie au XVII et XVIIIè siècles permettant à une classe sociale émergente de s'imposer face aux aristocrates. On aura compté 3 317 expéditions partant par ordre de Nantes, Le Havre, La Rochelle, Bordeaux et Saint-Malo, ainsi que 12 autres ports de France. Au XIXème siècle, l'empire colonial recule avec la vente de la Louisiane en 1803 et l'indépendance de Saint-Domingue (Haïti) en 1804, avant de regagner du terrain sous la Restauration et le Second Empire avec la conquête de l'Algérie en 1830. Puis s'ajouteront l'Indochine, la Polynésie, la Nouvelle-Calédonie, le Sénégal et les Côtes de Guinée et du Gabon...

     La langue créole s'est constituée à partir de la mise en contact de dialectes français (normand et poitevin) et de langues d'Afrique de l'Ouest. La musique, aux Antilles, a emprunté à la valse et à la mazurka européenne, mais aussi à des rythmes africains. Alors que Aimé Césaire aura cherché  à retrouver avec un outil de combat l'héritage africain des Antilles, la "Créolité", outil d'existence,  se définit comme "ni européens, ni africains, ni asiatiques, mais créoles".


"La mémoire des paysans, chronique de la France des campagnes 1653 - 1788" Jean-marc Moriceau

     "Jusqu'en 1700 les fléaux de la nature se conjuguent avec les destructions des guerres et la pression fiscale. En 1683, une terrible famine frappe le pays de Craon (Mayenne) et on broie des racines de fougères pour faire du pain car le prix du blé est trop élevé. Le sarrasin, le blé noir qui ne gèle pas ,semé en mai, a sauvé des populations de la famine. Le dérangement du temps est une hantise. Les rendements du blé varient entre 7 et 8 quintaux par hectares, dix fois moins qu'aujourd'hui. Et on mange cinq fois plus de pain, environ 1 kg par jour et par personne. C'est l'essentiel de l'alimentation. En 1788, des pics de froid à moins 20°C sont enregistrés, ça ruine les récoltes et crée des tensions sociales au début 1789. L'histoire du monde paysan est aussi faite de sécheresses ou des inondations qui impactent les récoltes, des impôts, de la guerre, de la peste, du typhus, de la fièvre aphteuse, des attaques de loups...  A partir de 1750, les marchands ambulants qui vendent des mouchoirs, peignes, miroirs ... apportent aussi les idées des "Lumières". La population a pris conscience de l'accroissement des inégalités. De plus en plus de paysans vont à l'école, savent lire et écrire. Environ 50 à 60% des hommes contre 25% au XVIIè siècle. Ils sont réceptifs à la lecture des journaux." O.F. Guillaume Le Du

     Retour en France, même si l’on passe d’un âge moyen de 20 ans des décès au début du XVIIème siècle à 29 ans à la fin du XVIIIème, la moitié des enfants n’atteignent pas l’âge adulte. Entre 1740 et 1789, sur 1000 enfants nés vivants, le nombre de survivants est de 525. On dit qu’il faut “deux enfants pour faire un adulte”. La mortalité infantile d’enfants de moins d’un an est estimée à 20%.

Toutefois, en raison des familles nombreuses, en 1790 la population sera de 27 millions, dont 22 sont des ruraux. Entre-temps la famine de 1770 donnera l’opportunité à l’Académie de Besançon de proposer des végétaux qui pourraient suppléer en cas de disette. Huit mémoires mentionnent la pomme de terre avec un premier prix pour Antoine-Augustin Parmentier. Ce pharmacien entré dans l’armée à 20 ans avait été capturé par les Prussiens où il avait eu pour ration ce légume. A l’occasion de la Saint-Louis, il fera préparer à la table du roi louis XVI vingt plats différents à base de pommes de terre. Il convaincra les citadins en faisant garder de jour mais pas de nuit la plaine des sablons à Neuilly où sont plantées des pommes de terre. Rien de tel pour stimuler l’envie de pommes de terre, et on y vole les plants de l’ancienne “papa” d’Amérique du Sud.

L’hiver qui précède les premières grandes dates de la Révolution est rigoureux. Il commence le 25 novembre 1788 pour s’achever le 20 janvier 1789. On tue du bétail faute de pouvoir l’abreuver. La liberté d’exporter le grain fait que les greniers sont vides dès 1788 et que les prix augmentent.

Partant du Dauphiné puis de Rennes la révolte gronde... pour finir en Révolution nationale.

Alain Gouaillier le 02/09/2019

Sources principales :

  • Les Paysans de France” d’Arthur CONTE, "Télérama" 2003

 

 

                             1 - La Civilisation des Riedones, la "Bretagne préhistorique"  

                             2 - Extraits "César la guerre des gaules"

   


 

                             1- La Civilisation des Riedones     

 A/ Le Peuple des Riedones 

B/ Traces archéologiques

C/ Voies romaines (Acigné, Le Mans, Angers)   

D/ Peuplements/Condate     

E/ Acigné/Servon  

                                

 

      Des arpentages (Acigné, Laillé, Langon, Redon, Pacé, Melesse, Chateauneuf, ...) : avec des champs disposés en portions de 710 mètres de côté, des séparations s'appelant des "limes" (chemins, fossés, ..). Découvrez l'étude (ci-dessous) de l'arpentage d'Acigné/Servon, son "Vieux Grand Chemin" qui franchit la "Vilaine" et deux nouveaux tracés de la voie romaine Rennes/Le Mans. 

  A - Le Peuple des Riedones

             Pour les "Bretilliens"(terme récent désignant les habitants d'Ille-et-Vilaine), il convient de connaitre cette civilisation dont ils sont issus; il en va de même pour ceux dont cet espace est devenu demeure de résidence, ainsi que toute personne curieuse d'Histoire. Le responsable de la revue "Archéologie en Bretagne"- René SANQUER- m'aura autorisé en 1990 à faire parcourir cet ouvrage d'Anne-Marie ROUANET-LIESENFELT :"La Civilisation des Riedones". Alors "Riedones" ou "Redones"? Rennes n'est pas "Riennes" et "Redon" "Riedon"../...Prenons le temps en partageant quelques extraits de l'ouvrage cité qui, en 1980, penchait pour un peuple de "Riedones":

    "On connait depuis 1868 l'inscription trouvée dans le rempart de Rennes qui mentionnait la (civ) itas ried (onum). On a alors désigné le peuple de "REDONES" que semblait appuyer la tradition littéraire. Les manuscrits de la "Guerre des Gaules" de César donnent la forme "Redones et parfois Rhedones". Cependant, la découverte de dédicaces de 1968 (T.Flavius Postuminus) se lisent au III ème siècle "Civitas Riedonum" et ainsi la forme "RIEDONES" s'emploie-t-elle dorénavant.                                                                                                                      

     RIEDONES : ce terme se décompose en un radical "Ried" et un suffixe -ones qui apparaît dans la formation de nombreux ethniques gaulois comme Santones, Pictones, Suessiones, .. Cette racine s'apparente à "Reidh" "conduire, être en mouvement" de langue celtique. Le gaulois "Reda" fait des Riedones "les gens aux chars" (lire dans la "Guerre des Gaules" la Bretagne (Grande-Bretagne) dont les habitants utilisent des chars au combat, mais l'image s'arrête là). Toutefois, la racine celtique "reidh" a pris des directions divergentes : "reidos" = mouvant, de parcours facile, a pris le sens d'"aisé, libre"; ainsi dans le gallois "rhwydd" et dans l'irlandais "reid". D'un autre côté, "reidos" "de parcours facile" a donné le sens de "dégagé, libre".On peut également se laisser tenter par "conduire, être en mouvement" avec ces habiles cavaliers bretons lançant leurs javelots à la fameuse bataille de Ballon près de Redon en 845... (rubrique Royaume de Bretagne, Légendes). 

     Autre hypothèse : le mot "RIED", dérivé de l'alemanique "RIETH", et qui se prononce "Rid" en alsacien, signifie "jonc" (roseau). En anglais "REED", le roseau. Le "RIED" d'Alsace, mais qui est également appelé ainsi en Bavière, Suisse, Autriche et Pays-Bas, désigne une région composée de prairies inondables, de haies et de petits massifs boisés qui créent un bocage ou un marécage. Ce "RIED" peut s'apparenter aux régions de marais de Redon (et le secteur de Ballon)  avant constructions au XXème siècle de plusieurs barrages. Les "RIEDONES" seraient les habitants d'un "RIED"?

     Les recherches actuelles soulignent que les Riedones peuvent être : les "rapides, les libres ou les généreux"; ou les "charretiers"; conducteurs de "chars". On retient surtout l'idée de "cavaliers" ou "conducteurs de chars". D'ailleurs, sur leurs monnaies, les Riedones sont surtout représentés en cavaliers.

     Pline L'Ancien, naturaliste mort en 79 de notre ère, auteur de 37 ouvrages "Histoire naturelle" : "Les Rhedones dont la ville est Condate 20°40 - 47°20"; des textes conservés au Musée de Rennes "CIVITAS RIEDONVM PERPE" (RIED) sont en l'honneur de Titus Flavius Postuminus, prêtre de Rome et d'Auguste, qui fut le premier à être honoré par la civitas des Riedones du flaminicat perpétuel de Mars Mullo.

     Inscription dite de la Porte Mordelaise à Rennes/Condate : "A l'empereur César Marcus Antonius Gordien, pieux, heureux auguste, grand pontife, revêtu de la puissance tribunicienne, Consul, le Sénat des Riedones" IMP (eratori) CAES (ari) M (arco) ANTONI (o) GORDIANO PI (o) FEL(ici) AVG (usto) P(ontifici) M (aximo) TR (ibunicia) P (otestate) CO (n)s (uli) O (rdo) R (iedonum).

     La Conquête romaine : En 57 avant JC, Publius Crassus (que César avait envoyé avec une légion anéantir la flotte des Vénètes (Morbihan).. ) cite les Riedones, "peuples marins riverains de l'océan",... et lui fit savoir que tous ces peuples avaient été soumis à Rome. Les Riedones formaient un peuple groupé autour du confluent de l'Ille et de la Vilaine car le nom de leur capitale "Condate" est un toponyme gaulois fréquent, que portent aussi le confluent de la Saône et du Rhône, près de Lyon (là où se dressait l'Autel Fédéral des trois Gaules), celui de la Seine et de l'Yonne, et bien d'autres encore... "Kemper", le nom breton de "confluent".

     Soumission fragile : les Riedones, nommés par Jules César "Redons", participèrent au grand soulèvement de Vercingétorix; pour l'armée qui devait secourir Alésia on demanda 20.000 hommes (à l'ensemble des 7 états formant l'Armorique).

Nota : ARMORIQUE : "Arvorig" est l'équivalent breton de "ARMORICA", terme qu'utilisait Jules César pour désigner les peuples gaulois du bord de mer du Finistère à la Seine. C'est au IVè siècle que les Romains réutilisent le mot "ARMORIQUE" pour une circonscription administrative de l'Empire allant de la Garonne à la Seine. Quand les Bretons d'Outre-Manche s'installent sur le continent, ils appellent leur terre "BRETAGNE ARMORIQUE" pour la différencier de la Grande-Bretagne. En breton, le premier dictionnaire en 1499 nous donne "ARMOR ou ARVOR", "terre après la mer". En 1582, Bertrand d'Argentré intitule la première carte connue du duché "Description du pays "ARMORIQUE" à présent "BRETAIGNE". Bernez ROUZ

 

 B- Traces archéologiques

    Malgré les traces archéologiques nombreuses les prédécesseurs des Riedones nous sont mal connus. D'eux nous restent des haches de pierre, ou de bronze, à talon ou à douille, des armes, épées, pointes de lances ou de javelots, les traces d'un atelier de fondeur à Janzé, des bijoux, bracelets, lunules en forme de croissants, mais surtout le très beau "torque" trouvé à Cesson qui est conservé au Musée de Cluny.

    Dès l'Age du Bronze le TORQUE - qui apparait en même temps que l'épée - fait partie de la panoplie de protection des guerriers. On le trouve aussi bien chez les Hittites que dans l'Egypte Pharaonique. Les chefs de guerre s'en servaient pour se protéger des coups d'épées portés au niveau de la tête et du cou. Les torques étaient accompagnés de casques protège-nuque et protège-joues. Quant aux simples guerriers qui ne pouvaient s'offrir ces équipements, ils se laissaient pousser les cheveux qu'ils tressaient en nattes serrées afin de se garantir des tranchants d'épées cherchant les décapitations ou les blessures au cou. Progressivement, le torque en or et finement orné est devenu une parure de notable.

Ajout AG : "Notons la découverte en 1972 de bracelets de l'époque du Bronze (1000 ans av JC) près de la "Motte"d'Acigné. Ces bracelets avec des motifs géométriques avaient été incisés au burin." Des galons ont été réalisés à Lyon pour le "Moulinet" afin d'orner le bas des robes du groupe évoluant en costumes. A découvrir également sur le site du "Musée de Bretagne" www.musee-bretagne.fr ou www.leschampslibres.fr (rubrique Consulter en ligne, Collections -en partage - écrire "Acigné" : photographies,...) Ci-dessous : galon et bracelet bronze,une des quinze urnes cinéraires découvertes allée des Onglées d'Acigné. 

                   
bracelets

                  

Les Riedones de l'époque celtique frappaient des statères d'or ou d'argent fourré de cuivre d'origine macédonienne. : "au droit la tête masculine laurée à droite, au revers un cheval au galop, le plus souvent à droite, conduit par un aurige, armé d'un fouet terminé par un vexillum et sous le cheval une roue à huit rais". On a trouvé des statères d'or à Liffré et Noyal-sur-Vilaine...

 

Pieces

   Nota AG : Ces statères en or ont été frappés à partir du 3ème siècle av J.C. Deux statères de gauche : " Riedones aux cheveux bouclés;  "cavalier chevauchant", qui tient dans la main gauche une EPEE courte et dans la droite un BOUCLIER ovale. Sous le cheval, LYRE debout à trois cordes; devant le cheval, au rendu très maigre, une rosace à sept ou huit branches."  statères de droite : 2ème s. av J.C., un cheval surmonté d'une LYRE et une ROUELLE à six rayons; la "cavalière" avec une épée, un bouclier, une LYRE typique de l'Est du Pays des "Redones".

         

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Statuette de JUPITER - TARANIS (La Bouëxière), l'énigme de "Rallion"

    

Décembre 1930, Théodore BOUTROT, cultivateur à la Blandinière dans la "Lande de Villeroy" en La Bouëxière (35), près de la nécropole de "Rallion", retourne un talus tout en abattant un if. Il découvre une statuette de bronze haute de 13 cm, représentant un homme nu seulement chaussé de sandales. Elle datait de la période gallo-romaine. Son authenticité est indiscutable, la patine qui la recouvrait ne pouvait avoir été créée en laboratoire (Victor COUEY membre de la Société  Archéologique d'Ille-et-Vilaine "Les découvertes de La Bouëxière" BSA I et V LX 1934 - 1935, p.143).Cependant sa description développée illustre le peu d'intérêt "expression niaise..., corps naïvement modelé, bras et jambes trop longs, les pieds trop grands. Ce n'est pas, malgré le mouvement élégant de l'ensemble une belle oeuvre d'art et son intérêt ne réside que dans ce qu'elle a d'énigmatique." On imagine donc la facilité avec laquelle cette pièce a pu rejoindre les collections d'un propriétaire privé plus perspicace! Elle disparait, devenant l'"énigme de Rallion"...

     Au jugement de Lantier à la Société des Antiquaires de France du 16/12/1934, le personnage masculin est représenté nu et debout sur un petit socle, orné d'une plinthe,

     les pieds chaussés de "COTHURNES" Nota : erreur, chez les Grecs et les Romains, chaussures de cuir enserrant la jambe jusqu'à mi-mollet et se laçant par devant.Parlons alors de sandales,

un bouclier ovale dans le bras gauche : Nota : autre erreur, le bouclier est "Polygonal",

tenant fermement de la main droite un SERPENT à TETE HUMAINE, s'appuyant sur ce serpent comme sur un bâton.Sa tête offre des traits fortement accentués, un menton court et proéminent, des joues aux larges méplats, un nez fort, des arcades sourcillières profondes abritant de lourdes paupières, dans lesquelles sont enchâssés deux yeux, en LAPIS - LAZULI : cette pierre polie couleur bleu azur est réputée pour réduire le stress, les migraines et insomnies ou l'amélioration de la vision nocturne. On la portait sur le front entre les yeux comme un troisième oeil - Nota : ici les pierres seraient deux yeux aux globules larges.

Ces yeux avec l'apport lapis-lazuli sont des indices d'une provenance étrangère, un individu de légion étrangère de l'armée romaine, selon la Société d'archéologie (Article du 7/2/1935 L'Ouest-Eclair où le journaliste parle même de "petit dieu égyptien"...La chevelure qui couvre le front est plaquée au crâne en mèches rigides. La tête humaine du serpent reproduit des traits identiques".

     Lantier rapproche la statuette de la plaquette de terre cuite de "CORBRIDGE" qui figure un "JUPITER gaulois", portant le casque, le bouclier, un bâton coudé (symbole du serpent) terminé par une tête de massue striée; en arrière est une ROUE RADIEE. Corbridge est un site romain au nord de l'Angleterre, proche du mur d'Hadrien.Une autre statuette, du même type, fut trouvée à l'oppidum de Boviolles à NAIX en Lorraine. Or, P.Lambrechts établit que le DIEU de la ROUE, appelé le JUPITER GAULOIS, est la même chose que TARANIS, dieu de la guerre, que figure la plaque de CORBRIDGE : c'est encore lui que représente la statuette au bouclier de la Bouëxière. Nous aurions donc affaire à une preuve, unique chez les RIEDONES, d'un culte de JUPITER GAULOIS - TARANIS. Le "Dieu de la roue" : c'est à ce culte que se rapporteraient les "AMULETTES" en forme de "ROUELLES" que l'on découvre par milliers en Gaule et qui semblent avoir été portées en collier. Or, un grand nombre de ces "ROUELLES" ont été trouvées dans la "Vilaine" (cf S.REINACH, Bronzes figurés de la gaule romaine, Paris, s.d., p.34) parmi des pièces de monnaies. Nous aurions donc là une preuve complémentaire de la vénération des RIEDONES pour TARANIS. Ayant déjà admis l'incinération, l'influence romaine a introduit chez les RIEDONES le nom de deux de leurs divinités.

     JUPITER, dieu romain qui gouverne la terre, le ciel et les êtres vivants, associé au dieu grec ZEUS. Par syncrétisme, on associe TARANIS, dieu du ciel et du tonnerre qui tient une ROUE, symbole du roulant du tonnerre et des révolutions terrestres. De la main droite il brandit la foudre et porte à l'épaule un cercle sur lequel sont accrochés des esses (éclairs).

     Venant de la voie romaine par Servon, Acigné et Cesson, on accédait à Condate (Rennes) par l'une des quatre portes, celle de "BAUDRAëRE" (rue Baudrairie). C'est à la hauteur de l'ancien pont Jean-Jaurès qu'on a trouvé un TRESOR avec l'amas d'une dizaine de milliers de pièces de monnaies d'or et d'argent qui s'étagent des temps républicains à la fin de l'Empire, sur une période de six siècles. Il s'agissait d'offrandes au fleuve de la Vilaine. Ce trésor aurait aussi été complété  vers 275, à une date où l'Empire romain subissait les attaques des tribus germaniques. Le pont Jean-Jaurès : appelé "pont de Berlin" en hommage à la Grande Armée qui marche sur Berlin en 1806, la population rennaise demanda le changement de nom en pont Jean Jaurès en 1915. Reliant la haute et la basse ville en créant une perspective depuis le Parlement, il fut construit avec une seule arche en 1835. Mais il s'écroule en 1837 pour s'ouvrir durablement en 1839. Il reliait la rue de Berlin (devenue Jean Jaurès) à la rue Maréchal Joffre. L'emplacement du pont où passait 200 tramways par jour laissa place dans notre période contemporaine à un recouvrement de la Vilaine.


  Fort heureusement, la statuette a refait surface chez un antiquaire parisien qui demandait une autorisation pour l'exporter aux Etats-Unis. Et elle a rejoint le Musée de Bretagne par une acquisition de 55 000 euros, financée en octobre 2003 pour moitié par Rennes Métropole et pour moitié par le Fonds d'acquisition régional qu'alimentent conjointement l'Etat et la Région. La conservatrice, Françoise Berretrot, indique "une datation comprise entre le 1er siècle av J.C. et le 1er siècle ap J.C. Si les caractéristiques de la statuette sont romaines (bouclier, sandales); le traitement du visage, les pommettes hautes, les cheveux, le traitement de l'arme à figure humaine casquée, sont d'influence celtique". Elle précise que le travail de l'artiste est remarquable car "fait en une seule coulée".


     Une anecdote avec la présence d'un IF : la statuette se trouvait dans un talus, prise entre les racines d'un if, et abritée sous une large pierre plate qui semblait placée là, exprès. Rien ne l'accompagnait. La présence d'un if est tout un symbole : c'est l'arbre qui représente autant la mort que l'éternité. Il est très présent en Irlande, Pays de Galles, Angleterre, Normandie et Bretagne où il orne nombre de cimetières. On peut citer l'if de Ménil-Ciboult (Orne) situé dans le cimetière, signe d'assimilation par le clergé des lieux de cultes préchrétiens.. Il totalise 12 m de diamètre avec 14,60 m de hauteur. Son coeur est mort et pourtant sa ramure reste verte; 20 personnes peuvent se tenir ensemble.Il  doit avoir 1 300 ans! L'if peut aussi donner la mort en servant à l'empoisonnement. César cite celui d'un chef Eburon (guerre des gaules VI - 31). En gaulois, l'if se nomme d'ailleurs "eburos". Changement de sexe : des ifs femelles produisent des arilles, baies de couleur rouge, parfois jaune.Il s'agit d'un processus botanique fréquent induit par un stress. On peut sucer la graine ou l'ingérer mais il ne faut pas la mâcher sous risques de fortes diarrhées ou de mort. Si l'oiseau ne s'intoxique pas c'est qu'il rejette la graine non broyée. Mais il n'en va pas de même pour les chevaux ou le bétail.Les rameaux contiennent un puissant cardiotoxique, mortel pour l'homme comme pour les animaux.

     Les archers gallois puis anglais étaient très réputés avec leur "longbow" (arc long) car l'if est un bois très souple et résistant. Cet arc de deux mètres fut utilisé pendant la guerre de Cent ans (1337 - 1453). Il pouvait atteindre une cible distante de 250 mètres avec 16 tirs minute à 200 km/heure. L'if est imputrescible, résistant à l'humidité et aux moisissures. Pouvant vivre 1 000 à 2 000 ans, avec son feuillage persistant, l'if est un conifère non résineux qui pousse très lentement. Il symbolise l'éternité sur terre ou ailleurs. On hésite à brûler des branches d'if dans les cheminées, craignant une intoxication. On craint de dormir dans un lit fabriqué avec l'if ou de déguster une soupe empoisonnée avec des rameaux... Arbre de l'éternité et de la mort il peut aussi devenir le "médecin des forêts". Des molécules extraites d'if du Pacifique peuvent soigner des cancers du sein, des ovules et du poumon. Un dicton indique : "tenir un bâton d'if dans ses mains est positif pour la prospérité et la santé du corps".

     Le lieu en La Bouëxière : la toponymie donne une origine gallo-romaine : Buxeria, le buxus, le buis. Chercher dans un lieu portant le nom de "bouëxière" donne toujours de bons résultats. Les gallo-romains entouraient leur villae de buis.

Le buis est très utilisé pour fabriquer des instruments à vent. Il possède une bonne longévité, jusqu'à 5 ou 600 ans. Il partage avec l'if l'aspect médicament ou poison ( la plante est toxique alcaloïde avec une action paralysante). L'if quant à lui est l'arbre des luthiers.

     Le Président de l'Association "BUXERIA", Histoire et Archéologie de La Bouëxière, trouve "pertinent la remarque sur les amulettes en forme de rouelle (dieu Jupiter Taranis) car il lui semble en avoir vu parmi des objets collectés sur la commune par un prospecteur. Concernant la toponymie de la Bouëxière, il indique qu'il a souvent entendu les anciens prononcer "La Boissière" (prononcé "Boëssière" sans le "x"). En gallo cela désigne un lieu boisé.


     Quand Auguste organisa la Gaule en 27 av JC les Riedones, qui étaient déjà une unité constituée, formèrent l'une des soixante "Civitates" de Gaule. L'empereur leur affecta le territoire qu'ils possédaient déjà au temps de leur indépendance, approximativement le département d'Ille-et-Vilaine. Au nord la question se complique : les Riedones atteignaient-ils ou non la mer? Par la "Notitia dignitatum", nous connaissons un corps de "milites Martenses", en garnison à "Aleto", chargés du littoral, de l'embouchure du Gouët à celle du Couësnon. Là, ils étaient relayés par les "Milites Dalmati d'Abrincatuis" (Avranches). "Martis" et "Martenses", Fanum Martis (Corseul), capitale des Coriosolitae, amènent à penser que ALET (o) - Saint-Servan de nos jours - était Coriosolite; et qu'elle était sans doute devenue leur capitale aux IVe et Ve siècles au détriment de Corseul.

     Nota AG : Avec la décision du "TRACTUS ARMORICANUS et NERVICANUS" gérant la surveillance des côtes à partir de 370, la côte nord est confiée aux Coriosolites (signalé dans la Notice des Dignités, "Noticia Dignitatum", de 425).

        Les "BASILICAE" (Bazouges) étaient des marchés installés auprès des limites de cités.(sur la carte Ier et IVè siècle)

                                                                                               

     La frontière Nord/Ouest de l'évêché de Rennes, de Cintré à Bazouges-la-Pérouse est très artificielle, jalonnée par les bourgs des "Bazouges" sous-Gévezé, sous-Hédé et la-Pérouse; plus loin encore à l'est c'est Bazouges-du-Désert. Le toponyme "basilica" (d'où Bazouges) n'apparaît qu'au IVè siècle après J.C. Quant à Feins ce toponyme vient de "fines" et commémore les bornes que les Romains plaçaient sur les voies au passage d'une frontière.

 

     Nota : Les bornes routières, en forme de colonne, portaient une inscription destinée à marquer les distances en milles romains d'environ 1 480 mètres. Leur hauteur varie entre 2 et 4 mètres pour un diamètre de 0,5 à 0,8 mètres. On peut trouver des bornes exprimées en lieues gauloises de 2 215 mètres ou romaines de 2 222 mètres. Ce sont des bornes "leugaires". La lieue (leuga ou leuca) est utilisée en Gaule et en Germanie. Sur les bornes des voies romaines, l'inscription est souvent abrégée LEVG ou L. Le mille de 1 000 pas vaut environ 1, 472 km. La lieue romaine est calculée par 1,5 mille, soit 1 500 pas qui représentent environ 2 222 mètres. 

 

 

 

 

 

 

 


 
 
L'ARMORIQUE

     "Armoricae" formé de "are" et "mor", voulant dire "proche de la mer", la formule de César "civitates maritimae qui Oceanum attingunt" est la traduction latine du terme gaulois. Une "civitates" peut être proche de la mer sans l'atteindre. Ce serait le cas des Riedones séparés de la baie du Mont-Saint-Michel par une bande très étroite du territoire des "Coriosolitae". L'Armorique d'avant César  -"Aremorica" en gaulois - s'étendait de l'estuaire de la Loire à celui de la Seine.

     L'origine du diocèse de Saint-Malo. La "noticia Gallarium" au Vème siècle ne connait pas la "civitas Coriosolitum" (Coriosolites) mais "Coriosopitum".  coriosoliteDeux civitates différentes ou la même dont le nom aurait été déformé ? Voir la carte désignant un peuple de "Corisopites-Venètes"au sud des "Ossismiens" et différenciés des "Coriosolites".  

   Au VIIème siècle Saint-Malo a fondé son évêché qui eut pour siège Alet(h) (Saint-Servan) jusqu'au XIIème siècle. Alet (h) était très probablement la capitale Coriosolite au IV et Vème siècles. Et sans doute rattachée à l'évêché de Quimper. Il est également avéré que l'évêché de Dol qui, du IXè au XII èmes siècles, eut des prétentions à devenir métropole de Bretagne, est une création de NOMINOE destinée à renforcer le pouvoir des évêques bretons contre celui des évêques francs partisans des Carolingiens.

   

C - LES VOIES ROMAINES : Rennes/Acigné/Le Mans/Angers et Rennes/Jublains

L'ouvrage : "on peut signaler la voie Vannes (Darioritum) Le Mans (Subdinum) qui passait par Condate, Cesson et Acigné (Pont Briand)."


    Nota : Depuis 1987, le CERAPAR (Centre de Recherches Archéologiques du Pays de Rennes), basé à Pacé, est l'interlocuteur privilégié du Service Régional d'Archéologie. Plusieurs déplacements sur Acigné, dont une démarche d'archéologie aérienne, permettent depuis 20 ans d'émettre d'autres hypothèses, alors que l'ouvrage "La Civilisation des Riedones" (1980) n'offre qu'un seul tracé sud.

                                                                                 

Tracé grand chemin Acigné-Paris; au nord,la voie Rennes - Bayeux est en réalité Rennes - Jublains
     La voie Rennes /Acigné/Le Mans/Angers 

     1) Cette affirmation (tracé sud) proposée par Banéat, un historien du début du XXè siècle, s'ajoutant à l'existence d'urnes funéraires à proximité, dans l'allée des "Onglées", est problématique car peu conforme aux méthodes des géomètres romains. Ce tracé traverse deux fois la "Vilaine" "inutilement", se rallonge, se complaît dans des terrains bas et humides.", ce qui n'est pas habituel. D'ailleurs, la présence d'un chemin des "Gatinelles" (proche du champ Gatinel) démarrant après le "pont Maillé", peut être emprunté avant la zone inondable d'hiver, permettant alors un espace à sec sur cette période de l'année. L'axe Ouest/Est par le pont cessonnais et le"pont Briand"est toutefois souvent compromis sur cette période hivernale. 

 

Tracé voie romaine est-Acigné

     2) Tracé Nord, privilégié par Alain PROVOST à partir de l'analyse du cadastre napoléonien : le tracé passe au nord du "Plessis", route de Servon, traverse Acigné au nord des "Clouères" et rejoint le "Pont d'Ohin" en ligne directe. Il longe ensuite la route actuelle de Rennes en passant par la ferme même de "Monthélon", rejoint le rond-point "Pâtis du Moulinet" de Thorigné/Fouillard et l'échangeur de la quatre-voies. Ce tracé semble être le plus convainquant.
Le passage entre le nord du "Plessis" et la forêt de "Corbières" (extrémité de la forêt de "Chevré") fait l'unanimité. La voie passait également au nord de la "Heudinière" avec un "Vieux Grand Chemin" détruit vers 1950.

  3) Une "Troisième voie", intermédiaire, est envisageable et fait l'objet de recherches d'indices sur le terrain et dans le parcellaire ancien...

     Sur ces tracés, on ne trouve en rien les structures des voies romaines classiques et d'importance : largeur de 5,10 mètres, trois couches superposées : 0,16 m de marnes, 0,15 m de schistes, 0,40 m de cailloux roulés, noyés dans une terre argilo-sableuse. L'avantage des passages de voies romaines en forêts c'est leur fossilisation à travers les âges. En zones cultivées, le tracé peut persister sous forme de haies ou de chemins, mais les aménagements culturaux ont presque toujours complètement changé sa physionomie.

     L'association "Acigné Autrefois" est très présente dans le cadre de l'accompagnement à ces recherches www.acigne-autrefois.fr 

     La voie Rennes/Jublains (site gallo-romain en Mayenne) passant par Thorigné/Fouillard, et coupant dans la forêt de Rennes, est bien identifiée, en particulier en forêt où sa structure est bien conservée et a été l'objet de fouilles archéologiques conduites par le CERAPAR en 2006. On a longtemps considéré que cette voie menait vers Bayeux.

 

 

 

 

 

 

 

 


    Chez les Riedones, la région étant toujours calme, les troupes romaines sont restées aux frontières. Les seules troupes présentes furent au Vème siècle des Lètes - francs, soldats-colons au nombre de 500 à 1 500 hommes. Des invasions et "Bagaudes" : après une grande invasion de barbares de 406 à 409, un mouvement social d'origine paysanne éclata, les "bagaudes", provoquant une sécession de l'Armorique entre 409 et 418. On essaya de se défendre par ses propres moyens puisque l'empereur Honorius s'en révélait incapable. En 435, nouvelle incursion des "Alains" du Caucasien Goar.

     L'immigration bretonne d'Ouest en Est commença vers 440 - 441. Sous la pression des Angles, Jutes ou Saxons, l'émigration bretonne (Grande-Bretagne), déjà amorcée depuis deux siècles, s'amplifia dans la seconde moitié du Vè siècle jusqu'à la fin du VIè siècle. L'Armorique, alors ruinée, ne put résister. A la fin du Vè siècle, quatre grands comtés bretons furent constitués : Bro-Erec (d'abord appelé Bro Waroch du nom du chef breton qui conquit ce territoire vénète), Cornouaille, Domnonée et Léon. Et trois comtés gallo-francs : l'est du Vannetais, Nantes (dans l'empire romain, deux noms sont portés : "Condivicnos/Condivincnum" et "Portus Namnetus", ce dernier nom évoluant fin d'empire en "Civitas Namnetum", nom du peuple. Le Haut Moyen Age en fit "Nametis" qui, après disparition du "e" non accentué, amena "NANTES"; le nom breton est "Naoned". Enfin, dernier comté : Rennes. Tenant compte de la toponymie, l'extension partie de Basse-Bretagne s'arrêtait au IXe siècle un peu à l'ouest d'une ligne Bourg-des-Comptes, Laillé, Bruz, Le Rheu, Gévezé, Vignoc, Langouët, Guipel, laissant à l'est Marcillé-Raoul et Roz-sur-Couesnon. Dans toutes les communes sises à l'Ouest de la ligne, on trouve des noms de lieux bretons ou en -ac, provenant de mots latins qui dans le reste de la "civitas" ont donnés des toponymes en - é; cependant, il s'agit, plutôt que d'une zone bretonnante, d'une zone mixte ou breton et roman ont été parlés simultanément, où les noms de lieux-dits ont évolué de deux façons.

     L'influence gallo-romaine domina toujours la "civitas" jusqu'à ce que l'Armorique reconnût la domination de CLOVIS, en 480, mais vraisemblablement après son baptême (496?) car les Armoricains n'acceptèrent l'alliance franque que parce que les Francs étaient chrétiens comme eux-mêmes (Procope "de bello gothico")

                                         CONDATE (RENNES), Capitale des Riedones

CONDATE, capitale des Riedones sous Auguste, lors de l'organisation de la Gaule Chevelue (27 av.J.C.), occupait une excellente position au milieu du bassin de Rennes, région la plus riche de la civitas. Les fleuves la défendaient de ses sinuosités et des marécages. Toutefois, posée sur une colline haute de 55 mètres,protégée sur trois côtés mais d'accès très facile à l'Est, la ville n'est pas un site de forteresse.                        

    Rennes I/IIIè s 1 Porte Mordelaise 2 Place St Michel 3 Pont Jean-Jaurès 4 Préfecture 5 Rue d'Echange 6 Rue Saint-Martin 7 Rue Hoche ,en grisé forte densité archéologique

    Rennes III/IVè s 1 Quai Duguay-Trouin 3 Rue de la Monnaie A Porte Mordelaise B Porte Aivière C Porte Baudraère D Porte St Michel 

                                    Le fleuve "VILAINE" a sa source en Mayenne à Juvigné et se jette dans l'Océan Atlantique au bout de 225 km vers Penestin, dans le Morbihan. Grégoire de Tours , "Historia Francorum" IX, 9 cite la "Vicinonia". C'est de ce nom, ou de sa variante "Vicenonia", qui a donné la "Vilaine" par l'intermédiaire des formes "Visnogne", "Visnongne", "Visnègne", "Visnaine", selon J. Loth; par attraction paronymique - selon M. Dauzat 1946 - des mots île et "vilain". D'autre part, dans le "Cartulaire de Redon", on trouve les formes "Visnonia", "Vitisnonia", "Visnonius", "Visnonicum" flumen". "Visnonia", issu de la racine hydronymique pré-celtique "onna" (eau courante, rivière) et de l'indo-européen "ueis" (flot). En 1444, "Visnonia" devient "Villaigne".

       Pour l'ancien animateur du Tourisme rural du "Pays de Redon", créateur de la Bogue d'Or - Jean-Bernard Vighetti - remonter la "Vilaine" vers la direction de l'office de tourisme de Rennes fut naturel. Natif de Pontchâteau en Loire-Atlantique, il était proche d'Arzal. Avant la construction du barrage en 1970,il y avait connu le phénomène du mascaret avec la surélévation du niveau de l'eau avec la marée, comme dans l'estuaire de la Gironde. L'eau salée remontait au nord de Redon jusqu'à Guipry-Messac ou presque. Cela avait créé un écosystème en basse et moyenne Vilaine avec 10 hectares de marais disposant d'une flore originale et une faune abondante. Avec un bassin-versant qui fait presque un tiers de la Bretagne historique, soit 10 400 m2, le fleuve la "Vilaine" débite chaque année cinq milliards de m3 d'eau, soit environ 158 m3 par seconde. Le commerce fluvial aura été facilité par François Ier en 1539 (également année ordonnnances Villers-Cotterêts!), avec ce premier canal de son Royaume achevé en 1585. Ainsi, on facilitait le commerce de vin et poisson mais surtout du précieux sel guérandais. Celui-ci, débarqué au port de Guipry, prenait une route des saulniers vers le Maine. Selon l'auteur de "La Vilaine, chemin d'eau en Haute-Bretagne", deuxième version publiée en 2023, l'hypothèse du nom du fleuve serait à trouver dans les premiers écrits du VIè siècle avec le nom d'une déesse gauloise nommée "Visegnognia". On modifiera ce nom au Xè siècle en "Visnonia", littéralement "la rivière aux eaux de rouille". La version francisée deviendra "Villaingne" en enfin "Vilaine".

     225 km, de Juvigné en Mayenne, on aura un parcours : Vitré, Rennes, Moulin du Boël (Bruz), Moulin de la Courbe (Bourg-des-Comptes), Ecluse de Guipry-Messac, Redon, Port de Foleux, Port de La Roche-Bernard, Barrage d'Arzal, Pénestin Morbihan.

         

     La "Vilaine" est reliée vers la Manche par le canal d'Ille-et-Rance jusqu'à Evran (Côtes d'Armor). Au sud de Rennes, elle se découvre en décor de "châteaux de la Loire" avec, entre autres, le "Petit Versailles Breton" à Bourg-des-Comptes, le magnifique château du Boschet (XVIIè s.) www.chateauduboschet.fr . Dans les années 1970, on a construit un barrage à Arzal (Morbihan). Les eaux des marées étaient ainsi freinées, permettant alors de maintenir le débit des eaux douces et neutralisant les crues régulières; sans toutefois calmer l'ardeur aux grandes marées à cause d'un écoulement trop lent. Malheureusement, l'évacuation de la vase a permis l'accentuation des méfaits des nitrates. Comme les marées ne remontent plus jusqu'à Redon, les civelles et les anguilles disparaissent. Le lent débit renforce l'herbe et conforte la présence néfaste des ragondins avec leurs urines polluantes. Vers Vitré en amont nord, on a construit 3 barrages : en 1978, la "Valière" pour des besoins en eau potable; en 1982, La Chapelle-Erbrée pour la protection des inondations hivernales du Pays de Rennes. Son bassin nautique est sujet à des attaques de cyanobactéries; en 1995, "Villaumur", sur l'affluent de la "Cantache" pour la protection contre les crues et une tentative du renforcement de la qualité des eaux...

 


     Condate doit son développement non à des avantages stratégiques mais plutôt à son site de confluent - l'Ille et la Vilaine -, présence de ponts, de gués ou de bacs. C'était un important carrefour avec les routes de Carhaix (Osismis), Erquy (Reginae), Corseul (Fanum Martis), Vannes (Darioritum), Valognes et Avranches (Legedia), Lisieux, Bayeux, Jublains (Noviodunum), Angers (Juliomagus), Le Mans (Subdinum), Nantes (Condevicnum),  ... A Condate se rencontraient neuf routes de terre. Il faut rajouter l'Ille et la Vilaine, toutes deux navigables. A l'arrivée des Romains, on employait le nom de "Condate", ce jusqu'au Ie et IIe siècles (Table de Peutinger et itinéraire Antonin).

     La construction des remparts ne date qu'à la fin du IIIème siècle. On retrouve des traces place de la Mission, près de l'Hôtel de Coniac, rue de la Monnaie, porte Saint-Michel (détruite en 1868) et quai Duguay-trouin (Nos 2, 4, 8, 10, 14, 16, 18), avec des murs de 3 à 4 mètres d'épaisseur, pouvant atteindre 9 à 10 mètres de hauteur. C'est aussi à cette période que la capitale perdit son nom propre pour prendre celui du peuple. De même que "Lutetia Parisiorum" devenait Paris, "Subdinum", ville des "Cenomani" (le Mans), Condate s'est muée en "Civitas Riedonum" ou "Condate Redonum". Du latin "Redonica Urbis" au VIè siècle, "Rhedonas oppidum" ou "Rodonis civitate" au IXè siècle, "Rhedonis" au XIè siècle, la suppression du "d" entre les deux voyelles permit d'obtenir "Renes" en 1294 puis le nom de "RENNES" à partir du XIVè siècle. En breton, Rennes se dit "Roazhon". En 1890, les deux milliaires du mur d'enceinte gallo-romain, dédiés à l'empereur Maximin et au césar Maxime, attestent qu'en 237, la mutation était faite. Dans la "Notitia dignitatum utriusque imperii", on cite un préfet Lètes Francs avec sur le manuscrit "Redones" ou "Redonas". Avec quelque 3 000 habitants, c'était un centre d'administration, plus qu'un centre de défense. 

     Les quatre portes d'accès : Mordelaises, Chastellière, Aivières et Baudraëre. Par cette dernière on accédait aux voies Le Mans/Angers (direction Cesson Sévigné, Acigné, Servon sur Vilaine)... C'est en direction de cette porte "Baudraëre" qu'on a trouvé un  "trésor" avec l'amas d'une dizaine de milliers de pièces de monnaies d'or et d'argent qui s'étagent des temps républicains à la fin de l'Empire, sur une période de six siècles. il s'agissait d'offrande au fleuve de la Vilaine avec des pièces de monnaie jetées une à une. L'emplacement de la découverte, à la hauteur de l'ancien pont Jean-Jaurès, correspond au bac pris par les voyageurs qui se dirigeaient vers la porte d'entrée de ville "Baudraëre".Ce trésor aurait aussi été complété et  enseveli vers 275, à une date où l'Empire subissait les attaques de tribus germaniques. D'ailleurs, à partir de 276, sous Probus, des constructeurs ont travaillé en toute hâte, sous le coup des "invasions barbares". Faute de temps pour extraire des pierres, on aura utilisé des briques de façon massive, avec également l'apport de galets et de ciment. L'alimentation en eau de la ville était assurée par un aqueduc souterrain qui passait de la porte Mordelaise aux rives de l'Ille. L'Armorique a été ruinée au début du Vè siècle par la voracité du fisc romain. A cela s'ajoute la cupidité du préfet d'Empire, Aétius, qui aura livré la péninsule aux "Alains", avec l'objectif de les faire s'éloigner une fois le pillage accompli. Ce "marchandage romain" attira également des pirates saxons sur les côtes. Quelques siècles plus tard, le premier rempart médiéval du XIIè siècle s'était élevé sur ces solides fondations romaines.

DECOUVERTES et BATI : le bassin de Rennes est pauvre en bonne pierre à bâtir : le schiste briovérien résiste mal aux intempéries. C'est pourquoi la plupart des maisons rurales sont construites en Pisé. Et que l'on trouve peu de traces d'occupation des campagnes de l'époque gallo-romaine. D'ailleurs pour construire les remparts de Condate y domine de façon anormale au Bas Empire la brique.

     Les Gallo-Romains entouraient souvent leurs villae de buis, d'où le nom de "Buxaria" donné à ces emplacements. On trouve neuf lieux-dits et une commune - La Bouëxière ou Boissière - dans le territoire des Riedones. Contrairement aux constructions le buis a longtemps résisté : une fouille à une "Bouexiere" donne toujours des résultats.

     La Centurie, parcelle réglementaire du cadastre romain, est un carré de 710 mètres de côté, d'une superficie de 200 jugera. Nombre de routes sont écartées les unes des autres de 235 mètres, 175 ou 180 mètres, ou encore 145 mètres, toutes distances qui sont des sous-multiples de 710.

     TRESORS : des événements ont incité la population à mettre à l'abri des pièces de monnaies vers les années 200 à 270. Les 3 découvertes sont situées à Liffré, Coesmes et Dingé. Ajout AG : 1087 pièces ont été découvertes en 2012 à St Aubin du Pavail (Piolaine); d'autres à Amanlis en 1835.

     SEPULTURES : les plus remarquables sont situées en Acigné dans l'allée du château des Onglées. Ce champ d'urnes cinéraires comprenait 15 urnes espacées entre elles d'un mètre; toutes brisées sauf une elles contenaient des cendres et des ossements calcinés.On peut supposer à la présence d'un "fundus Aciniacus" dont ç'aurait pu être le cimetière. Les Gallo-Romains, à l'exemple des Romains, prirent l'habitude d'ensevelir leurs morts en bordure des voies.

     Saint-Martin : nous ignorons comment fut évangélisée la "civitas des Riedones". Ce ne fut certainement pas avant la fin de l'apostolat de Saint-Martin et de ses disciples, qui se place dans la seconde moitié du IVème siècle. Saint-Martin étant mort vers 396-400. Sous son nom, la dédicace portera sur cinquante-quatre paroisses du diocèse. Mais ce ne fut pas non plus l'oeuvre des Bretons qui ne conquirent pas la "civitas". Le premier titulaire est Athenius qui assistait en 461 au Concile de Tours. Plus tard en 511 l'évêque de Rennes est Melaine, gallo-romain de bonne famille né à Platz dans la commune de Brain.

                                                                        L'ARPENTAGE ANTIQUE

     L'ARPENTAGE ANTIQUE : un cadastre antique est un moyen d'organiser géométriquement un ou plusieurs domaines ruraux (fundi) d'étendue variable, en répartissant la terre en lots rectangulaires ou carrés de superficie identique, en prenant pour base le tracé d'une voie antique.

Théoriquement on se basait sur le croisement de deux axes routiers, perpendiculaires et jalonnés, la voie N/S s'appelant "Cardo maximus", la voie E/O "Decumanus maximus" des lignes agraires parallèles et équidistantes. Les divisions ainsi réalisées étaient appelées "centuries", soit pour des côtés mesurant 20 actus (2400 pieds = 710 mètres environ), 100 lots de jugères (=50,512 ha). Les lignes de séparation appelées "limes", limites figuraient au sol sous la forme de chemins, de limites de culture, de fossés, d'alignements empierrés...

                                                Le territoire d'ACIGNE/SERVON

     Le territoire d'Acigné/Servon : l'est du bassin de Rennes évoquait dès l'Antiquité un paysage de clairière, malgré la proximité d'une grande étendue boisée des forêts domaniales de Rennes et de Chevré. Ajoutons à ce paysage forestier la vallée de la "Vilaine" et l'on saisira l'aspect de "zone-tampon" du territoire, au total trop proche de deux obstacles majeurs pour laisser aux domaines ruraux un espace suffisant. D'où le souci d'opérer une division rigoureuse des finages, qu'on repère principalement de la boucle des "Onglées", formée par la "Vilaine" jusqu'à l'est de Servon.

                                                                                            

     Il est admis qu'à l'est de Condate un tronçon de la grande artère impériale "Vorgium-Condate-Subdinum" (Carhaix/Le Mans) traversait ces territoires. Il se trouve qu'un tracé en lignes brisées et discontinues apparait dans les cadastres sous l'appellation "Vieux Grand Chemin", ce qui renvoie à la "Via antiqua" ou à l'ancienne route royale de Rennes à Paris, héritière elle-même de la première. Organe de distribution des terres ce "Vieux Grand chemin" contraint de franchir par trois fois la "Vilaine" et d'éviter la lisière de la forêt de Chevré :

      - à l'est d'Acigné, après le moulin de Sévigné au "Pont Briand" (Cesson) lorsqu'il sert d'allée au château des Onglées; à l'ouest au nord du château de la Motte; en Servon, à l'est de la "Croix Jallu" au nord de la ferme du "Champ Hervelin".
Malgré les inflexions provoquées par la géographie les arpenteurs ont su faire d'un simple trajet une succession de limites ou "decumani maximi". Tous les chemins ruraux forment un réseau routier orienté N/S aux éléments parallèles. Les photos aériennes révèlent, perpendiculairement à ces linéaments, des limites de culture étirées, équidistantes selon le module de l'arpentage romain avec des carrés de 710 mètres de côté. Les lignes decumanes s'allongent nettement, ici limite communale prolongée par une route (au sud de la ferme de "Vernay") là, humble chemin creux raviné (axe Joval/Récusses, Guichet).

     Les "limes" cardinaux figés, au sol usé et encaissés dans l'épaisse couche de limon, desservent des lieux habités très tôt. Le village de "Grébusson" apparaît dans les textes anciens dès 1037 lorsque le duc Alain III en confia la jouissance à sa soeur, abbesse de l'abbaye de Saint-Georges de Rennes. On sait par les chartes de la même abbaye que plus loin le finage de type annulaire de "Bourgon" existait au XIIème siècle (Terra Sua de Borgum 1152-1158) alors prieuré puis intégré au XV ème siècle à la manse abbatiale.On y accédait par un chemin déformé au delà duquel coule le maigre ruisseau des Forges dont le lit introduit une nouvelle orientation des champs et des sentiers. En effet, à l'est de ce site le réseau des voies rurales révèle un canevas régulier.
     Le cadastre napoléonien permet de conclure également à l'existence de deux "fundi" différenciés. Tout d'abord le "pré" et le pont de "Maillé" centré sur le quadrillage ouest. Si le dictionnaire étymologique propose le nom d'homme latin Mallus, associé au suffixe -iacum, Hamlin préfère quant à lui le gentilice Mallus comme racine au nom de Maillé. Mallius ou Mallus représente le gentilice du propriétaire d'un domaine de 300 ha, premier domaine à la sortie de Rennes.

     La nécropole exhumée en 1921 dans l'allée du château des Onglées, sous la forme de 15 urnes funéraires, doit être rattachée à ce domaine.

                                                Acciniacus/Aquinius/Acinius/Acignei/Acigné

     Le domaine dont le nom est transcrit "Acciniacus" vers 1008, "Acignei" vers 1030 renvoie à Acigné, localité dont le premier sanctuaire est dédié à Saint-Martin. La forme latine "Acciniacus" mentionnée par J.Loth pourrait expliquer le nom d'Acigné; encore que les gentilices avancés par Holder "Aquinius" ou "Acinius" puissent convenir.Le suffixe gaulois "acus" (appartenance) a été latinisé en "acum" pour situer une propriété ou un domaine. En fonction d'une évaluation de surface sur les cartes on peut attribuer à cette propriété 12 centuries d'un seul tenant, soit 600 ha de bonnes terres labourables (les finages de Grébusson et Bourgon aux terres très convoitées). Cet arpentage avoisine la limite de navigabilité de la "Vilaine" fixée, pour la navigation traditionnelle, à Cesson. La grande partie du sol était ici mise en valeur. Restaient incultes les versants immédiats de la "Vilaine" au sud de l'axe décumal passant par "Vernay". Inculte également l'immense forêt ceinturant au nord ce "saltus". Peu ou pas de limon sous ce gigantesque domaine forestier, disséqué dès la période romaine, principalement entre la forêt domaniale actuelle et celle de "Chevré" où l'on constate dans les limites de l'actuelle clairière un resserrement de trois voies antiques.

    Notons enfin les toponymes le "champ ferré, la chemine, la maison rouge" qui laisse entendre que cet itinéraire rectiligne, dont le revêtement dû faire appel à des scories d'industrie, aboutissait à un site riche en débris de tuiles, de briques, de pierres rouges.

     Les arpenteurs concentraient leurs opérations sur des points assurant :  

         - des sols sains, bien aérés grâce à l'altérabilité du sous-sol schisteux ou granitique, dont l'affleurement est généralement peu profond, ce qui lui permet d'améliorer la porosité des mottes, leur aération et de donner une terre ne formant pas bloc.

        - des sols secs, grâce notamment à l'exposition sur des pentes tournées au midi, sur lesquelles la terre se réchauffe facilement au printemps. En arguant de ces remarques nous devinons que l'administration recherchait moins les terrains produisant en grande quantité que les champs assurant une récolte régulière.

Alain GOUAILLIER (ex) Secrétaire "d'Acigné Autrefois" www.acigne-autrefois.fr

     Compléments pour vos propres recherches :

  • BANEAT "Etudes sur les voies romaines du département d'Ille-et-Vilaine" BSA I&V 1928 et "Le vieux Rennes" 1904/1909
  • Abbé BRUNE "Répertoire archéologique, Département d'Ille-et-Vilaine" BSA I&V 1861
  • COUFFON "Limites des cités gallo-romaines et fondation des évêchés dans la péninsule armoricaine" BSA I&V 1942
  •  LA BORDERIE "Hippolyte Vatar, Rennes"1894 et "Histoire de Bretagne", Rennes et Paris, 1896
  • MERLET "Formation des paroisses et des diocèses en Bretagne" Bull. Sté Archéologie de Bretagne XXX, 1950
  • TOULMOUCHE "Histoire archéologique de l'époque gallo-romaine de la ville de Rennes" (suite aux fouilles de 1841 à 1846; monnaies et antiquités),  étude des voies qui partaient de cette cité, trois cartes et 20 planches lithographiées, Rennes, Paris, 1847 .

 Information : Article "Ouest-France" samedi 15 novembre 2014 : "La Bretagne préhistorique. Les peuplements des origines à la conquête romaine" racontée en 120 pages.

     "Le livre balaye un bon nombre d'idées reçues, notamment sur les menhirs ou l'invasion présumée de la Bretagne par les Celtes. Skol Vreizh Editions vient de publier un livre qui "dresse un tableau des peuplements qui se sont succédé sur la péninsule armoricaine sur un temps très long : du Paléolithique à la conquête romaine", explique Yannick LECERF, l'auteur de l'ouvrage. L'objectif était de montrer, au fil des changements climatiques, comment les hommes se sont adaptés à leur environnement. Comment de chasseurs-cueilleurs, ils sont devenus éleveurs-agriculteurs, ont élevé des mégalithes."


   César, la Guerre des Gaules

       

Statue de Jules César, au jardin des Tuileries

 

Jules César naquit le 13 Quintilis (juillet de nos jours) de l'an 100 av J.C. Il fera ses armes en Asie et sera nommé dans le Premier triumvirat en 60 av J.C. avec Pompée et Crassus (le riche). Le mariage avec Julie, la fille de Pompée , lui donnera le pouvoir de 60 à 58 av J.C. en Gaule Cisalpine, en Gaule chevelue et en Illyrie. Une guerre civile opposera cependant César et Pompée en 49 et 48 av J.C. Après la traversée du Rubicon par César, Pompée sera assassiné en Egypte où César triomphera : "Veni, Vidi, Vici" (je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincu). Ayant battu les fils de Pompée en Espagne, il se fera nommer "imperator", dictateur à vie. Mais il sera  assassiné par Brutus en mars 44 av J.C.

 

 

Aperçu général sur les "livres" "Commentarii de bello Gallico" : 58 à 51 av J.C. : neuf années pour vaincre la Gaule "un circuit de trois millions 200.000 pas". Nous sommes à l'automne 52 av J.C., Jules César a vaincu Vercingétorix. Il veut se faire réélire pour un second consulat. Aussi, en trois mois, il rédige les épisodes de sa conquête gauloise. Ses commentaires deviendront "La Guerre des Gaules" avec des souvenirs, des rapports de lieutenants ou adressés au Sénat ... et des cartes grecques erronées. Sans omission capitale, César présente sa version. Avec habilité il explique que ses différentes interventions étaient à la demande des peuples voulant se protéger d'autres envahisseurs. Quant à la Bretagne, il fallait bien briser ce lieu de résistance. La pacification fut toujours recherchée sauf si manque de sincérité. Les lois de l'époque étaient cruelles. César se défendait de commettre des massacres inutiles malgré ceux des quarante mille assiégés de Bourges ou les Vénètes d'Armorique. Il lui fallait aussi intimider l'adversaire et marquer aux vaincus sa force. Hirtius, ami et porte-plume de César, écrivit le "huitième livre" après la mort de son maître.

 César utilisa 12 légions ayant presque toutes pour emblème le taureau. A cette époque une légion comprenait dix cohortes de six cents légionnaires chacune. Chaque cohorte était divisée en trois manipules de deux cents hommes. Au combat, elles évoluaient en trois lignes. En marche forcée, le légionnaire pouvait réaliser 7,2 kilomètres en 50 minutes, puis 10 minutes de récupération, et ce pendant 8 à 9 heures, avec un équipement de 40 kilogrammes. Chaque légion était accompagnée d'une cavalerie de dix turmes de trois décuries, soit au total 900 cavaliers. Les ayant tout d'abord combattus, César fera appel à cinq cents cavaliers Germains pour combattre les Gaulois à Alésia. Formés à la dure dès le plus jeune âge, les Germains étaient des mercenaires recherchés.

 Cette synthèse des huit livres commence par le Livre Troisième; il convenait d'aborder en premier les récits sur les Vénètes du Morbihan.

                    LIVRE TROISIEME : VII partant pour l'Italie, César envoya Servius Galba avec la douzième légion et une partie de la cavalerie pour "ouvrir un chemin à travers les Alpes (Col du Grand Saint-Bernard) où les marchands ne pouvaient passer sans courir de grands risques et payer péage. Après avoir donné des enfants en otages les Gaulois se retournent contre les Romains par peur qu'ils ne s'établissent à jamais dans leur région. Une sortie héroïque du camp romain assiégé par trente mille Sédunes (haute vallée du Rhône) s'achèvera par un bon tiers tué et les autres, effrayés, prenant la fuite... Après ces événements, César avait toute raison de croire que la Gaule était pacifiée : les Belges avaient été battus, les Germains chassés, les Sédunes vaincus dans les Alpes; il était dans ces conditions, parti au commencement de l'hiver pour l'Illyrique,  (sur les bords de l'Adriatique) dont il voulait aussi visiter les nations et connaître les contrées : soudain, la guerre éclata en Gaule. Voici quelle en fut la raison. Le jeune Publius Crassus, avec la septième légion, était allé hiverner chez les Andes, à proximité de l'Océan (toutefois, région de Angers ; rappelons que César dispose de vieilles cartes grecques avec une "Armorique" rapetissée).

     Le blé faisant défaut dans ces parages des Andes, il envoya un grand nombre de préfets et de tribuns militaires dans les états voisins pour y chercher du blé et des vivres: Titus Terrasidius, entre autres, fut envoyé chez les Unelles (Manche), Marcus Trébius Gallus chez les Coriosolites (Côtes d'Armor), Quintus Vélanius avec Titus Silius chez les Vénètes (Morbihan).

     Les Vénètes (Morbihan actuel),  nota : dimanche 1er mai 2022, jour de l'ancienne fête celtique Beltan, une stèle sculptée par Patrick Guého fut inaugurée au port du Guilvin de Locmariaquer. L'institut culturel de Bretagne a choisi d'ériger cette stèle car, selon Jacques Madec, adjoint au patrimoine, "il est à peu près certain que Locmariaquer était à l'époque l'un des ports principaux des Vénètes et peut-être leur capitale pendant un temps".

                 VIII - Ce dernier peuple est de beaucoup le plus puissant de toute cette côte maritime : les Vénètes possèdent le plus grand nombre de navires, avec lesquels ils trafiquent en Bretagne, et surpassent les autres peuples par leur science et leur expérience de la navigation; ils occupent, d'ailleurs, sur cette grande mer violente et orageuse, le petit nombre de ports qui s'y trouvent, et ont pour tributaires presque tous ceux qui naviguent habituellement dans ces eaux. Les premiers, ils retiennent Silius et Vélanius, pensant recouvrer par ce moyen les otages qu'ils avaient livrés à Crassus. Poussés par leur exemple, leurs voisins, avec cette prompte et soudaine résolution qui caractérise les Gaulois, arrêtent pour le même motif Trébius et Terrasidius; vite, ils s'envoient des députés, et s'engagent,par l'entremise de leurs chefs, de ne rien faire que d'un commun accord et de courir tous la même chance; ils pressent les autres cités de conserver la liberté qu'elles avaient reçue de leurs pères, plutôt que de supporter le joug des Romains. Toute la côte est bientôt gagnée à leur avis, et une ambassade commune a été envoyée à Publius Crassus pour l'inviter à rendre les otages s'il veut qu'on lui rende ses officiers.

     Nota :  Des statères d'or "Venètes" les présentent avec une magnifique chevelure bouclée.

                 IX - Informé de ces événements par Crassus, César ordonne de construire en l'attendant - car il était très loin - des navires de guerre sur la Loire, qui se jette dans l'océan, de lever des rameurs dans la Province et de se procurer des matelots et des pilotes. Ces ordres sont promptement exécutés. Lui-même, dès que la saison le lui permit, se rendit à l'armée. Les Vénètes, ainsi que les autres états, quand ils savent l'arrivée de César, comprenant de quels crimes ils s'étaient rendus coupables en retenant et en jetant dans les fers des ambassadeurs (dont la qualité chez toutes les nations fut toujours sacrée et inviolable), proportionnent leurs préparatifs guerriers à la grandeur du péril et pourvoient surtout à l'équipement de leurs navires; leur espoir était d'autant plus fort que la nature du pays leur inspirait beaucoup de confiance. Ils savaient que les chemins de terre étaient coupés à marée haute par des baies, que toute navigation était entravée par l'ignorance où nous étions des lieux et le petit nombre des ports; ils pensaient que le manque de vivres nous rendait impossible tout séjour prolongé chez eux, et, lors même, que leur attente serait trompée en tout point, ils se savaient toujours les plus puissants sur mer. Ils savaient que les Romains n'avaient point de marine, qu'ils ne connaissaient ni les rades ni les ports ni les îles du pays où ils feraient la guerre, et que la navigation était toute autre sur une mer fermée que sur le vaste et immense Océan. Leurs résolutions prises, ils fortifient les places et transportent le blé de la campagne dans ces places; ils rassemblent le plus de vaisseaux possible chez les Vénètes, contre lesquels ils pensent que César ferait d'abord la guerre. Ils s'assurent pour cette guerre l'alliance des Osismes (Finistère), des Lexoviens (Lisieux), des Namnètes (Loire-Atlantique), des Ambiliates (Maine-et-Loire), des Morins (Belges Pas-de-Calais, Flandre), des Diablintes (Mayenne), des Ménapes (Belges Rhin/Escaut); ils demandent des secours à la Bretagne (Grande Bretagne), située vis-à-vis de ces contrées.

          X - Nous venons de montrer quelles étaient les difficultés de cette guerre; et cependant plusieurs motifs commandaient à César de l'entreprendre : l'injure commise en retenant des chevaliers romains; la révolte après la soumission; la défection après la remise des otages; la conjuration de tant d'états, et surtout la crainte que l'impunité laissée à ces peuples n'encourageât les autres à user des mêmes libertés. Il connaissait l'amour de presque tous les Gaulois pour le changement et leur promptitude à partir en guerre, et il savait, d'ailleurs, qu'il dans la nature de tous les hommes d'aimer la liberté et de haïr l'esclavage. C'est donc sans attendre qu'un plus grand nombre d'états entrassent dans la ligue, il pensa qu'il lui fallait partager son armée et la répartir sur une plus large étendue.

                  XI - Aussi, envoie-t-il avec de la cavalerie Titus Labénius, son lieutenant, chez les Trévires, peuple voisin du Rhin; il le charge de voir les Rèmes et autres Belges, de les maintenir dans le devoir, et de fermer le passage du fleuve aux Germains, que l'on disait appelés par les Belges, s'ils essaient de le franchir avec leurs bateaux. Il ordonne à Publius Crassus de se rendre en Aquitaine avec douze cohortes légionnaires et une cavalerie nombreuse, pour empêcher les peuples de ce pays d'envoyer des secours en Gaule et que des nations si grandes ne s'unissent. Il envoie son lieutenant Quintus Titurius Sabinus avec trois légions chez les Unelles, les Coriosolites et les Lexoviens, pour tenir ce côté en respect. Il donne au jeune Décimus Brutus le commandement de la flotte et des vaisseaux gaulois fournis, sur son ordre, par les Pictons, les Santones et les autres régions pacifiées, et lui dit de partir au plus tôt chez les Vénètes. Lui-même s'y rend avec les troupes d'infanterie.

                 XII - Presque toutes les villes de cette côte étaient situées à l'extrémité de langues de terre et sur des promontoires, et n'offraient d'accès ni aux piétons, quand la mer était haute (ce qui se produit régulièrement deux fois en vingt-quatre heures), ni aux vaisseaux, parce qu'à marée basse les vaisseaux se seraient échoués sur des bas-fonds. C'était là la double entrave au siège de ces places. Si par hasard, après des travaux considérables, on parvenait à contenir la mer par des digues et des terrassements et à élever ces ouvrages jusqu'à la hauteur des murs, les assiégés, lorsqu'ils désespéraient de leur fortune, rassemblaient de nombreux vaisseaux, dont ils avaient une grande quantité, y transportaient tous leurs biens et se retiraient dans des places voisines, où la nature leur offrait les mêmes commodités pour se défendre. Cette manoeuvre leur fut d'autant plus facile durant une grande partie de l'été, que nos vaisseaux étaient retenus par le mauvais temps et qu'il était extrêmement difficile de naviguer sur une mer vaste et ouverte, sujette à de grandes marées, sans ports ou presque sans ports.

 Dun Aegus

                   XIII - Les vaisseaux des ennemis, eux, étaient construits et armés de la manière suivante. leur carène était beaucoup plus plate que celle des nôtres, de sorte qu'ils avaient moins à craindre les bas-fonds et le reflux; leurs proues étaient très relevées, et les poupes appropriées également à la force des vagues et des tempêtes; les navires tout entiers de chêne, pour soutenir n'importe quel choc et n'importe quelle fatigue; les traverses avaient un pied d'épaisseur et étaient attachées par des chevilles en fer de la grosseur d'un pouce; les ancres étaient retenues par des des chaînes de fer, au lieu de cordages, des peaux, au lieu de voiles, et des cuirs minces et souples, soit qu'ils manquassent de lin ou n'en sussent pas l'usage, soit, ce qui est plus vraisemblable, qu'ils crussent peu facile de diriger avec nos voiles des vaisseaux aussi lourds, à travers les tempêtes de l'Océan et ses vents impétueux. Quand notre flotte se rencontrait avec de pareils vaisseaux, son seul avantage était de les surpasser en vitesse et en agilité; tout le reste était en faveur des navires ennemis, mieux adaptés et accommodés à la nature de cette mer et à la violence de ses tempêtes; en effet les nôtres, avec leurs éperons, et la hauteur de leur construction faisait que les traits n'y atteignaient pas facilement, et, en même temps, qu'il était peu commode de les harponner. Ajoutez à cela que, si le vent venait à s'élever, ils s'y abandonnaient, supportaient plus facilement les tempêtes, pouvaient mouiller en toute sécurité sur des bas-fonds, et, si le reflux les abandonnait, ne redoutaient ni les rochers ni les écueils, tandis que tous ces dangers étaient pour nos vaisseaux très redoutables.

   Nota : STRABON (60 av J.C - 20 apr J.C.) : "les Vénètes construisent leurs bateaux larges de carène et hauts de poupe et de proue à cause des marées. Ils les construisent en chêne, bois qu'ils ont en abondance, ce qui les conduit à ne pas joindre les planches bord à bord, mais à ménager un espace vide qu'ils bourrent d'algues pour que le bois ne sèche pas faute d'humidité, quand le bateau a été tiré sur le rivage". Partant des indications de César et l'artiste Nicolas Cayré, on peut définir un bâtiment d'environ 30 à 35 m de long. Une telle longueur suppose une largeur au maître-bau de 8,5 à 9 m, le tirant d'eau pouvant atteindre entre 1,80 et 2 m. Ces navires armoricains ont la particularité de posséder une proue et une poupe fortement relevées, afin de lutter contre les hautes vagues de l'Océan. Ce type de bateau à coque arrondie, n'ayant nul beoin de rameurs et se distinguant des bateaux à rames à fond plat utilisés par les Grecs et les Romains , suppose l'existence d'une quille, innovation gauloise! Ajoutons des cuirs cousus pour les voiles, plus résistants que du tissu et les cordages qui pouvaient être remplacés par des chaînes en fer. 

   Le sanctuaire des Vénètes s'élève sur l'île de Sein, appelé le "Saint des saints". Il était propriété de neuf druidesses, les "GALLISENAE" (Ass. Teuta Osismi) De nos jours, SEIN, 8 532 ha, 250 habitants, 0 exploitation agricole; Groix, 1 770 ha, 2230 hab, 9 exp., Belle-Ile, 8 400 ha, 5400 hab, 40 exp., Houat, 288 ha, 230 hab., 2 ex., Molène, 72 ha, 140 hab., 1 exp., Ouessant, 1 558 ha, 830 hab., 3 exp., Batz, 457 ha, 470 hab., 18 exp., Bréhat, 318 ha, 360 hab., 5 exp., Ile aux Moines, 320 ha, 600 hab, O exp.

                      XIV - Après avoir pris plusieurs places, César, voyant qu'il se donnait tant de peine inutilement, et que la prise de ses villes ne pouvait empêcher ni la retraite de l'ennemi ni lui faire le moindre mal, décida d'attendre sa flotte. Dès qu'elle arriva et aussitôt qu'elle fut aperçue par l'ennemi, deux cent vingt de leurs vaisseaux environ, tout prêts et parfaitement équipés, sortirent de leur port et vinrent se placer face aux nôtres.            


Nota :  Sans doute la rivière d'Auray, partant du port de Saint-Goustan. La bataille eut lieu probablement dans la baie de Saint-Gildas... Quelques siècles plus tard, le père de la Constitution des Etats-Unis - Benjamin Franklin - débarque le 4 décembre 1776 dans le port de Saint-Goustan pour négocier avec le roi Louis XVI l'aide de la France aux insurgés américains. Parmi les accords, la flotte de sept à huit bateaux corsaires armés à Dunkerque et rentrant "après leurs courses" sur des bateaux de commerces anglais à Morlaix. On contrariait le ravitaillement mais aussi l'envoi d'hommes. Cette "Flotte noire", déclarant les bateaux capturés auprès de l'amirauté de Tréguier, était constituée d'Irlandais qui ont pris parti contre l'Angleterre à l'époque où Irlande et Angleterre étaient une même nation. La moitié des plus belles maisons de Roscoff sont des maisons de contrebandiers. Louis XVI soutenait alors la jeune république américaine où treize colonies venaient de faire sécession.13 colonies devenues ces bandes rouges et blanches sur le drapeau américain, s'ajoutant 50 étoiles sur fond bleu pour l'ensemble des Etats contemporains : "Stars and stripes" ou "the Star-Spangled Banner" (la bannière étoilée). Lire "La Flotte noire de Benjamin Franklin" de Jacques Blanken.

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Brutus, qui commandait la flotte, et les tribuns militaires et centurions qui avaient chacun un vaisseau, étaient indécis sur ce qu'ils avaient à faire et sur la tactique du combat à adopter. Ils savaient, en effet, que l'éperon était impuissant; et, si l'on élevait des tours, les vaisseaux barbares les dominaient encore de par la hauteur de leurs poupes, si bien que nos traits lancés d'en bas portaient mal, tandis que ceux des Gaulois tombaient sur nous d'autant plus vivement. Une seule invention préparée par les nôtres fut d'un grand secours :

                  C'étaient des faux extrêmement tranchantes, emmanchées de longues perches, assez semblables à nos faux murales. Avec ces faux on accrochait et l'on tirait à soi les cordages qui attachaient les vergues aux mâts; on les rompait en faisant force de rames; une fois rompues, les vergues tombaient forcément, et les vaisseaux gaulois, en perdant leurs voiles et les agrès sur lesquels ils fondaient tout leur espoir, étaient du même coup réduits à l'impuissance. Le reste du combat n'était plus qu'affaire de courage, et en cela nos soldats avaient facilement l'avantage, surtout dans une bataille livrée sous les yeux de César et de toute l'armée : aucune action un peu belle ne pouvait rester inconnue; l'armée, en effet, occupait toutes les collines et toutes les hauteurs d'où la vue s'étendait sur la mer toute proche.

                                    XV - Dès qu'un vaisseau avait eu ses vergues abattues de la manière que nous avons dite, deux ou trois des nôtres l'entouraient et nos soldats montaient de vive force à l'abordage. Ce que voyant, les Barbares, qui avaient perdu une grande partie de leurs navires et qui n'avaient aucune riposte à cette manoeuvre, cherchèrent leur salut dans la fuite; et déjà ils se disposaient à profiter des vents, quand soudain il survint  

                                            un CALME PLAT qui leur rendit tout mouvement impossible. Cette circonstance compléta d'une façon très opportune notre victoire : car les nôtres attaquèrent et prirent chaque navire un à un, et ce n'est qu'un bien petit nombre d'entre eux qui put, à la faveur de la nuit, regagner la terre. Le combat avait duré depuis la quatrième heure du jour environ jusqu'au coucher du soleil.

                                       XVI - Cette bataille mit fin à la guerre des Vénètes et de tous les Etats maritimes de cette côte : car tous les hommes jeunes et même tous les hommes d'un âge mûr, distingués par leur rang ou leur sagesse, étaient réunis là, et ils avaient rassemblé en outre sur ce seul point tout ce qu'ils avaient de vaisseaux, et cette perte ne laissait aux autres nul moyen de se replier ou de défendre leurs places. Aussi se rendirent-ils corps et biens à César. César décida de faire un exemple sévère, qui apprît aux Barbares à mieux respecter à l'avenir le droit des ambassadeurs. Il fit donc mourir tout le Sénat et vendit le reste à l'encan.

     Nota : Les romains ne disposaient que de 100 navires face aux 220 vaisseaux vénètes détruits un par un. Les survivants auront les mains tranchées. Femmes et enfants seront vendus comme esclaves. 

                                                                   LIVRE PREMIER : Les Belges

       La Gaule, dans son ensemble, est divisée en trois parties, dont l'une est habitée par les Belges, l'autre par les Aquitains, la troisième par ceux qui dans leur propre langue se nomment Celtes, et, dans la nôtre, Gaulois. Tous ces peuples diffèrent entre eux par la langue, les coutumes, les lois. Les Gaulois sont séparés des Aquitains par le cours de la Garonne, des Belges par la Marne et la Seine. Les plus braves de tous ces peuples sont les Belges, parce qu'ils sont les plus éloignés de la civilisation et des moeurs raffinées de la Province, parce que les marchands vont très rarement chez eux et n'y importent pas ce qui est propre à amollir les coeurs, parce qu'ils sont les plus voisins des Germains qui habitent au-delà du Rhin et avec qui ils sont continuellement en guerre. Il en est de même des Helvètes, qui surpassent aussi en valeur le reste des Gaulois, parce qu'ils sont presque chaque jour aux prises avec les Germains, soit pour les empêcher de pénétrer sur leurs territoires, soit pour porter eux-mêmes la guerre dans leur pays.

     Craignant qu'après une pacification de la Gaule les Romains "marchent contre eux", les Belges, tiers de la Gaule, se liguent mutuellement. César lève alors deux nouvelles légions au commencement de l'été. Les Belges d'origine germaine dont les "Bellovaques" qui pouvaient mettre sur pied cent mille hommes, s'associaient à 13 autres peuples pour un nombre de près de trois cent mille hommes. (Nota : ce chiffre est évidemment très exagéré!) César plaça son camp à la rivière de l'Aisne pour être défendu d'un côté. Il le fortifie par un retranchement et un fossé. .. Proche du camp, une ville amie de Rèmes est attaquée par les Belges qui procédaient comme les Gaulois : "ils commencent à se répandre en foule autour des remparts, lancent de tous côtés des pierres sur les murs, ils s'approchent des portes en formant la tortue et sapent alors les murs les plus dégarnis". Face à cette attaque ils furent sauvés par l'envoi de Numides, des archers crêtois et des frondeurs baléares. Les Belges évitent cette cité en brûlant les villages et dévastant les terres. Le camp de César, quant à lui,  sera secouru par l'apport de six légions qui mettront en fuite les Belges en les attirant dans les marais. Les chefs Bellovaques se réfugient en Bretagne. Il fallut aussi combattre les soixante mille Nerviens qui passent pour les plus barbares. Ce peuple avait la particularité de refuser l'importation du vin et produits de luxe "propres à amollir les âmes et affaiblir le courage". 

     Dans le même temps, César fut informé par Publius Crassus, qu'il avait envoyé avec la septième légion chez les Vénètes, les Unelles, les Osismes, les Coriosolites, les Esuviens, les Aulerques, les Redons, peuples marins sur les côtes de l'Océan, que tous ces peuples étaient sous la domination et au pouvoir du peuple romain. Nota : il ne cite pas les "Namnètes (Loire-Atlantique) et les Pictons/Santones (Poitou).

     "Eodem tempore a P.Crasso, quem cum legions una miserat ad Venetos, Unellos, Osismos, Coriosolitas, Esuvios, Aulercos, Redones, qua sunt maritimas civitates Oceanumque attingunt, certior factus est omnes eas civitates in dicionem potestatemque populi Romani esse redactas"

     "A la même époque, P.Crassus, que (César) avait envoyé avec une légion chez les Vénètes, les Unelles, les Osismes, les Coriosolites, les Esuvii, les Aulerques, les Redons, peuples marins riverains de l'Océan, lui fit savoir que tous ces peuples avaient été soumis à Rome"

     Ayant pacifié toute la Gaule, César partit pour l'Italie. On décréta quinze jours de supplications, ce qui n'était encore arrivé à personne. Pompée n'avait eu que douze "actions de grâces solennelles" après sa victoire sur Mithridate.

                             Les Germains et Arioviste le Suève : Une guerre gauloise pour la prééminence entre Eduens (Bourguignons), alliés des romains,  et Arvernes (Auvergnats) avait attiré une quinzaine de milliers de mercenaires Germains puis cent vingt mille. Il allait arriver qu'en peu d'années les Gaulois seraient chassés de leur pays et que tous les Germains passeraient le Rhin, car le sol de la Germanie ne pouvait se comparer à celui de la Gaule, non plus que la manière de vivre des deux pays. Les Eduens se mirent à implorer le secours de César qui réussira à vaincre les Germains. A la bataille majeure, le jeune Publius Crassus commandait la cavalerie. Alors que l'aile droite était en difficulté il envoya la troisième ligne romaine secourir les soldats. Ce qui fut décisif pour la victoire...Un autre élément fut déterminant : Arioviste, chef Germain,  ne livra pas rapidement une bataille générale : "c'était la coutume chez les Germains que les femmes consultassent le sort et rendissent des oracles pour savoir si le moment de combattre était venu ou non; or, elles disaient que les Germains ne pourraient en être vainqueurs s'ils engageaient le combat avant la nouvelle lune (qui tombait cette année-là le 18 septembre). Nota : ces femmes germaines, matrones et prophétesses, consultaient le sort à l'aide de bouts de bois marqués d'un signe qu'on mêlait sur une étoffe blanche; on en tirait trois au hasard, en interprétant les signes qu'ils portaient. Les oracles étaient aussi rendus d'après les courants des fleuves et l'interprétation des bruits.

              LIVRE QUATRIEME : I - L'hiver suivant, en janvier 55 av J.C. , qui fut l'année du consulat de Cnéius Pompée et de Marcus Crassus, les Germains Usipètes et aussi les Tenctères passèrent le Rhin en grand nombre, non loin de l'endroit où il se jette dans la mer, (vers Clèves). La raison de ce passage fut que depuis plusieurs années les Suèves leur faisaient une guerre sans répit et les empêchait de cultiver leurs champs. Le peuple des Suèves est de beaucoup le plus grand et le plus belliqueux de toute la Germanie. On dit qu'ils forment cent cantons, de chacun desquels on tire tous les ans mille hommes pour aller guerroyer au dehors. Les autres, ceux qui sont restés au pays, pourvoient à leur nourriture et à celle de l'armée; tandis que l'année suivante, ils prennent les armes à leur tour, tandis que les premiers demeurent au pays. Ainsi, ni l'agriculture, ni la science ou la pratique de la guerre ne sont interrompues. Au reste aucun d'eux ne possède de terre en propre, et ne peut, pour la cultiver, demeurer plus d'un an dans le même lieu. Ils consomment peu de blé, et vivent en grande partie du lait et de la chair des troupeaux; ils sont de grands chasseurs. Ce genre de vie, leur alimentation, l'exercice quotidien, leur indépendance qui, dès l'enfance, ne connut jamais le joug d'aucun devoir, d'aucune discipline, cette habitude de ne rien faire contre leur gré, tout cela les fortifie, et en fait des hommes d'une taille prodigieuse. De plus, ils ont pris l'habitude, sous un climat très froid, de n'avoir pour tout vêtement que des peaux (dont l'exiguïté laisse à découvert une grande partie de leur corps) et de se baigner dans les fleuves.

     II - Ils laissent venir chez eux les marchands, plutôt pour vendre le butin de guerre qu'ils ont fait que par désir d'importer. Ils n'utilisent même pas ces chevaux étrangers qui plaisent tant dans la Gaule, et qu'on y paie si cher; mais à force d'exercer chaque jour ceux de leur pays, qui sont petits et mal faits, ils les rendent très endurants. Dans les combats de cavalerie, il leur arrive souvent de sauter à bas de leurs chevaux et de se battre à pied; ils ont dressé les chevaux à rester sur place, et ils les rejoignent vite, si besoin est; rien, à leur idée, n'est plus honteux et ne prouve plus de mollesse que de faire usage de selles. Aussi, quel que soit leur petit nombre, attaquent-ils sans hésiter une troupe nombreuse dont les chevaux sont sellés. L'importation du vin est complètement interdite chez eux, parce qu'ils croient que cette boisson énerve les hommes et affaiblit leur résistance.

     V - TRAITS DE CARACTERES DES GAULOIS : César, redoutant la pusillanimité des Gaulois, qui sont prompts à changer d'avis et d'ordinaire avides de nouveautés, ne crut pas devoir s'en remettre à eux. On a, en effet, l'habitude, en Gaule, de forcer les voyageurs à s'arrêter, même malgré eux, et de les interroger sur tout ce que chacun d'eux a appris ou connu. Dans les villes, le peuple entoure les marchands, les oblige à dire de quel pays ils viennent et ce qu'ils y ont appris. C'est sous le vent de ces potins et de ces ouï-dire qu'ils décident souvent les affaires les plus importantes, pour se repentir bientôt forcément d'avoir cédé à des bruits incertains, et la plupart du temps inventés pour leur plaire.

 NOTA : Comment se représenter les Gaulois? ...en 60 peuples différents...Seule la Gaule située à l'Ouest du Rhône porte le nom de "Gaule Chevelue" (Gallia Comata) non citée ainsi par Jules César car non conquise entre -58 et -51 av J.C. A cette époque, Strabon le géographe grec, signale que les "Gaulois laissent croître leurs cheveux." Ce sera repris en 23 de notre ère par Pline l'Ancien, l'écrivain latin : "Les Gaulois pouvaient porter une coupe avec des mèches parallèles séparées par des sillons ou une coupe avec cheveux plaqués sur le crane (à l'emplacement de la tonsure des moines) et mèches plus souples autour du visage". Enfin, les écrivains contemporains à Vercingétorix leur attribuent de longs cheveux sur le devant et la tête tondue à l'arrière. Pour le vestimentaire, les pantalons appelés BRAIES (braccatae) n'étaient portés qu'en Gallia braccata (Province narbonnaise et Aquitaine). La Gaule cisalpine, appelée Gallia togata par Hirtius, avait adopté les moeurs romaines et portait la toge.

     On dispose d'éléments visuels avec ce trésor de Pionsat (Puy de Dôme) 52 av J.C. qui présente Vercingétorix sous forme de statère (on a recensé 25 statères d'or "Vercingétorix (s)" et 2 de bronze..) Il est sans moustache, façon dieu Apollon, héros ou divinité de type "héllénistique". Par contre, des pièces romaines -48 av J.C. le montrent avec barbe, moustache et cheveux longs : au bout de quatre ans de captivité dans les geôles de Tullianum à Rome cela ne peut nous renseigner sur le port habituel antérieur. "Tullianum", prison souterraine à deux étages, sombre, infecte et épouvantable...

     Au début du XIXè siècle, pour donner un dénominateur commun aux différents peuples de France, le pouvoir, des écrivains, des peintres et sculpteurs, auront proposé Une "Histoire de nos ancêtres les Gaulois"; puis une "Histoire de France" destinée aux enfants du cours élémentaire avec des attributs selon leurs appréciations et des textes antiques.

     Revenons à Sidoine Apollinaire le poète latin né à Lyon en 430, mort en 489 (devenu malgré lui évêque de Clermond-Ferrand en 472) : les Gaulois portaient les cheveux longs sur le devant et avaient le derrière de la tête tondue. C'est Diodore de Sicile qui nous éclaire le mieux : "les Gaulois sont grands de taille; ils ont la chair molle et la peau blanche: leurs cheveux sont naturellement blonds, et ils cherchent par des moyens artificiels à rehausser cette couleur : ils les lavent fréquemment avec une lessive de chaux; ils les retirent du front vers le sommet de la tête et la nuque, de sorte qu'ils ont l'aspect de Satyres et de Pans. Grâce à ces moyens, leurs cheveux s'épaississent tellement qu'ils ressemblent aux crins des chevaux. Quelques-uns se rasent la barbe et d'autres la laissent croître modérément, mais les nobles se rasent les joues, et laissent pousser les moustaches, de manière qu'elles leur couvrent la bouche. Aussi leur arrive-t-il que, lorsqu'ils mangent, les aliments s'y embarrassent, et, lorsqu'ils boivent, la boisson y passe comme à travers un filtre."

     Ainsi tous les Gaulois ne portent pas la moustache, d'autres ont parfois la barbe... contrairement aux Bretons qui ont, selon Jules César, "cheveux longs, se rasent tout le corps, excepté la tête et la lèvre supérieure" (moustache). La moustache gauloise est réduite à l'espace qui relie la narine avec la commissure des lèvres. On l'appelle ainsi 101 (1 pour moustache et 0 pour le vide qui les sépare). Cette moustache façon 101 sera portée plus tard par Louis XIV au XVIIè siècle. La barbe en collier était également un style bien gaulois au début de notre ère. Selon les périodes, les lieux, les âges et les statuts dans la société, les modes diffèrent. Ainsi, au IIème siècle, les statues d'Entremont représentent les aristocrates gaulois sans barbe ni moustache, comme les Romains. Au IIIè siècle les représentations étrusques et grecques de guerriers gaulois les montrent avec une moustache, pas de barbe et coiffés de façon très recherchée, avec des boucles et des nattes. Enfin, au VIè siècle les chefs ont une grosse moustache et une grande barbe.

    Portrait des FRANKS "singulièrement sauvage" par les écrivains de l'époque : " ils relevaient et rattachaient sur le sommet du front leurs cheveux d'un blond roux, qui formaient une espèce d'aigrette et retombaient par derrière en queue de cheval. Leur visage était entièrement rasé, à l'exception de deux longues moustaches qui leur tombaient de chaque côté de la bouche. Ils portaient des habits de toile serrés au corps et sur les membres avec un large ceinturon auquel pendait l'épée. Leur arme favorite était une hache à un ou deux tranchants, dont le fer était acéré, et le manche très court. Ils commençaient le combat en lançant de très loin cette hache, soit au visage, soit contre le bouclier de l'ennemi, et rarement ils manquaient d'atteindre l'endroit précis où ils voulaient frapper.

     Outre la hache qui , de leur nom, s'appelait "francisque", ils avaient une arme de trait (de jet) qui leur était particulière, et que dans leur langue ils nommaient "HANG", c'est-à-dire hameçon ou, en grec, "ANGON, crochet". C'était une pique de médiocre longueur, d'un mètre de long, et capable de servir également de près et de loin. La pointe, longue et forte, était armée de plusieurs barbes ou crochets tranchants et recourbés. Le bois était couvert de lames de fer dans presque toute la longueur, de manière à ne pouvoir être brisé ni entamé à coups d'épée. Lorsque ce hang s'était fiché au travers d'un bouclier, les crocs dont il était garni en rendaient l'extraction impossible, il restait suspendu. Alors le Franc qui l'avait jeté s'élançait et, posant un pied sur le javelot, appuyait de tout le poids de son corps et forçait l'adversaire à baisser le bras et à se dégarnir ainsi la tête et la poitrine. Quelues fois le hang attaché au bout d'une corde servait en guise de harpon à amener tout ce qu'il atteignait. pendant qu'un des Franks lançait le trait, son compagnon tenait la corde, puis tous deux joignaient leurs efforts, soit pour désarmer l'ennemi, soit pour l'attirer lui-même par son vêtement ou son armure. La garde du roi avait seule des chevaux et portait des lances du modèle romain : le reste des troupes était à pied. Ils n'avaient ni cuirasses, ni bottines garnies de fer (portées par le légionnaire romain avec la petite jupe de maille ou de bandes de cuir); un petit nombre portait des casques, les autres combattaient nu-tête. Pour être moins incommodés par la chaleur, ils quittaient leur justaucorps de toile et gardaient seulement des culottes d'étoffe ou de cuir qui leur descendaient jusqu'au bas des jambes (équivalent des braies portées par les gaulois). Ils n'avaient ni arc, ni fronde, ni autres armes de traits, si ce n'est le hang et la francisque.

Nota : les frondeurs baléares d'Hannibal étaient la terreur des Romains pendant les guerres puniques. Les projectiles étaient lancés avec une telle impétuosité que ni bouclier ni casque ne résistait. On l'appelait "fonde" le "r" ne date que du XVIè siècle.

     

     XV -  CESAR DANS L'EXAGERATION ! : Les Germains, entendant une clameur derrière eux, et voyant qu'on massacrait les leurs, jetèrent leurs armes, abandonnèrent leurs enseignes militaires et s'échappèrent hors du camp. Arrivés au confluent de la Meuse et du Rhin, désespérant de poursuivre leur fuite, et ayant perdu un grand nombre des leurs, ceux qui restaient se jetèrent dans le fleuve et y périrent vaincus par la peur, la fatigue, la force du courant. Les nôtres, sans avoir perdu un seul homme et n'ayant qu'un tout petit nombre de blessés, délivrés d'une guerre si redoutable, où ils avaient affaire à quatre cent trente mille hommes, se replièrent sur leur camp. César donna à ceux qu'il avait retenus la permission de partir; mais ceux-ci, craignant les supplices et les tortures des Gaulois, dont ils avaient ravagé les champs, lui dirent qu'ils voulaient rester auprès de lui. César leur concéda la liberté.

     XVI - Après avoir terminé la guerre contre les Germains, César, pour de nombreuses raisons, se détermina à passer le Rhin. La meilleure était que, voyant la facilité avec laquelle les Germains se décidaient à passer en Gaule, il voulait leur inspirer les mêmes craintes pour leurs biens, en leur montrant qu'une armée du peuple romain pouvait et osait franchir le Rhin. Une autre raison s'ajoutait à celle-là, c'était que ceux des cavaliers Usipètes et Tenctères, avaient passé la Meuse pour prendre du butin et du blé et n'avaient pas assisté au combat, s'étaient retirés, après la défaite de leurs compatriotes, au-delà du Rhin, chez les Sugambres, et s'étaient unis avec eux. César ayant envoyé des députés demander aux Sugambres de lui remettre ceux qui avaient porté les armes contre lui et contre les Gaulois, ils répondirent que l'"empire du peuple romain finissait au Rhin; s'il ne trouvait pas juste que les Germains passassent en Gaule, malgré lui, pourquoi prétendait-il à quelque pouvoir ou à quelque autorité au-delà du Rhin?" Or les Ubiens, qui, seuls des Transrhénans, avaient envoyé des députés à César, lié amitié avec lui, livrés des otages, le priaient instamment "de les secourir contre les Suèves, qui les pressaient vivement; ou, si les affaires de la République l'en empêchaient, de porter seulement son armée au-delà du Rhin : ce serait un secours suffisant et une garantie pour l'avenir; le renom et le prestige de cette armée étaient tels, depuis la défaite d'Arioviste et ce dernier combat, même chez les peuplades les plus reculées de la Germanie, que la pensée qu'ils étaient les amis du peuple romain leur assurerait la sécurité". Ils promettaient une grande quantité de navires pour le transport de l'armée.

     XVII - César, avait décidé de passer le Rhin; mais la traversée sur des bateaux lui semblait un moyen peu sûr et peu convenable à sa dignité et à celle du peuple romain. Aussi, malgré l'extrême difficulté de construire un pont à cause de la largeur, de la rapidité et de la profondeur du fleuve, il estimait cependant qu'il lui fallait tenter l'entreprise ou, sinon, renoncer à faire passer l'armée.

  XVIII - Tout l'ouvrage est achevé en dix jours, à compter de celui où les matériaux avaient été apportés, et l'armée passe (secteur de Coblence/Cologne). César, laissant une forte garde aux deux têtes du pont, marche vers le pays des Sugambres. Cependant, les députés de nombreux états vinrent lui demander la paix et son amitié; il leur fait une réponse bienveillante et les invite à lui amener des otages. Mais les Sugambres qui, sur les exhortations des Usipètes et des Tenctères, qu'ils avaient parmi eux, avaient tout préparé pour fuir, du moment où l'on commença de construire le pont, avaient quitté leur pays, emporté avec eux tous leurs biens et étaient allés se cacher dans une contrée déserte et couverte de forêts... César, ayant atteint tous les buts qu'il s'était proposés quand il avait décidé de faire passer le Rhin à son armée, comme de faire peur aux Germains, châtier les Sugambres, délivrer les Ubiens de la pression qu'ils subissaient, au bout de dix-huit jours passés au-delà du Rhin, crut avoir assez fait pour la gloire et l'intérêt de Rome, revint en Gaule et coupa le pont derrière lui.

                                                 XX - La Bretagne (Grande-Bretagne) : premier débarquement 

      L'été étant fort avancé, César, bien que les hivers soient précoces dans ces régions, résolut cependant de partir pour la Bretagne, comprenant que, dans presque toutes les guerres contre les Gaulois, nos ennemis en avaient reçu des secours; il pensait du reste que, si la saison ne lui laissait pas le temps de faire la guerre, il lui serait cependant très utile d'avoir seulement abordé dans l'île, vu le genre d'habitants, reconnu les lieux, les ports, les accès, toutes choses qui étaient presque ignorées des Gaulois; car nul autre que les marchands ne se hasarde à y aborder, et ceux-ci mêmes n'en connaissent que la côte...

     XXI - Voulant avoir ces renseignements avant de tenter l'entreprise, il envoie avec un navire de guerre Caïus Volusénus, qu'il juge propre à cette mission. Il lui demande de faire une reconnaissance d'ensemble et de partir au plus tôt. Lui-même, avec toutes ses troupes, part pour le pays des Morins, car c'est de là (sans doute Boulogne) que le trajet en Bretagne est le plus court. Il y rassemble des vaisseaux tirés de toutes les contrées voisines et fait venir la flotte qu'il avait construite, l'été précédent, pour la guerre des Vénètes... Ayant rassemblé et fait ponter environ quatre-vingt vaisseaux de transport, nombre qu'il jugeait suffire pour transporter deux légions, il distribua ce qu'il avait en outre de vaisseaux de guerre à son questeur, à ses lieutenants et à ses préfets. A cette flotte s'ajoutaient dix-huit vaisseaux de transport qui étaient à huit mille de là (10 kilomètres), empêchés par le vent de parvenir au même port... Il n'avait que ses premiers vaisseaux lorsqu'il atteignit la Bretagne vers la quatrième heure du jour (25, 26 ou 27 août vers 9 heures du matin), et là, il vit, sur toutes les collines, les troupes des ennemis sous les armes... Il profita d'une marée et d'un vent d'un même coup favorables, pour donner le signal, et, levant l'ancre, il rangea ses navires à sept mille pas de là environ sur une plage unie et découverte (au nord est de Douvres).

     XXIV - Mais les Barbares, s'étant aperçus du dessein des Romains, envoyèrent en avant leur cavalerie et ces chars dont ils ont coutume de se servir dans les combats, et les suivirent avec le reste de leurs troupes pour s'opposer à notre débarquement. Plusieurs circonstances rendaient très difficile la descente : nos vaisseaux, en raison de leur grandeur, ne pouvaient s'arrêter qu'en pleine mer; nos soldats, ignorant la nature des lieux, les mains embarrassées, chargés du poids considérable de leurs armes, devaient à la fois s'élancer des navires, lutter contre les vagues, et se battre avec l'ennemi; tandis que celui-ci, combattant à pied sec ou s'avançant très peu dans l'eau, entièrement libre de ses membres, connaissant parfaitement les lieux, lançait ses traits hardiment et poussait sur nous ses chevaux qui avaient l'habitude de la mer. Nos soldats, épouvantés par ces circonstances et du reste peu faits à ce genre de combat, n'avaient pas la même ardeur et le même entrain qu'ils avaient habituellement dans leurs combats sur terre.

     XXV - Dès que César le vit, il fit un peu éloigner des vaisseaux de transport ses vaisseaux de guerre, dont l'aspect était nouveau pour les Barbares et la manoeuvre plus souple; il leur ordonna de faire force de rames et d'aller se placer sur le flanc droit de l'ennemi, d'où à force de frondes, d'arcs et de balistes, ils devaient le repousser et le refouler. Cette tactique fut d'un grand secours pour les nôtres.... Alors celui qui portait l'aigle de la dixième légion, après avoir invoqué les dieux : "Compagnons, dit-il, sautez à la mer si vous ne voulez pas livrer votre aigle à l'ennemi; moi, du moins, j'aurai fait mon devoir envers la République et le général". Alors, les nôtres, s'exhortant entre eux à ne point souffrir un tel déshonneur, sautèrent, tous comme un seul homme, hors du vaisseau; ceux des navires voisins, témoins de leur audace, les suivirent et marchèrent à l'ennemi.

 Nota : Le terme "aquila" (aigle) en latin est un terme générique pour désigner une enseigne romaine. Il y avait en effet cinq types différents d'enseignes : aigle, loup, sanglier, taureau, cheval. Le terme "aquila" englobait l'ensemble. La dixième légion citée ci-dessus avait pour emblème le "taureau".

     XXVI - On combattit de part et d'autre avec acharnement;... César fit emplir de soldats les chaloupes des vaisseaux longs et les bateaux de reconnaissance, et il les envoya en renfort à ceux qu'il avait vus en danger. Dès que les nôtres se furent reformés sur le rivage, et qu'ils se virent réunis, ils fondirent sur l'ennemi et ils le mirent en fuite.....

     XXXVI - Des députés vinrent trouver César de la part des ennemis pour lui demander la paix. César doubla le nombre des otages déjà exigés et ordonna de les lui amener sur le continent : l'équinoxe étant proche, il ne voulait pas exposer à une navigation d'hiver des vaisseaux peu solides. profitant d'un vent favorable, il leva l'ancre peu après minuit, et regagna le continent avec tous ses vaisseaux intacts.

     XXXVIII - César établit chez les Belges les quartiers d'hiver de toutes ses légions.

                                      LIVRE CINQUIEME :  La Bretagne, deuxième débarquement

      César, quittant ses quartiers d'hiver pour aller en Italie, ordonne aux lieutenants qu'il avait mis à la tête de ses légions d'avoir soin, au cours de l'hiver, de construire le plus de vaisseaux qu'il serait possible et de réparer les anciens. Il en détermine les dimensions et la forme. Pour qu'on puisse les charger et les mettre à sec rapidement, il les fait faire un peu plus bas que ceux dont nous avons coutume d'user sur notre mer; d'autant qu'il avait observé que, par suite du flux et du reflux, les vagues de l'Océan étaient moins fortes; pour les charges et le grand nombre de bêtes de somme qu'ils étaient destinés à transporter, il les commande un peu plus larges que les vaisseaux dont nous nous servons sur les autres mers. Il ordonne qu'ils soient tous à voiles et à rames, ce que leur peu de hauteur rend très facile. Il fait venir d'Espagne tout ce qui est utile à l'armement de ces navires (du cuir, du fer et des joncs pour les cordes)... L'activité régulière des soldats avait suffi pour construire environ six cents navires du modèle que nous avons décrit plus haut, et vingt-huit vaisseaux longs tout armés et prêts. Il donne l'ordre de se rassembler tous au port Itius (Boulogne), d'où il savait que le trajet en Bretagne est très commode ...Alors, se laissant aller au reflux, il fit force de rames pour prendre pied sur cette partie de l'île qu'il avait reconnu l'été précédent, très propice à un débarquement.

     IX - César mit ses troupes à terre et choisit un emplacement convenable pour son camp; instruit par des prisonniers du lieu où s'étaient arrêtés les forces de l'ennemi, il laissa près de la mer dix cohortes et trois cents cavaliers pour la garde des navires; puis, dès la troisième veille il marcha à l'ennemi. Il avait fait dans la nuit environ douze mille pas, lorsqu'il aperçut les forces de l'ennemi (sans doute à Conterbery)... 

      X - Le lendemain matin, il partagea les fantassins et les cavaliers en trois corps et les envoya à la poursuite de l'ennemi. Ils avaient fait une assez longue route, et les derniers fuyards étaient en vue, quand des cavaliers, envoyés par Quintus Atrius, vinrent annoncer à César que, la nuit précédente, il s'était élevé une très forte tempête qui avait brisé et jeté à la côte presque tous les vaisseaux, car les ancres ni les cordages n'avaient pu résister ...

     XI - A cette nouvelle, César ordonne qu'on rappelle ses légions et ses cavaliers, et qu'elles cessent leur poursuite; ...quarante navires environ étaient perdus; les autres pouvaient être réparés à force de travail. Il choisit des ouvriers dans les légions et en fait venir d'autres du continent. Il écrit à Labénius de construire, avec les légions dont il dispose, le plus de navires qu'il pourrait... Il consume dix jours environ à ces travaux, sans que le soldat prenne, même la nuit, le moindre repos. Quand les navires sont mis à sec, que le camp est remarquablement fortifié, il laisse pour garder les vaisseaux les mêmes troupes qu'auparavant et retourne à l'endroit d'où il était parti. A son arrivée, il trouve des troupes de Bretons déjà assez importantes qu'y s'y étaient rassemblées de toutes parts. Le commandement suprême et le soin de la guerre avaient été confiés, d'un consentement unanime, à Cassivellaune, dont le pays est séparé des états maritimes par un fleuve qu'on nomme la Tamise, à quatre-vingt mille pas de la mer environ.

    XII - IMPRESSIONS de BRETAGNE : L'intérieur de la Bretagne est peuplée d'habitants qui se présentent, d'après une tradition orale, comme des indigènes; la partie maritime, par des peuplades venues de Belgique pour piller et faire la guerre (elles ont presque toutes gardé le nom des états dont elles étaient originaires, lorsqu'elles vinrent dans le pays, les armes à la main, pour s'y fixer et cultiver le sol). L'île est immensément peuplée, les maisons y sont abondantes, presque semblables à celles des Gaulois, le bétail y est fort nombreux. Pour monnaie, on se sert de cuivre, de pièces d'or ou de lingots de fer d'un poids déterminé. Les régions du centre produisent de l'étain (Nota : erreur! en Cornouailles...), les régions côtières du fer, mais en petite quantité (Nota : autre erreur : la Bretagne dispose de fer en grande quantité); le cuivre qu'ils emploient leur vient du dehors. Il y a des arbres de toute espèce, comme en Gaule, à l'exception du hêtre et du sapin. Ils considèrent le lièvre, la poule et l'oie, comme une nourriture défendue; ils en élèvent cependant, par goût et par forme d'amusement. Le climat est plus tempéré que celui de la Gaule, et les froids y sont moins rigoureux.

     XIV - De tous ces Bretons, les plus civilisés sont ceux qui habitent le Cantium (Kent), région toute maritime et dont les moeurs ne diffèrent pas beaucoup de celles des Gaulois. La plupart de ceux qui occupent l'intérieur ne sèment pas de blé; ils vivent de lait et de viande, et sont vêtus de peaux. Tous les Bretons se teignent avec du pastel, ce qui leur donne une couleur azurée, et ajoute, dans les combats, à l'horreur de leur aspect. Ils portent leurs cheveux longs et se rasent toutes les parties du corps, à l'exception de la tête et de la lèvre supérieure. Ils se mettent à dix ou à douze pour avoir des femmes en commun, particulièrement les frères avec les frères et les pères avec les fils. Mais les enfants qui naissent de cette communauté sont censés appartenir à celui qui a introduit la mère, encore jeune fille, dans la maison.

    XVI -   (LA GUERILLA) ... on comprit que nos soldats, chargés d'armes pesantes, ne pouvant poursuivre l'ennemi, s'il se retirait, et n'osant s'éloigner de leurs enseignes, étaient peu préparés à un tel adversaire; que le combat offrait aussi de grands dangers pour nos cavaliers, parce que le plus souvent les Bretons feignaient de fuir, et, quand ils avaient un peu attirés les nôtres loin des légions, ils sautaient à bas de leurs chars et engageaient à pied un combat inégal. Ce système de combat de cavalerie offrait exactement le même danger pour le poursuivant et pour le poursuivi. Ajoutez à cela qu'ils ne combattaient jamais en masse, mais par troupes isolées, et à de grandes distances; et qu'ils avaient des postes de réserve échelonnés, permettant de se replier successivement de l'un à l'autre et de remplacer les hommes fatigués par des réserves fraîches.

     XXII - Cassivellaune envoie dans le Cantium, sur les bords de la mer, et que commandent quatre rois : Cingétorix, Carvilius, Taximagule et Ségovax, des messagers avec l'ordre d'assembler toutes leurs troupes et d'assaillir et attaquer à l'improviste le camp des vaisseaux. Quand ils y vinrent, les nôtres firent une sortie, en tuèrent un grand nombre, prirent même un chef noble, Lugotorix, et rentrèrent sans perte dans le camp. A la nouvelle de ce combat, Cassivellaune, découragé par tant de pertes, voyant la dévastation de son pays et accablé surtout par la défection des états, envoie des députés à César pour traiter de sa reddition. César, qui avait décidé de passer l'hiver sur le continent, à cause des mouvements soudains qui pouvaient se produire en Gaule, voyant que l'été approchait de sa fin et que l'ennemi pouvait facilement traîner l'affaire en longueur, exige des otages et fixe le tribut que la Bretagne paierait chaque année au peuple romain.
     XXIII - Après avoir reçu les otages, il ramène son armée au bord de la mer, et trouve les vaisseaux réparés. Il les fait mettre à l'eau, et comme il avait un grand nombre de prisonniers et que plusieurs vaisseaux avaient péri dans la tempête, il décide de ramener son armée en deux traversées (mi août et mi-septembre). Et la chance voulut que de tant de navires et sur tant de traversées, ni cette année, ni la précédente, aucun des vaisseaux qui portaient des soldats ne périt; mais de ceux qui lui étaient renvoyés à vide du continent, après avoir déposé à terre les soldats de la première traversée, ou des soixante navires que Labiénus avait fait construire après le départ de l'expédition, très peu arrivèrent à destination; presque tous furent rejetés à la côte. Après les avoir attendus en vain pendant un bon moment, César, craignant d'être empêché de naviguer par la saison, car on s'approchait de l'équinoxe, fut contraint d'entasser ses soldats plus à l'étroit, et profitant d'un grand calme qui suivit, il leva l'ancre au début de la seconde veille et atteignit la terre au point du jour, sans avoir perdu un seul vaisseau.

                                               LIVRE SIXIEME : ...Après la mort d'Indutiomare, les Trévires (peuple sur les deux rives de la Moselle) défèrent le pouvoir à ses proches. Ceux-ci ne cessent de solliciter les Germains de leur voisinage et de leur promettre des subsides; ne pouvant rien obtenir des plus proches, ils s'adressent à de plus éloignés. César, voyant que de toutes parts on préparait la guerre; que les Nerviens, les Atuatuques, les Ménapes, ainsi que tous les Germains cisrhénans étaient en armes; que les Sénones ne se rendaient pas à ses ordres et se concertaient avec les Carnutes (Centre géographique de la Gaule, secteur de Orléans (Génabum). C'est dans les forêts des Carnutes que se trouvait le siège principal du culte druidique); que les Trévires sollicitaient les Germains par de fréquentes ambassades, César pensa qu'il lui fallait précipiter la guerre.

     III - Aussi, sans attendre la fin de l'hiver, il réunit les quatre légions les plus proches (celles de César, Cicéron, Crassus et Fabius qui hivernaient chez les Morins) et se porte à l'improviste sur le pays des Nerviens; avant qu'ils pussent se rassembler ou fuir, il leur prit un grand nombre d'hommes et de bestiaux, abandonna ce butin aux soldats, dévasta leurs terres et les força à faire soumission et à lui donner des otages. Après cette expédition rapide, il ramena les légions dans leurs quartiers d'hiver. Dès le commencement du printemps, il convoque, selon l'usage qu'il avait institué, l'assemblée de la Gaule; tous y vinrent, à l'exception des Sénones (sud de la Champagne), des Carnutes et des Trévires; il regarda cette abstention comme le début de la guerre et de la révolte, et pour faire voir que tout le reste est secondaire, il transporte l'assemblée à Lutèce, ville des Parisiens. Ceux-ci confinaient avec les Sénones et avaient anciennement formés un seul état avec eux; mais ils paraissaient être étrangers au complot.

    IV - A la nouvelle de son approche, Accon, qui avait été l'instigateur du complot, ordonne à la multitude de se rassembler dans les places fortes; mais comme elle s'y employait, et avant que l'ordre ne pût être exécuté, on annonce l'arrivée des Romains; forcés de renoncer à leur projet, ils envoient des députés à César pour l'implorer; ils ont recours à la médiation des Eduens, qui depuis très longtemps protégeaient leur état. Les Carnutes lui envoient aussi chez les Sénones des députés et des otages, font implorer leur pardon par les Rèmes dont ils étaient les clients.

     XI MOEURS GAULOISES : ... sur les moeurs de la Gaule et de la Germanie et sur les différences qui séparent ces nations. En Gaule, non seulement dans chaque état, et dans chaque petit pays et fraction de pays, mais encore jusque dans chaque famille, il y a des partis : à la tête de ces partis sont les hommes qui passent pour avoir plus de crédit, et à qui il appartient de juger et de décider pour toutes les affaires et décisions. Cette institution, qui est très ancienne, semble pour but de fournir à tout homme du peuple une protection contre plus puissant que lui : car aucun chef ne laisse opprimer ou circonvenir les siens, et s'il lui arrive d'agir autrement, il perd tout crédit auprès des siens. Ce même système est appliqué dans l'ensemble de la Gaule tout entière : car tous les états y sont divisés en deux partis.

     XII - A l'arrivée de César en Gaule, l'un des partis avait pour chef les Eduens (entre Loire et Saône) l'autre, les Séquanais (entre Saône, Rhône, Jura, Rhin et Vosges). Ceux-ci qui étaient moins forts par eux-mêmes, car depuis longtemps l'influence principale appartenait aux Eduens, dont la clientèle était considérable, s'étaient adjoint Arioviste et ses Germains et se les étaient attachés à force de sacrifices et de promesses. Victorieux dans plusieurs batailles, où toute la noblesse des Eduens avait péri, ils avaient pris une telle prépondérance qu'une grande partie des Eduens passèrent de leur côté; les Séquanais s'attribuèrent la partie du territoire limitrophe qu'ils avaient conquise et obtinrent la suprématie dans toute la Gaule....

     Avec l'arrivée de César, la face des choses changea complètement : leurs otages furent rendus aux Eduens; et les Séquanais avaient perdu leur suprématie. Les Rèmes  (Belges du bord de l'Aisne, Reims) avaient pris leur place. La situation était alors la suivante : le premier rang, et de loin, aux Eduens; le second, aux Rèmes.

     XIII - Dans l'ensemble de la Gaule il y a deux classes d'hommes : pour le bas peuple, il n'y a que le rang d'esclave, n'osant rien par lui-même et n'étant consulté sur rien. La plupart, quand ils se voient accablés de dettes, écrasés d'impôts, en butte aux violences de gens plus puissants, se mettent au service des nobles, qui ont sur eux les mêmes droits que les maîtres sur les esclaves.
     Quant à ces deux classes dont nous parlions, l'une est celle des DRUIDES, l'autre des CHEVALIERS.

     Les premiers s'occupent des choses divines, président aux sacrifices publics et privés, règlent les pratiques religieuses. Un grand nombre d'adolescents viennent s'instruire auprès d'eux, et ils sont l'objet d'une grande vénération. Ce sont eux, en effet, qui décident de presque toutes les contestations publiques ou privées, et, s'il est commis quelque crime, et s'il y a eu meurtre, s'il élève un débat à propos d'héritage ou de limites, ce sont eux qui tranchent, qui fixent les dommages et les peines; si un particulier ou un état ne défère pas à leur décision, ils lui interdisent les sacrifices. Cette peine est chez eux la plus grave de toutes. Ceux contre qui est prononcée cette interdiction sont mis au nombre des impies et des criminels; on s'écarte d'eux, on fuit leur abord et leur entretien, craignant d'attraper à leur contact un mal funeste; ils ne sont pas admis à demander justice et n'ont part à aucun honneur. Tous ces druides sont commandés par un chef unique, qui exerce parmi eux l'autorité suprême. A sa mort, si l'un d'entre eux l'emporte par le mérite, il lui succède; si plusieurs ont des titres égaux, le suffrage des druides choisit entre eux; parfois même ils conquièrent le principal les armes à la main. A une époque déterminée de l'année, ils tiennent leurs assises dans un lieu consacré, au pays des Carnutes, qui passe pour être au centre de toute la Gaule. Là se rendent de toutes parts tous ceux qui ont des différends, et ils se soumettent à leurs jugements et à leurs décisions. Leur doctrine a pris naissance, croit-on, en Bretagne, et a été, de là, transportée en Gaule; et, aujourd'hui encore, ceux qui veulent en avoir une connaissance plus minutieuse, partent généralement là-bas pour s'y instruire.

     XIV - Les DRUIDES n'ont point coutume d'aller à la guerre ni de payer des impôts comme le reste des Gaulois; ils sont dispensé du service militaire et exempts de toute espèce de charge. Poussés par de si grands avantages, beaucoup viennent spontanément suivre leur enseignement, beaucoup leur sont envoyés par leurs parents ou leurs proches. Là ils apprennent par coeur, à ce qu'on dit, un grand nombre de vers : aussi certains demeurent-ils vingt ans à leur école. Ils estiment que la religion interdit de confier ces cours à l'écriture, alors que pour le reste en général, pour les comptes publics et privés, ils se servent de l'alphabet grec. Ils me paraissent avoir établi cet usage pour deux raisons, parce qu'ils ne veulent ni divulguer leur doctrine ni voir leurs élèves, se fiant sur l'écriture, négliger leur mémoire; car il arrive presque toujours que l'aide des textes a pour conséquence un moindre zèle pour apprendre par coeur et une diminution de la mémoire. Ce qu'ils cherchent surtout à persuader, c'est que les âmes ne meurent pas, mais passent après la mort d'un corps dans un autre; cette croyance leur semble particulièrement propre à exciter le courage, en supprimant la crainte de la mort. Ils discutent aussi abondamment sur les astres et leur mouvement, sur la grandeur du monde et de la terre, sur la nature des choses, sur la puissance et le pouvoir des dieux immortels, et ils transmettent ces spéculations à la jeunesse.

    XV - L'autre classe est celle des CHEVALIERS. Quand besoin est que quelque guerre survient (et avant l'arrivée de César, il ne se passait presque pas d'année sans qu'il y eût quelque guerre offensive ou défensive), ils prennent tous part à la guerre; et chacun d'eux, selon sa naissance ou l'ampleur de ses ressources, a autour de lui un plus ou moins grand nombre d'ambacts et de clients. C'est le seul signe de crédit et de puissance qu'ils connaissent.

     XVI- La Nation des GAULOIS est, dans son ensemble, très adonnée aux pratiques religieuses; et c'est pourquoi ceux qui sont atteints de maladies graves, ceux qui vivent dans les combats et leurs périls, immolent ou font voeu d'immoler des êtres humains en guise de victimes. Ils se servent pour ces sacrifices du ministère des druides; ils pensent, en effet, que c'est seulement en rachetant la vie d'un homme par la vie d'un autre homme que la puissance des dieux immortels peut être apaisée. Ils ont des sacrifices de ce genre qui sont d'institution publique. Certains ont des mannequins d'une taille énorme, dont ils remplissent d'hommes vivants la carapace tressée d'osier, l'on y met le feu, et les hommes périssent enveloppés par la flamme. Les supplices de ceux qui ont été arrêtés en flagrant délit de vol ou de brigandage ou pour quelque autre crime passent pour plaire davantage aux dieux immortels; mais lorsqu'on n'a pas assez de victimes de cette sorte, on en vient jusqu'à sacrifier même des innocents.

     XVII - Le dieu qu'ils honorent le plus est MERCURE. Ses statues sont les plus nombreuses. Ils le regardent comme l'inventeur de tous les arts, comme le guide des voyageurs sur les routes, comme le plus capable de faire gagner de l'argent et prospérer le commerce. Après lui, ils adorent Apollon, Mars, Jupiter et Minerve. Ils ont de ces divinités à peu près la même idée que les autres nations : Apollon chasse les maladies, Minerve enseigne les éléments des travaux et des métiers, Jupiter exerce son empire sur les hôtes des cieux, Mars gouverne les guerres. Quand ils ont résolu de livrer bataille, ils font voeu en général de lui donner ce qu'ils auront pris à la guerre; après la victoire, ils lui immolent le butin vivant et entassent le reste en un seul endroit...

     XVIII - Tous les Gaulois se prétendent issus de Dis Pater : c'est une tradition qu'ils disent tenir des druides. C'est pour cette raison qu'ils mesurent le temps par le nombre des nuits, et non pas celui des jours. Ils calculent les dates de naissance, les débuts de mois et d'années en commençant la journée par la nuit. Dans les autres usages de la vie, ils diffèrent surtout des autres peuples par une coutume particulière qui consiste à ne pas permettre à leurs enfants de les aborder en public, avant l'âge où ils sont capables du service militaire; et c'est une honte pour eux qu'un fils en bas âge prenne place dans un lieu public sous les yeux de son père.

     XIX - Les maris mettent en communauté, avec la somme d'argent qu'ils reçoivent en dot de leurs femmes, une part de leurs biens égale - estimation faite - à cette dot. On fait de ce capital un compte joint et l'on en réserve les intérêts; celui des deux époux qui survit à l'autre reçoit la part des deux avec les intérêts accumulés. Les maris ont droit de vie et de mort sur leurs femmes comme sur leurs enfants. Lorsqu'un père de famille d'illustre naissance vient à mourir, ses proches s'assemblent et, si cette mort fait naître quelque soupçon, les femmes sont mises à la question comme des esclaves; si le crime est prouvé, elles sont livrées au feu et aux plus cruels tourments et supplices. Les funérailles, eu égard à la civilisation des Gaulois, sont magnifiques et somptueuses; tout ce qu'on pense que le défunt a chéri pendant sa vie est porté au bûcher, même les animaux; il y a peu de temps encore, quand la cérémonie funèbre était complète, on brûlait avec lui les esclaves et les clients qui lui avaient été chers.

     XXI Les moeurs des GERMAINS : ... très différentes. En effet, ils n'ont ni druides qui président au culte des dieux ni aucun goût pour les sacrifices. Ils ne rangent au nombre des dieux que ceux qu'ils voient et dont ils ressentent manifestement les bienfaits, le Soleil, Vulcain, la Lune; ils n'ont même pas entendu parler des autres. Toute leur vie se passe en chasses et en exercices militaires; dès leur enfance, ils s'habituent à la fatigue et à la dure. Ceux qui ont gardé le plus longtemps leur virginité sont fort estimés de leur entourage; ils pensent qu'on devient ainsi plus grand, plus fort, et plus musclé. C'est une des hontes les plus grandes parmi eux que de connaître la femme avant l'âge de vingt ans : on ne fait d'ailleurs pas mystère de ces choses, car il y a des bains mixtes dans les rivières, et les vêtements en usage sont des peaux ou de courts rénons, qui laissent à nu une grande partie du corps.

     XXII - Ils n'ont point goût pour l'agriculture; leur alimentation consiste pour une grande part en lait, fromage et viande. Nul n'a chez eux de champs limités ni de domaine qui lui appartienne en propre; mais les magistrats et les chefs assignent pour chaque année, aux familles et aux groupes de parents qui vivent ensemble, des terres en telle quantité et en tel lieu qu'ils le jugent convenable; l'année suivante, ils les obligent de passer ailleurs. Ils allèguent de nombreuses raisons de cet usage : ils craignent qu'en prenant l'habitude de la vie sédentaire ils ne négligent la guerre pour l'agriculture; qu'ils ne songent à étendre leurs possessions et qu'on ne voie les plus forts dépouiller les plus faibles; qu'ils n'apportent trop de soins à bâtir des maisons pour se garantir du froid et de la chaleur; que ne s'éveille l'amour de l'argent, qui fait naître les factions et les discordes; ils veulent contenir le peuple par le sentiment de l'égalité, chacun se voyant l'égal, en fortune, des plus puissants.

     XXIV - Il fut un temps où les Gaulois surpassaient les Germains en bravoure, portaient la guerre chez eux, envoyaient des colonies au-delà du Rhin parce qu'ils étaient nombreux et manquaient de terres. C'est ainsi que les contrées les plus fertiles de la Germanie, aux environs de la forêt hercynienne furent occupées par les Volques Tectosages qui s'y fixèrent. Ce peuple s'y est maintenu jusqu'à ce jour, et il a la plus grande réputation de justice et de gloire guerrière.

     Aujourd'hui encore les Germains vivent dans la même pauvreté, la même indigence, la même endurance, ils ont le même genre de nourriture et de costume. Les Gaulois, au contraire, grâce au voisinage de la Province et aux importations du commerce maritime, ont appris à jouir d'une vie large et aisée; accoutumés peu à peu à se laisser battre, vaincus en de nombreux combats, eux-mêmes ne se comparent même plus aux Germains pour la valeur.

     XXV/XXVI - CESAR ET LA "LICORNE"!!!! La forêt hercynienne, s'étendant aux frontières des Hélvètes au long du Danube... Il n'est aucun Germain de cette contrée qui, après soixante jours de marche, puisse dire qu'il est arrivé au bout, ni savoir en quel lieu elle commence. On assure qu'elle renferme beaucoup d'espèces de bêtes sauvages qu'on ne voit pas ailleurs... D'abord un boeuf, ayant la forme d'un cerf, et portant au milieu du front, entre les oreilles, une CORNE UNIQUE, plus haute et plus droite que celles qui nous sont connues; à son sommet elle s'épanouit en empaumures et en rameaux. Mâle et femelle sont de même type, ont des cornes de même forme et de même grandeur.

     XXVII - Il y a aussi les animaux qu'on nomme ELANS. leur forme et la variété de leurs pelages ressemblent à celles des chèvres; ils les dépassent un peu par la taille, et ils ont des jambes sans articulations et sans noeuds; ils ne se couchent point pour dormir, et, s'ils tombent accidentellement, ils ne peuvent se redresser ni se soulever. Les arbres leur servent de lits : ils s'y appuient, et c'est ainsi, simplement un peu penchés, qu'ils goûtent le repos. Lorsqu'en suivant leurs traces les chasseurs ont reconnu leur retraite habituelle, ils déracinent ou scient tous les arbres du lieu, mais de manière qu'ils aient l'air de tenir encore debout. Les animaux, en venant s'y appuyer comme d'habitude, les font fléchir sous leurs poids et tombent avec eux.

     XXVIII - Une troisième espèce est celle des animaux qu'on nomme  URUS. Ils sont pour la taille un peu au-dessous des éléphants, avec l'aspect, la couleur et la forme du taureau. Leur force est grande et grande leur vitesse : ils n'épargnent ni l'homme ni la bête  qu'ils ont aperçus. On s'applique à les prendre dans des fosses et on les tue. Ce genre de chasse est pour les jeunes un exercice qui les endurcit à la fatigue. Ceux qui ont tué le plus de ces animaux en rapportent les cornes au public, pour prouver leur exploit, et reçoivent de grands éloges. On ne peut d'ailleurs ni habituer l'urus à l'homme ni l'apprivoiser, même en le prenant tout petit. Ses cornes diffèrent beaucoup par la grandeur, la forme, l'aspect de celles de nos boeufs. Elles sont soigneusement recherchées : on encercle les bords d'argent et l'on s'en sert comme de COUPES dans les très grands festins.

                                                      LIVRE SEPTIEME : VERCINGETORIX

     I - La Gaule une fois tranquille, César par pour l'Italie afin d'y tenir ses assises. Là il apprend le meurtre de Publius Clodius et, ayant eu connaissance du sénatus-consulte qui appelait aux armes toute la jeunesse d'Italie, il décide de faire une levée dans toute la Province. La nouvelle des événements se répand vite dans la Gaule transalpine. Les Gaulois y ajoutent d'eux-mêmes et font circuler le bruit, qui leur paraissait en rapport avec les circonstances, que César était retenu par les troubles de la Ville et empêché, en présence d'aussi graves dissensions, de se rendre à l'armée. Les chefs de la Gaule, s'étant fixé des réunions entre eux en des lieux écartés, au milieu des bois, se plaignent de la mort d'Accon (chef Sénone -vers Sens/Montargis - mis à mort par César); ils montrent que ce sort peut les atteindre eux-mêmes; ils déplorent le commun malheur de la Gaule; par toutes sortes de promesses et de récompenses ils demandent qu'on commence la guerre et qu'on rende au péril de sa vie la liberté à la Gaule. Selon eux, la première chose à faire est de fermer à César le retour vers son armée, avant qu'éclatent leurs complots clandestins. C'est chose facile, car les légions n'osent pas sortir de leurs quartiers d'hiver en l'absence de leur général...

     II/III - Après un vif débat sur ces questions, les Carnutes déclarent "qu'il n'est pas de danger qu'ils n'acceptent pour le salut commun et promettent de prendre les armes les premiers; .. ils demandent de ne point les abandonner après qu'ils auront commencé la guerre". Tous ceux qui étaient présents prêtent le serment... Les carnutes, sous la conduite de Gutruat et de Conconnétodumne, hommes dont on ne pouvait attendre que des folies, courent à un signal donné sur Génabum, massacrent les citoyens romains qui s'y étaient établis pour faire des affaires et mettent leurs biens au pillage. La nouvelle parvint vite à tous les états de la Gaule. En effet, quand il arrive un événement important ou remarquable, les Gaulois l'annoncent de champ en champ et de contrée en contrée par une clameur qu'on recueille et transmet de proche en proche. Ainsi ce qui s'était passé à Génabum au lever du soleil fut su avant la fin de la première veille dans le pays des Arvernes qui était éloigné de cent soixante mille pas environ.

     IV - Là, usant du même procédé, Vercingétorix, fils de Celtille, Arverne, jeune homme dont la puissance était fort grande, et dont le père, qui avait exercé le principat de toute la Gaule, avait été mis à mort par ses compatriotes parce qu'il convoitait la royauté, convoque ses clients et les enflamme facilement. Sitôt que son projet est connu, on court aux armes; Gobanition, son oncle, et les autres chefs qui n'étaient pas d'avis de tenter la fortune, le chassent de la place forte de Gergovie; cependant il ne se rebute pas et il enrôle dans la campagne des gens dénués de tout et perdus de crimes. Après avoir réuni cette bande, il rallie à sa cause tous ceux de ses compatriotes qu'il rencontre, les exhorte à prendre les armes pour la liberté commune, et, ayant rassemblé de grandes forces, il chassa de  l'état ses adversaires qui peu de temps auparavant l'avaient chassé lui-même. Il est proclamé roi par ses partisans, envoie des ambassades de tous côtés, supplie qu'on reste dans la foi jurée. Rapidement il s'attache les Sénones, les Parisiens, les Pictons, les Cadurques, les Turons, les Aulerques, les Lémovices, les Andes et tous les autres peuples qui touchent à l'Océan; d'un consentement unanime, le commandement suprême lui est déféré. Revêtu de ce pouvoir, il exige de tous ces états des otages, ordonne qu'un nombre déterminé de soldats lui soit rapidement amené, fixe la quantité d'armes que chaque état doit fabriquer dans un délai marqué, donne un soin particulier à la cavalerie, joint à une extrême diligence une extrême sévérité dans le commandement, contraint par la rigueur du supplice des hésitants. C'est ainsi qu'une faute grave est punie par le feu et toutes sortes de supplices; que pour une faute légère, il renvoie le coupable chez lui après lui avoir fait couper les oreilles ou crever un oeil, afin qu'il serve d'exemple et que la grandeur du châtiment frappe les autres de terreur.

     VIII - César part chez les Helviens. Quoique les montagnes des Cévennes, qui forment une barrière entre les Arvernes et les Helviens, fussent en cette saison, qui était la plus rude de l'année, couvertes d'une neige épaisse qui empêchait de passer, néanmoins les soldats écartent la neige sur une profondeur de six pieds et, après s'être frayé ainsi des chemins à force de peine, ils débouchent dans le pays des Arvernes. Leur arrivée inattendue les frappe de stupeur, car ils se croyaient défendus par les Cévennes comme par un mur, et jamais en cette saison même un voyageur isolé n'avait pu passer par les sentiers; César ordonne alors à ses cavaliers de s'étendre le plus loin possible, et de jeter chez l'ennemi le plus de frayeur qu'ils pourraient. Rapidement, par la rumeur et par des courriers, Vercingétorix est informé de ces événements; tous les Arvernes, au comble de la frayeur, l'entourent, le conjurent de songer à leurs biens, et de ne pas les laisser piller par l'ennemi, d'autant qu'il voit bien que tout le poids de la guerre était rejeté sur eux...

     XXI - Toute la foule pousse une clameur et, selon sa coutume (tout comme les Germains), fait cliqueter ses armes : c'est sa manière de faire quand elle approuve un discours : "Vercingétorix, dit-elle, est un grand chef..."

    XXII - A la singulière valeur de nos soldats les Gaulois opposaient toutes sortes d'inventions : car c'est une race d'une extrême ingéniosité, et qui a les plus grandes aptitudes pour imiter et accomplir tout ce qu'elle voit faire. C'est ainsi qu'à l'aide de lacets ils détournaient nos faux, et, lorsqu'ils les avaient accrochées, ils les tiraient en dedans de leurs murs avec des machines; ils ruinaient notre terrasse par des mines souterraines; d'autant plus savants dans cet art qu'il y a chez eux de grandes mines de fer et que toutes les sortes de galeries souterraines leur sont connues et familières. Ils avaient de tous côtés garni tout leur rempart de tours reliées par un plancher et recouvertes de peaux. Nuit et jour ils faisaient de fréquentes sorties, ou mettaient le feu à la terrasse; ou tombaient sur nos soldats en train de travailler; et à mesure que l'avance quotidienne de nos travaux augmentaient la hauteur de nos tours, ils élevaient les leurs à proportion, en reliant entre eux leurs poteaux; ils gênaient l'achèvement de nos mines, en lançant dans leur partie découvertes des pieux pointus et durcis au feu, de la poix bouillante, des pierres d'un poids considérable, et nous empêchaient ainsi d'approcher jusqu'aux murs.

     XXV - FAITS HEROIQUES! Le reste de la nuit s'était écoulé, et l'on combattait encore sur tous les points : l'espérance de la victoire se ranimait sans cesse chez les ennemis, d'autant qu'ils voyaient les mantelets de nos tours détruits par le feu, et qu'ils remarquaient la difficulté qu'éprouvaient les nôtres pour venir, à découvert, au secours de leurs compagnons, tandis qu'eux-mêmes remplaçaient sans cesse leurs troupes fatiguées par des troupes fraîches, et pensaient que tout le salut de la Gaule dépendait de ce seul instant. Il se passa alors sous nos yeux un fait qui nous a paru digne de mémoire et que nous n'avons pas cru devoir omettre. Il y avait, devant la porte de la ville, un Gaulois qui jetait dans le feu, en direction de la tour, des boules de suif et de poix qu'on lui passait de main en main : un trait de scorpion (ou baliste, système avec ressort de torsion qui donne une grande vitesse d'éjection des flèches; arme précise et puissante, très redoutée pouvant atteindre 300 mètres) l'atteignit mortellement au flanc droit et il s'affaissa sur lui-même. Un de ses voisins, enjambant son cadavre, le remplaça dans sa besogne; il périt de même frappé à son tour par le scorpion. Un troisième lui succéda, et au troisième, un quatrième; et la porte ne fut évacuée par ses défenseurs qu'après que le feu de la terrasse fut éteint et que la défaite des ennemis repoussés de toutes parts eut mis fin au combat.

   

     XXVII - AVARICUM (Bourges) Capitale des Bituriges , l'une des trois ou quatre plus belles et plus riches cités de la Gaule, le MASSACRE : Au vingt-septième jour du siège, comme César faisait avancer une tour et redresser les ouvrages qu'il avait entrepris, il survint une pluie abondante, et il lui parut que cette circonstance n'était pas défavorable à l'attaque, car il voyait que les gardes étaient négligemment réparties sur le rempart : il ordonne aux siens de ralentir leur travail... Il réunit secrètement les légions, en tenue de combat, en deçà des baraques, et les exhorta à cueillir, enfin, après tant de fatigues, le fruit de la victoire... Ils s'élancèrent soudain de toutes parts et rapidement eurent gravi le rempart.

     XXVIII - Les ennemis, surpris, épouvantés, chassés de leur rempart et de leurs tours, se formèrent en coin sur le forum et dans les lieux les plus ouverts, avec l'intention de quelque côté que vint l'attaque, de livrer une bataille rangée. Mais quand ils virent que nos soldats, au lieu de descendre lutter de plain-pied, se répandaient de tous côtés le long des remparts, la crainte de se voir ôter toute espérance de fuir leur fit jeter les armes et gagner tout d'une traite l'extrémité de la place; là une partie d'entre eux se pressant devant l'issue étroite des portes, fut massacrée par nos soldats; l'autre, qui était déjà sortie par les portes, exterminée par nos cavaliers. Personne ne songea au butin : excités par le souvenir du massacre de Génabum et par les fatigues du siège, ils n'épargnèrent ni les vieillards ni les femmes ni les enfants. Bref, sur un total de quarante mille hommes environ, huit cents à peine, qui s'enfuirent de la place aux premiers cris, arrivèrent sains et saufs près de Vercingétorix...

      XXIX - Le lendemain, ayant convoqué le conseil, il les exhorta "à ne pas se laisser abattre ni bouleverser par un revers : ce n'était point par leur valeur et en bataille rangée que les Romains les avaient vaincus, mais grâce à une pratique et un art des sièges... Les états gaulois jusqu'alors séparés des autres, allaient, par ses soins, entrer dans son alliance, et il ferait de toute la Gaule un seul et même faisceau de volontés, auquel le monde ne saurait résister....

     XXXI - Vercingétorix ne s'efforçait pas moins de rallier, comme il l'avait promis, les autres états et cherchait à gagner leurs chefs par des dons (il avait fait frapper des statères d'or, portant : à l'avers, sa figure idéalisée et, en exergue, VERCINGETORIX; au revers, un cheval au galop et une amphore).

     XXXIV - (César) partagea son armée en deux : donna quatre légions à Labénius pour marcher contre les Sénones et les Parisiens, et mena lui-même les six autres chez les Arvernes, vers GERGOVIE, le long de la rivière de l'Allier. Il donna une partie de la cavalerie à Labénius et garda l'autre. A cette nouvelle, Vercingétorix, après avoir coupé tous les ponts de l'Allier, se mit à remonter la rivière en suivant l'autre rive.

     XXXV - (César) établit son camp dans un lieu couvert de bois en face d'un des ponts que Vercingétorix avait fait détruire; le lendemain, il y resta caché avec deux légions et fit partir comme à l'habitude le reste de ses troupes avec tous les bagages, après avoir fractionné certaines cohortes, afin que le nombre de légions parût demeurer le même. Il leur ordonna de se porter aussi loin qu'elles pourraient, et, quand il pensa que le moment était venu où elles devaient être arrivées à leur campement, il se mit à rétablir le pont sur les anciens pilotis, dont la partie inférieure restait entière (celui de Moulins sans doute). L'ouvrage ayant été promptement terminé, il fit passer les légions, choisit un emplacement favorable pour son camp et rappela le reste des troupes.

                                                     GERGOVIE, près de l'Allier

     XXXVI - César, une fois l'Allier franchi, parvint à Gergovie en cinq jours; le même jour, après une légère escarmouche de cavalerie, il reconnut la place et, la voyant située sur une très haute montagne, dont tous les accès étaient difficiles, il désespéra de l'enlever de force; quant au siège, il résolut de n'y point songer avant d'avoir pourvu au ravitaillement en blé. De son côté, Vercingétorix avait assis son camp près de la ville, sur la hauteur, et il avait rangé autour de lui les forces de chaque Etat, en ne les séparant que par un faible intervalle; tous les sommets de cette chaîne que la vue découvrait étaient occupés par ses troupes, et présentaient un aspect terrible (Risolles 723 m., le puy de Jussat 661 m., la Roche-Blanche 561 m.).

                                                                                      

     XLVI/XLVII - Le mur de la place forte, en ligne droite et sans détour, était de douze cents pas, de l'endroit où, dans la plaine, commençait la montée. Mais tous les détours qu'on avait faits pour adoucir l'ascension augmentaient la longueur du chemin. A mi-colline environ et dans toute sa longueur, autant que le permettait la nature du sol, les Gaulois avaient construit un mur d'énormes pierres, haut de six pieds, pour retarder l'assaut des nôtres; et, laissant vide toute la partie basse, ils avaient rempli de campements très serrés la partie supérieure de la colline, jusqu'au mur de la place. Nos soldats, au signal donné, parviennent vite à la fortification, la franchissent et se rendent maîtres de trois camps ... César, ayant atteint le but qu'il s'était proposé, ordonna de sonner la retraite, et après avoir harangué la dixième légion, avec laquelle il était (Equestris), il lui fit faire halte. Les soldats des autres légions n'entendirent pas le signal de la trompette; séparés qu'ils étaient par une vallée assez grande; pourtant, les tribuns militaires et les lieutenants, suivant les instructions de César, s'efforçaient de les retenir. Mais, exaltés par l'espoir d'une prompte victoire, par la fuite de l'ennemi, par leurs succès précédents, ils pensaient qu'il n'y avait rien de si ardu que leur valeur ne pût atteindre, et ils ne cessèrent leur poursuite qu'à l'approche du rempart et des portes de la ville...

     XLVIII - Cependant ceux des Gaulois qui s'étaient rassemblés de l'autre côté de la place forte pour y faire des travaux de défense, après avoir d'abord entendu la clameur, puis reçu à plusieurs reprises la nouvelle que la ville était au pouvoir des Romains, envoyèrent des cavaliers en avant et s'y portèrent eux-mêmes au pas de course. A mesure qu'ils arrivaient, ils s'arrêtaient au pied du mur et augmentaient le nombre des combattants... Les Romains soutenaient une lutte qui n'était égale ni par la position ni par le nombre; en outre, épuisés par leur course et la durée du combat, ils ne pouvaient pas tenir tête facilement à des troupes fraîches et intactes...

     LIII/LXIII - Ayant terminé son discours en relevant le courage de ses soldats, en leur disant "de ne pas se décourager pour cela et de ne pas imputer à la valeur de l'ennemi un échec causé par un désavantage de la position", il maintint son projet de départ... il leva le camp pour aller chez les Eduens...A la nouvelle de la défection des Eduens, la guerre s'étend... Maîtres des otages que César avait laissés chez eux, ils effraient par leur supplice les hésitants.. On convoque une ASSEMBLEE de toute la GAULE à Bibracte (Capitale des Eduens, dans le Morvan). Tous, sans exception, confirment le choix de Vercingétorix comme général en chef. Les Rèmes, les Lingons, les Trévires ne prirent point part à cette assemblée; les premiers parce qu'ils restaient fidèles aux Romains, les Trévires, parce qu'ils étaient trop loin, et d'ailleurs pressés par les Germains...

     LXIV/LXV - Vercingétorix exige des otages des autres états. Il donne l'ordre à tous les cavaliers, au nombre de quinze mille, de se réunir rapidement (à Bibracte). Il déclare qu'il se contentera de l'infanterie qu'il avait jusque là (80 000 hommes)... César, voyant l'ennemi supérieur en cavalerie, tous les chemins fermés, et par suite nul moyen de tirer des secours de la Province (Gaule du sud-est, Provence) et de l'Italie, envoie au-delà du Rhin en Germanie vers les Etats qu'il avait soumis les années précédentes (dont les Ubiens) et en obtient des cavaliers et des soldats d'infanterie légère habitués à combattre parmi les cavaliers.

     LXVI/LXVII/LXVIII - Les forces ennemies qui se trouvaient chez les Arvernes et les cavaliers, qui avaient été commandés à toute la Gaule, se réunissent. En ayant formé un corps nombreux, Vercingétorix, - tandis que César faisait route vers le pays des Séquanais en passant par les confins extrêmes des Lingons (vers Langres, en Haute-Marne), pour porter à la Province un plus facile secours, - vint asseoir trois camps à dix mille pas environ des Romains (sur les collines d'Hauteville, d'Ahuy et de Vantoux)... Le lendemain la cavalerie est partagée en trois corps : deux de ces corps se montrent sur nos deux flancs; le troisième fait front à la colonne pour lui barrer la route. A cette nouvelle, César forme également trois divisions de sa cavalerie et la fait aller à l'ennemi. On se bat sur tous les points à la fois. Partout où les nôtres lui paraissaient fléchir ou être trop vivement pressés, César faisait porter de ce côté les enseignes et marcher les cohortes; cette intervention retardait la poursuite des ennemis et ranimait les nôtres par l'espoir d'un secours. Enfin les Germains, à l'aile droite, avisant une hauteur culminante, chassent les ennemis, les poursuivent jusqu'à la rivière, où Vercingétorix s'était placé avec ses forces d'infanterie, et en tuent un grand nombre. Ce que voyant, les autres, qui craignent d'être enveloppés, prennent la fuite. Trois Eduens de la plus noble naissance sont faits prisonniers... Voyant toute sa cavalerie en déroute, Vercingétorix, qui avait rangé ses troupes en avant de son camp, les fit battre en retraite, et prit aussitôt le chemin d'ALESIA, place des Mandubiens (petit peuple du Pays de l'Auxois, Côte d'Or). César fit conduire ses bagages sur la colline la plus proche, sous la garde de deux légions, poursuivit l'ennemi aussi longtemps que la durée du jour le permit, et lui tua environ trois mille hommes de l'arrière-garde; le lendemain il campa devant Alésia. S'étant rendu compte de la situation de la ville, et voyant l'ennemi terrifié parce que s cavalerie, qui faisait la principale force de son armée, avait été battue, il exhorta ses soldats au travail et se mit à investir Alésia.

                                                                ALESIA (52 av J.C.)

     Nota : des fouilles furent entreprises sur l'ordre de Napoléon III. Alésia était située sur une colline de 418 mètres, très abrupte ou escarpée, sur ce mont Auxois, près d'Alise, aujourd'hui Alise-Sainte-Reine (Côtes-d'Or)

                                                               

 Ex Oppidum gaulois dAlésia

     LXIX - La place elle-même était au sommet d'une colline, dans une position très escarpée, si bien qu'elle semblait ne pouvoir être prise que par un siège en règle. Au pied de la colline, de deux côtés, coulaient deux rivières (L'Ose et l'Oserain). En avant de la place s'étendait une plaine d'environ trois mille pas de longueur; sur tous les autres points, la place était entourée par des collines, peu distantes entre elles et d'une égale hauteur. Au pied du mur, toute la partie de la colline qui regardait l'orient était couverte de troupes gauloises, et en avant elles avaient ouvert un fossé et élevé une muraille sèche de six pieds de hauteur. Les fortifications qu'entreprenaient les Romains s'étendaient sur un circuit de onze mille pas. Les camps avaient été placés sur des positions avantageuses, et on y avait construit vingt-trois portes fortifiées.

Boulets romainsCirconvallationMuraille romaine à Alésia

     LXX - Les travaux étaient commencés quand un combat de cavalerie est livré dans la plaine. L'acharnement est extrême de part et d'autre. César envoie les Germains secourir les nôtres qui fléchissent, et range ses légions en bataille devant le camp, pour réprimer toute tentative soudaine de l'infanterie ennemie. Le renfort des légions encourage les nôtres; les ennemis prennent la fuite, s'embarrassent eux-mêmes par leur nombre, et piétinent aux portes trop étroites. Les Germains les poursuivent alors avec vigueur jusqu'à leurs fortifications; un grand massacre a lieu. Certains, abandonnant leurs chevaux, essaient de traverser le fossé et de franchir la muraille.

     LXXI - Vercingétorix se décide à renvoyer toute sa cavalerie pendant la nuit, avant que les Romains achèvent leurs fortifications. Au départ de ses cavaliers, il leur donne mission d'aller chacun dans son pays et d'y réunir pour la guerre tous ceux qui sont en âge de porter les armes; il leur montre qu'en cas de négligence quatre-vingt mille hommes d'élite périront avec lui; d'après ses calculs, il a du blé tout juste pour trente jours, mais il peut, en le ménageant, tenir encore un peu plus longtemps...il distribue entre chaque homme le bétail dont les Mandubiens avaient amené une grande quantité; il décide de mesurer le blé parcimonieusement et de ne le donner que peu à peu...

     LXXII - Instruit de ces dispositions par des transfuges et des prisonniers, César entrepris les fortifications que voici : il ouvrit un fossé de vingt pieds de large, en ayant soin que la largeur du fond fût égale à la distance de ses bords; il laissa entre ce fossé et toutes les autres fortifications une distance de quatre cents pieds; il procédait ainsi afin que les ennemis ne pussent point à l'improviste attaquer pendant la nuit nos ouvrages ni lancer pendant le jour une grêle de traits sur nos troupes qui avaient à poursuivre leur travail. Dans l'intervalle ainsi ménagé, il ouvrit deux fossés de quinze pieds de large et chacun de même profondeur; celui qui était intérieur, creusé dans les parties basses de la plaine, fut rempli d'eau dérivée de la rivière; derrière ces fossés, il éleva un terrassement et une palissade de douze pieds de haut. Il y ajouta un parapet et des créneaux; et, à la jonction du terrassement et de la paroi de protection, une palissade d'énormes pièces de bois fourchues, pour retarder l'escalade de l'ennemi. Il flanqua tout l'ouvrage de tours, placées à quatre-vingts pieds de distance l'une de l'autre... 

     LXXIII - On coupa des troncs d'arbres ou de très fortes branches, on les dépouilla de leur écorce et on les aiguisa par le sommet. Puis on ouvrait des fossés continus de cinq pieds de profondeur. On y enfonçait ces pieux, on les attachait par en-bas, de manière qu'ils ne pussent pas être arrachés, et on ne laissa dépasser que leurs rameaux. Il y en avait cinq rangs, liés ensemble et entrelacés : ceux qui s'y engageaient s'empalaient dans ces palissades pointues. On les appelait "cippes". Au-devant, on creusait en rangs obliques et formant quinconce, des puits de trois pieds de profondeur, qui se rétrécissaient peu à peu jusqu'au bas. On y enfonçait des pieux lisses, de la grosseur de la cuisse, taillés en pointe à leur extrémité et durcis au feu, qui ne dépassaient du sol que de quatre doigts; en même temps, pour les affermir solidement, on comblait le fonds des puits d'une terre que l'on foulait sur une hauteur d'un pied. Le reste était recouvert de ronces et de broussailles, afin de cacher le piège. Il y avait huit rangs de cette espèce, à trois pieds de distance l'un de l'autre : on les appelait "lis", à cause de leur ressemblance avec cette fleur. En avant de ces puits étaient entièrement enfoncés en terre des pieux d'un pied de long, armés de crochets de fer; on en semait partout, et à de faibles intervalles; on leur donnait le nom d'"aiguillons".

alesia1

     LXXIV - Ces travaux achevés, César, en suivant, autant que le terrain le lui permit, la ligne la plus favorable, fit un circuit de quatorze mille pas (21 km), des fortifications du même genre, mais en sens opposé, contre l'ennemi venant du dehors, afin que, s'il avait à s'éloigner, des forces très supérieures ne pussent investir les postes de défense ou les contraindre au risque de sortir hors du camp; il donna l'ordre à tous ses soldats de se procurer du fourrage et du blé pour trente jours.

Vercingétorix se rend à César, tableau de Lionel Royer,1889

                                                                    Les Etats GAULOIS à Alésia

     LXXV - Pendant que ces choses se passaient devant Alésia, les Gaulois, ayant tenu une assemblée de chefs, décident qu'il faut, non pas, comme le voulait Vercingétorix, appeler sous les armes tous ceux qui étaient en état de les porter, mais exiger de chaque état un nombre d'hommes déterminé; cela, parce qu'ils craignaient, dans la confusion d'une si grande multitude, de ne pouvoir ni la gouverner, ni se reconnaître, ni la ravitailler en blé.

     On demande aux Eduens et à leurs clients, Ségusiaves (Lyonnais), Ambivarètes (Allier), Aulerques (Eure/Mayenne/Sarthe), Brannovices, Brannoviens (Allier), trente-cinq mille hommes; un chiffre égal aux Arvernes, auxquels on joint les Eleutètes, les Cadurques (Quercy), les Gabales (Lozère), les Vellaviens, qui sont depuis longtemps sous leur domination; aux Séquanais, aux Sénones, aux Bituriges (Berry), aux Santones (Aunis/Saintonge), aux Rutènes(Rouergue), aux Carnutes (Orléanais), douze mille hommes par état; aux Bellovaques (Beauvais), dix; huit aux Pictons (Poitou), aux Turons (Touraine), aux Parisiens, aux Helbètes ; aux Suessions (Belges Soissonnais), aux Ambiens (Belges de Somme), aux Médiomatrices (Belges de Moselle, Metz), aux Pétrocoriens (Périgord, Dordogne), aux Nerviens (Belges Escaut/Sambre), aux Morins (Belgique maritime), aux Nitriobriges (Lot), cinq mille; aux Aulerques Cénomans (Sarthe), autant; aux Atrébates (Belges d'Artois), quatre mille; aux Véliocasses (Belges de Seine-Maritime), aux (Lémovices, erreur!) Lexoviens  (Armoricains Paimboeuf/Clisson), aux Aulerques Eburovices (Eure), trois mille; aux Rauraques (Alsace/Bâle) et aux Boïens (Celtes amenés de Germanie en Gaule par les Hélvètes), deux mille;

                   à l'ensemble des états qui bordent l'Océan et qui se donnent le nom d'ARMORICAINS:

   Coriosolites (Costormoricains), Redons (Bretilliens), Ambibariens (sud Manche), Calètes (Pays de Caux), Osismes (Finistériens), Lexoviens (Lisieux), Unelles ou Uxelles (Manche), vingt mille.

      Nota : on ne cite pas les "Namnètes" de Nantes...

                         Les Bellovaques (Somme, Oise, Seine) ne fournirent pas leur contingent, parce qu'ils prétendaient faire la guerre aux Romains en leur nom et à leur guise, et n'obéir aux ordres de personne; cependant, à la prière de Commius, ils envoyèrent deux mille hommes.

     LXXVI - ...Tous partent pour Alésia joyeux et pleins de confiance : aucun d'eux ne croyait qu'il fût possible de soutenir seulement l'aspect d'une si grande multitude, surtout dans un combat sur deux fronts, où les assiégés feraient une sortie, tandis qu'on verrait arrivant du dehors de si grandes forces de cavalerie et d'infanterie.

     LXXVII - Mais ceux qui étaient assiégés dans Alésia, une fois consommé tout leur blé, ignorant ce qui se passait chez les Eduens, avaient convoqué un conseil et délibéraient sur l'issue de leur sort. Les uns parlaient de se rendre, les autres de faire une sortie, tandis qu'ils en avaient encore la force. Le discours de CRITOGNAT, un personnage, sorti d'une grande famille Arverne et doué d'un  grand prestige : "... les Romains, que demandent-ils ou que veulent-ils? sinon, poussés par l'envie, de s'installer dans les champs et les états de ceux dont ils savent la réputation glorieuse et la puissance guerrière, et de les enchaîner par un joug éternel. Ils n'ont jamais fait la guerre autrement. Si vous ignorez ce qui se passe dans les nations lointaines, regardez la Gaule voisine, qui, réduite en Province, ayant perdu ses lois et ses institutions, soumises aux haches, est opprimée par une perpétuelle servitude."

     LXXIX/LXXX - Commius et les autres chefs à qui on avait confié le commandement suprême arrivent devant Alésia avec toutes leurs troupes et, après avoir occupé une colline extérieure, s'établissent à mille pas au plus de nos lignes... César dispose toute son armée sur les parties de ses retranchements; puis il fait sortir du camp sa cavalerie et ordonne d'engager le combat. Les Gaulois avaient mêlé à leurs cavaliers de petits paquets d'archers et de fantassins armés à la légère, pour secourir les leurs s'ils pliaient et arrêter le choc de nos cavaliers. Plusieurs des nôtres, blessés par eux à l'improviste, se retiraient du combat. Forts de la supériorité de leurs troupes et voyant les nôtres accablés par le nombre, les Gaulois, de toutes parts, tant ceux qui étaient enfermés dans nos lignes que ceux qui étaient venus à leur secours, encourageaient leurs combattants par des clameurs et des hurlements... Le déshonneur incitait les combattants à la bravoure. 

      On avait combattu depuis midi presque jusqu'au coucher du soleil, sans que la victoire fut décidée, quand les Germains, massés sur un seul point en escadrons serrés, chargèrent l'ennemi et le refoulèrent; dans la déroute, les archers furent enveloppés et massacrés. Alors ceux qui étaient sortis d'Alésia, accablés et désespérant presque de la victoire, rentrèrent dans la place.

     LXXXI - NOUVELLE ATTAQUE : Au bout d'un jour seulement, les Gaulois, qui avaient employé ce temps à faire un grand nombre de claies, d'échelles et de harpons, sortent au milieu de la nuit, et s'approchent de nos fortifications de la plaine. Soudain poussant une clameur, pour avertir les assiégés de leur approche, ils se préparent à jeter leurs claies, à bousculer les nôtres de leur retranchement  à coups de fronde, de flèches et de pieux et à tout disposer pour un assaut en règle. En même temps, entendant la clameur, Vercingétorix donne le signal aux siens avec la trompette et les conduit hors de la place. Les nôtres prennent sur les lignes le poste qui avait été assigné à chacun les jours précédents: avec les frondes, les casse-tête et les épieux qu'ils avaient disposés sur le retranchement, ils effraient les Gaulois et les repoussent. Les ténèbres empêchant de voir devant soi, il y a de part et d'autres beaucoup de blessés; les machines lancent une foule de traits.

     LXXXII - Tant que les Gaulois étaient assez loin du retranchement, la multitude de leurs traits leur donnait l'avantage; mais lorsqu'ils se furent approchés, ils s'enfonçaient dans les chausse-trappes, ou s'empalaient en tombant dans les puits, ou tombaient percés par les javelots de siège qu'on leur lançait du haut des retranchements ou des tours. Après avoir été durement éprouvés sur tous les points, sans avoir pu rompre nos lignes, voyant le jour approcher, ils craignirent d'être pris en flanc si l'on faisait une sortie de camp qui dominait la plaine, et ils se replièrent.

     Quant aux assiégés, occupés à faire avancer les engins que Vercingétorix avait préparé pour la sortie, ils comblent les premiers fossés; ce travail les ayant retenus trop longtemps, ils apprirent la retraite des leurs avant d'avoir pu s'approcher du retranchement. Ayant ainsi échoué dans leur entreprise, ils rentrèrent dans la place.

     LXXXIII - Repoussés deux fois avec une grande perte, les Gaulois délibèrent sur ce qu'ils doivent faire : ils consultent des gens qui connaissent le pays et apprennent ainsi la situation des camps supérieurs et leur genre de défense. Au nord était la colline de Réa que les nôtres, avec deux légions, n'avaient pu comprendre dans leurs lignes à cause de son étendue, ce qui les avait obligés d'établir le camp sur un terrain presque défavorable et légèrement en pente. Après avoir fait reconnaître les lieux par leurs éclaireurs, les chefs ennemis choisirent soixante mille hommes sur l'effectif total des états qui avaient la plus haute réputation de vertu militaire; ils mettent à la tête de ces troupes l'Arverne Vercassivellaune, l'un des quatre chefs, parent de Vercingétorix. Quand il vit que midi approchait, il se dirigea vers le camp en question; en même temps la cavalerie s'approchait des fortifications de la plaine et le reste des troupes se déployait en avant du camp.

     LXXXIV/LXXXV - Vercingétorix, apercevant les siens du haut de la citadelle d'Alésia, sort de la place; il fait porter en avant du camp les fascines, les perches, les toits de protection, les faux et tout ce qu'il avait préparé pour la sortie. Un vif combat s'engage en même temps de toutes parts et on essaie de forcer tous les ouvrages. L'étendue de nos lignes retient partout les troupes romaines et les empêche de faire face aux attaques simultanées. César, qui a choisi un poste d'observation favorable (sans doute sur la montagne de Flavigny), suit ce qui se passe de chaque endroit, envoie des secours aux troupes qui fléchissent. Des deux côtés on se rend compte que l'instant de l'effort suprême est arrivé : les Gaulois se voient perdus, s'ils ne percent pas nos lignes; les Romains attendent d'un succès décisif la fin de toutes leurs misères. L'effort porte surtout sur les lignes supérieures du Mont Réa, où nous avons dit qu'on avait envoyé Vercassivellaune. L'inclinaison défavorable des terrains à une grande importance. Les uns nous lancent des traits, les autres s'approchent en faisant la tortue, des troupes fraîches relèvent sans cesse les soldats fatigués. La terre que tous les Gaulois jettent dans nos retranchements leur permet de les franchir et recouvre les pièges que les Romains avaient dissimulé dans le sol; déjà les nôtres n'ont plus d'armes ni de forces.

     LXXXVI - Quand il l'apprend, César envoie Labénius avec six cohortes au secours des troupes en danger; il lui donne l'ordre, s'il ne peut tenir, de ramener ses cohortes et de faire une sortie, mais seulement à la dernière extrémité. Il va lui-même encourager les autres; il les exhorte à ne pas succomber à la fatigue; il leur montre que le fruit de tous les combats précédents dépend de ce jour et de cette heure.

     Les assiégés, désespérant de forcer les retranchements de la plaine, à cause de leur étendue, tentent d'escalader les hauteurs de la montagne de Flavigny; ils y portent tout ce qu'ils avaient préparé; ils chassent , par une grêle de traits, ceux qui combattaient du haut des tours; ils comblent les fossés de terre et de fascines; ils entament avec des faux la palissade et le parapet.

     LXXXVII - César y envoie d'abord le jeune Brutus avec six cohortes, puis le lieutenant Caïs Fabius avec sept autres; enfin l'action devenue plus vive, il y amène lui-même un renfort de troupes fraîches. Ayant rétabli le combat et repoussé l'ennemi, il se dirige vers l'endroit où il avait envoyé Labénius, tire quatre cohortes du fort le plus voisin, ordonne à une partie des cavaliers de le suivre, et à l'autre, de faire le tour des lignes extérieures et de prendre l'ennemi à dos. Labénius, voyant que ni les terrassements ni les tours ne pouvaient arrêter l'élan de l'ennemi, rassemble trente-neuf cohortes, qu'il eut la chance de pouvoir tirer des postes les plus voisins, et, par des messagers, informe César de ses intentions.

     LXXXVIII - César se hâte pour prendre part au combat. Son arrivée se fait connaître par la couleur de son vêtement, ce manteau de général qu'il avait coutume de porter dans les batailles, et, à la vue des escadrons et des cohortes dont il s'était fait suivre les ennemis engagent le combat. Une clameur s'élève de part et d'autre, à laquelle répond la clameur qui monte de la palissade et de tous les retranchements. Nos soldats, renonçant au javelot, combattent avec le glaive. Tout à coup notre cavalerie se montre sur les derrières de l'ennemi; d'autres cohortes approchaient; les Gaulois prennent la fuite; nos cavaliers leur coupent la retraite; le carnage est grand.

     Sédulius, chef et premier citoyen des Lémovices, est tué; l'Arverne Vercassivellaune est pris vivant en train de fuir; soixante-quatorze enseignes militaires sont rapportées à César; d'un si grand nombre d'hommes bien peu rentrent au camp sans blessures. Apercevant de leur place forte le massacre et la fuite de leurs compatriotes, désespérant de se sauver, les assiégés font rentrer les troupes qui attaquaient nos retranchements. A cette nouvelle les Gaulois s'enfuient aussitôt de leur camp. Si nos soldats n'eussent été harassés de si nombreuses interventions et de toute la fatigue de la journée, toutes les forces de l'ennemi eussent été détruites. Un peu après minuit la cavalerie,  lancée à leur poursuite, atteint l'arrière-garde; une grande partie est prise ou massacrée; les autres, ayant réussi à fuir, se dispersent dans leurs états.

     LXXXIX - Le lendemain, Vercingétorix convoque l'assemblée;il déclare qu'il n'a pas entrepris cette guerre pour ses intérêts personnels, mais pour la liberté commune et que, puisqu'il faut céder à la fortune, il s'offre à eux leur laissant le choix d'apaiser les Romains par s mort ou de le livrer vivant. On envoie à ce sujet des députés à César. Il ordonne la remise des armes, la livraison des chefs. Il s'installe sur le retranchement, en avant du camp; là on lui amène les chefs; on lui livre Vercingétorix; on jette les armes à ses pieds. Il réserve les prisonniers éduens et arvernes, pour essayer par eux de regagner ces états, et distribue le reste des prisonniers par tête à chaque soldat, à titre de butin.

     XC - Cela fait, il part chez les Eduens, reçoit la soumission de leur état. Des députés envoyés par les Arvernes viennent l'y trouver, promettant qu'ils exécuteront ses ordres. Il en exige un grand nombre d'otages; il envoie ses légions prendre leurs quartiers d'hiver, il rend aux Eduens et aux Arvernes environ vingt mille prisonniers. Il fait partir Titus Labénius avec deux légions et la cavalerie chez les Séquanais. Il place Caïs Fabius et Mucius Minucius Basilus avec deux légions chez les Rèmes pour qu'ils n'aient rien à craindre des Bellovaques, leurs voisins. Il envoie ... chez les Ambivarètes, les Bituriges, les Rutènes, ... Lui-même décide de passer l'hiver à Bibracte, capitale des Eduens près de Autun. Lorsque ces événements sont connus à Rome par une lettre de César, on y célèbre une supplication de vingt jours.

Mars 44 av J.c. Jules César sera assassiné. Hirtius, l'ami de césar,  écrira alors le :

                                                   HUITIEME LIVRE : Hirtius à Balbus                                                  

                 Lucius Cornélius Balbus, né à Gadès en Espagne, reçut de Pompée, sur la recommandation de Lucius Cornélius Lentulus, le droit de cité romaine pour les services qu'il avait rendu à l'armée dans la guerre contre Sertorius, défendu par Pompée, Crassus et Cicéron. Il essaya de réconcilier Pompée et César....

    et Alus Hirtius, ami de Cicéron, qui embrassa le parti de César, dont il fut lieutenant en Gaule; consul en 43 avec Caïus Vibius Pansa, il périt à Modène avec son collègue.

      I - Après avoir vaincu toute la Gaule, César , qui n'avait pas cessé de se battre depuis l'été précédent (53 av J.C.), voulait voir ses soldats se remettre de tant de fatigues dans le délassement des quartiers d'hiver, quand on apprit que beaucoup d'états en même temps recommençaient à faire des plans de guerre et à se concerter : tous les Gaulois avaient reconnu qu'en réunissant sur un seul point n'importe quel nombre d'hommes ils ne pouvaient résister aux Romains, mais que si plusieurs états entraient en guerre sur divers points en même temps, l'armée du peuple romain n'aurait point assez de ressources ni de temps ni de troupes pour faire face à tout.

     II - César, avec une escorte de cavalerie, part de la place de Bibracte (Capitale des Eduens , 23 km ouest de Autun) la veille des calendes de janvier pour rejoindre la treizième légion (Legio -57 - 45) qu'il avait placée non loin de la frontière des Eduens dans le pays des Bituriges (vers Bourges), et y adjoint la onzième légion (Neptune -58 - 45) qui était la plus proche. Laissant deux cohortes de chacune à la garde des bagages, il emmène le reste de l'armée dans les plus fertiles campagnes des Bituriges.

     III - Par l'arrivée soudaine de César, il se produisit ce qui devait nécessairement se produire chez des gens surpris et dispersés : cultivant leurs champs sans défiance aucune, ils furent écrasés par la cavalerie avant de pouvoir se réfugier dans leurs places fortes. En effet le signal ordinaire d'une invasion de l'ennemi, c'est-à-dire l'incendie des constructions, avait été supprimé par l'interdiction de César, pour éviter de manquer de fourrage et de blé, s'il voulait avancer plus loin, ou de donner l'alarme par des incendies. On avait fait plusieurs milliers de prisonniers, et ceux des Bituriges épouvantés qui avaient pu s'échapper à la première approche des Romains s'étaient réfugiés dans les états voisins... César, par des marches forcées, accourt sur tous les points, et ne donne à aucun état le temps de songer au salut des autres. Cette rapidité retenait dans le devoir les peuples amis et ramenait par la terreur ceux qui hésitaient à accepter la paix. Mis devant une telle situation, les Bituriges, qui voyaient que la clémence de César leur ouvrait un nouvel accès dans son amitié, et que les états voisins n'avaient eu à subir d'autre peine que de donner des otages et faire leur soumission, imitèrent leur exemple.

     IV/V - ... Les Bituriges lui envoient des députés pour demander son aide contre les Carnutes (région d'Orléans) qui leur avaient déclaré la guerre. Quoiqu'il ne fut resté que dix-huit jours à Bibracte, César tire de leurs quartiers d'hiver sur la Saône la quatorzième et la sixième légion (Ferrata -52 -250). Quand ils entendent parler de l'arrivée de son armée, les Carnutes se souviennent de malheurs des autres, et, abandonnant leurs villages et leurs places fortes, ils s'enfuient en se dispersant dans les états voisins.

     VI - Prévenu par de fréquentes députations des Rèmes (Belges de Reims, alliés des Romains) que les Bellovaques (Belges de la Somme), dont la gloire militaire surpassait celle de tous les Gaulois et des Belges, s'étant joints aux états voisins, rassemblaient des armées et les concentraient pour fondre en masse sur les terres des Suessions, qu'il avait placées sous l'autorité des Rèmes. Il rappelle la onzième légion (Neptune -58 -45), écrit par ailleurs à Caïus Fabius d'amener dans le pays des Suessions les deux légions qu'il avait, et demande à Titus Labénius l'une des deux siennes.

     VII - Ces troupes une fois réunies, il marche contre les Béllovaques, campe sur leur territoire, et envoie de tous côtés ses escadrons pour faire quelques prisonniers qui puissent l'instruire des desseins de l'ennemi. César apprit que tous les Bellovaques en état de porter les armes s'étaient rassemblés sur un même point, et qu'avec eux les Ambiens, les Aulerques, les Calètes, les Véliocasses, les Atrébates avaient choisi pour y camper un lieu élevé dans un bois entouré d'un marais. Peu de jours avant Commius l'Atrébate avait quitté le camp pour aller chercher des renforts chez les Germains, dont le voisinage était proche et la multitude immense.

     VIII - César avait avec lui ses plus vieilles légions d'un courage incomparable : la septième (Claudia -51-44), la huitième (Augusta -59-48) et la neuvième (Hispania Triumphalis (-59-48); puis la onzième, composée d'éléments d'élite et de grande espérance, comptant déjà huit campagnes. Il convoque donc un conseil, y expose tout ce qu'il a appris, et encourage ses troupes. Pour essayer d'attirer l'ennemi au combat en ne lui faisant voir que trois légions, il règle ainsi la marche de la colonne : les septième, huitième et neuvième légions iraient en avant, précédant tous les bagages; puis viendraient tous les bagages, qui ne formaient cependant qu'une colonne modeste, et dont la onzième légion fermerait la marche; ainsi on ne donnerait pas à l'ennemi l'impression d'être plus nombreux qu'il ne le souhaitait.

IX - César, quoiqu'il eût désiré combattre, étonné cependant par une telle masse d'ennemis, dont le séparait une vallée plus profonde que large, établit son camp en face de l'ennemi. Il fait faire un rempart de douze pieds, avec un parapet proportionné à cette hauteur, creuser un double fossé de quinze pieds de large à parois verticales, élever un grand nombre de tours à trois étages, jeter entre elles des ponts, dont le front était muni de parapets d'osier, de telle sorte que l'ennemi fût arrêté par un double fossé et un double rang de défenseurs : l'un qui, du haut des ponts, moins exposé en raison de sa hauteur, pouvait lancer ses traits plus hardiment et plus loin; l'autre qui était placé plus près de l'ennemi, sur le rempart même, où le pont le protégeait contre la chute des traits. Il plaça des battants et des tours plus hautes aux portes du camp.

     X/XI - Le but de cette fortification était double : l'importance des ouvrages devait faire croire à sa frayeur et augmenter la confiance des Barbares; d'un autre côté, comme il fallait aller chercher au loin du fourrage et du blé, on pouvait, grâce à ces fortifications, défendre le camp avec peu de troupes. Comius était revenu avec cinq cents cavaliers Germains, ce qui enflait l'assurance des Barbares... César, voyant que l'ennemi se tenait depuis plusieurs jours dans son camp défendu par les marais et par sa position, et qu'il ne pouvait ni faire l'assaut de ce camp sans une lutte meurtrière ni l'investir sans renfort de troupes, écrit à Trébonius d'appeler le plus vite possible la troisième légion (Gallica -49 - début IVè s.), qui hivernait avec le lieutenant Titus Sextius chez les Bituriges et de venir le joindre à grandes étapes avec les trois légions qu'il aurait ainsi; lui-même emploie tour à tour les cavaliers des Rèmes, des Lingons et des autres états à la garde des corvées d fourrage, en soutenant les brusques attaques de l'ennemi.

     XII - Cette manoeuvre se répétait tous les jours, et déjà l'habitude, comme il arrive souvent avec le temps, amenait la négligence; les Bellovaques, connaissant les postes habituels de nos cavaliers, font dresser, par une troupe de fantassins d'élite, une embuscade en des lieux boisés; ils y envoient le lendemain des cavaliers pour y attirer d'abord les nôtres, puis une fois cernés, pour les attaquer. La mauvaise chance tomba sur les Rèmes, qui étaient de service ce jour-là. Ayant aperçu tout à coup les cavaliers ennemis, et supérieurs en nombre, ayant méprisé une poignée d'hommes, ils les poursuivirent avec trop d'ardeur et furent enveloppés de partout par les fantassins.Troublés par cette attaque, ils se retirèrent avec plus de vitesse qu'on ne fait d'ordinaire dans un engagement de cavalerie; Verticus, le premier magistrat de leur état, commandant de la cavalerie, périt dans l'action; il pouvait à peine, en raison de son âge, se tenir à cheval. L'ennemi s'enfle et s'exalte de ce succès, et de la mort du prince et chef des Rèmes.

     XIII - Il ne se passe pas de jour que des combats n'aient lieu à la vue des deux camps. Au cours d'une de ces rencontres, les Germains, à qui César avait fait passer le Rhin pour les mêler dans les combats aux cavaliers, franchissent tous ensemble le marais avec audace, tuent le petit nombre de ceux qui résistent, et poursuivent la masse des autres avec vigueur...

     XIV - Après avoir passé plusieurs jours dans leur camp, quand ils savent que les légions de Caïus Trébonius approchent, les chefs des Bellovaques, craignant un siège semblable à celui d'Alésia, renvoient nuitamment ceux qui sont âgés ou faibles ou sans armes, et tous les bagages avec eux... César jette des ponts de claies sur le marais, fait passer ses légions, et gagne rapidement le plateau du sommet de la colline, qu'une pente rapide protégeait sur ses deux flancs. Il range ses troupes en bataille dans une position, d'où les traits des machines pouvaient porter sur les rangs ennemis.

     XV - Les Barbares, confiants dans leurs positions, ne refusant pas de combattre si les Romains s'efforçaient de gravir la colline, demeurèrent en ligne de bataille. Voyant leur résolution, César, laissant vingt cohortes sous les armes, trace le camp en cet endroit et ordonne de le retrancher. Les travaux terminés, il range les légions devant le retranchement, place les cavaliers en grand-garde avec leurs chevaux tout bridés. Les Bellovaques, voyant les Romains prêts à les poursuivre, et ne pouvant ni veiller toute la nuit ni rester plus longtemps sans péril dans la même position, recoururent au moyen suivant. Se passant de main en main les bottes de paille et les fascines qui leur avaient servi de sièges et dont il y avait dans le camp une grande quantité (les Gaulois ont l'habitude de s'asseoir sur une fascine), ils les disposèrent devant leur ligne de bataille et, au dernier instant du jour, à un signal donné, ils y mirent le feu en même temps. Alors une barrière de flamme déroba soudain toutes les troupes à la vue des Romains. profitant de ce moment, les Barbares s'enfuirent en toute hâte.

     XVI - César, bien qu'empêché par la barrière des incendies d'apercevoir la retraite des ennemis, soupçonnait cependant qu'ils avaient eu l'intention de masquer leur fuite : il fait donc avancer ses légions, envoie des escadrons à leur poursuite, mais craignant une embuscade, et de peur que l'ennemi, resté peut-être à la même place, n'ait voulu nous attirer dans une position défavorable, il n'avance lui-même qu'avec lenteur. Les cavaliers hésitaient à s'engager dans le haut de la colline et dans la flamme qui était très dense; ... ils laissèrent aux Bellovaques tout le loisir d'opérer leur retraite. Ainsi cette fuite, pleine à la fois de frayeur et de ruse, permit aux ennemis de s'avancer, sans aucune perte, à une distance de dix mille en plus, et d'y établir leur camp dans une position très bien défendue. De là, plaçant souvent en embuscade des fantassins et des cavaliers, ils faisaient beaucoup de mal aux fourrageurs romains.

     XVII - Ces attaques se renouvelaient souvent, lorsque César apprit d'un prisonnier que Corréus, chef des Bellovaques, avait choisi six mille fantassins et mille cavaliers sélectionnés entre tous, et les avait placés en embuscade dans un lieu où il soupçonnait que l'abondance du blé et du fourrage attirerait les Romains. Informé de ce projet, César fait sortir plus de légions que de coutume et envoie en avant la cavalerie, qui escortait toujours les fourrageurs. Il y mêle des auxiliaires légèrement armés; lui-même avance le pus près qu'il peut avec ses légions.

     XVIII - L'EMBUSCADE des BELLOVAQUES : les ennemis placés en embuscade avaient choisi pour leur coup une plaine (sans doute celle de Choisy-au-bac) qui n'avait pas plus de mille pas d'étendue en tous sens, et que défendaient de toutes parts des bois impraticables et une rivière très profonde; ils l'entourèrent de leurs embûches comme d'un filet. Les nôtres avaient découvert le projet de l'ennemi; prêts à combattre matériellement et moralement, appuyés par les légions, ils auraient accepté tout genre de combat; ils entrent dans la plaine escadron par escadron. A leur arrivée, Corréus crut l'occasion favorable pour agir : il se montra d'abord avec peu d'hommes et chargea les escadrons les plus proches. Les nôtres soutiennent avec fermeté le choc de leurs adversaires, sans se réunir en masse, manoeuvre ordinaire dans les combats de cavalerie en un moment d'alarme, mais nuisible pour la troupe en raison de son nombre même.

     XIX - Tandis qu'on se battait d'escadron à escadron, par petits groupes relayés tour à tour et qu'on évitait de se laisser prendre de flanc, les autres Gaulois, voyant Corréus en train de se battre, sortent de leurs bois. Un vif combat dispersé s'engage. L'avantage étant longtemps disputé, la masse des fantassins sort peu à peu des bois et s'avance en ordre de bataille, et force nos cavaliers à se replier. Ils sont promptement secourus par l'infanterie légère que César avait envoyée en avant des légions. On lutte pendant un bon moment à armes égales; puis, comme le voulait la loi des batailles, ceux qui avaient soutenu le premier choc des Gaulois embusqués, obtiennent la supériorité du fait même que l'embuscade, ne les surprenant pas, ne leur avait causé aucun mal.

     Sur ces entrefaites les légions s'approchent, et de nombreux courriers apprennent en même temps, aux nôtres et à l'ennemi, que le général en chef est là, avec ses forces prêtes. A cette nouvelle, les nôtres, sûrs de l'appui des cohortes, se battent avec acharnement, de peur de partager avec les légions, s'ils vont trop lentement, la gloire de la victoire. Les ennemis perdent courage et cherchent à s'enfuir par des chemins opposés. En vain : les obstacles où ils avaient voulu emprisonner les Romains se retournent contre eux-mêmes. Vaincus, bousculés, ayant perdu une grande partie des leurs, ils s'enfuient cependant en désordre et au hasard, les uns vers les bois, les autres vers la rivière; mais ils ardemment poursuivis dans leur fuite par les nôtres et massacrés. Corréus, en combattant avec le plus grand courage et en blessant un grand nombre d'entre nous, força les vainqueurs à l'accabler de leurs traits.

     XXV - César dispersa soit ses légions, soit ses auxiliaires sur toutes les parties du territoire d'Ambiorix, chef des Belges Eburons, clients des Trévires, (vers Liège en allant au Rhin). Il y dévasta tout par le massacre, l'incendie et le pillage, tuant ou prenant un grand nombre d'hommes. Puis il envoie Labénius avec deux légions chez les Trévires (Belges des bords de la Moselle, Trèves), dont l'état, entraîné à des guerres quotidiennes à cause du voisinage de la Germanie, ne différait guère des Germains par son genre de vie et sa sauvagerie et ne se soumettait aux ordres reçus que sous la contrainte d'une armée.

     D'autre événements mèneront à la pacification : dans le pays des Pictons (Poitou, Lemonum/Poitiers lemo = orme), des Andes (Anjou) avec le massacre de douze mille hommes; des soumissions avec otages chez les Carnutes et les Armoricains et le supplice du chef Carnute Gutruatus (battu de verges et livré à la hache). Il fallut un siège à Uxellodunum, place forte des Cadurques près de Vayrac (Lot). la privation de l'eau de la fontaine permit la reddition : "César qui savait sa bonté connue de tous (!), et qui n'avait pas à craindre qu'un acte de rigueur fût imputé à la cruauté de son caractère, mais qui ne voyait pas la fin de ses desseins, si des révoltes de cette sorte éclataient en divers lieux, résolut de faire un exemple qui intimidât les autres états. En conséquence il fit couper les mains à tous ceux qui avaient porté les armes; il leur laissa la vie, pour mieux attester le châtiment réservé aux alliés déloyaux."

      XLVI - César, voyant que tout avait bien marché sur tous les points de la Gaule, partir pour l'Aquitaine, où il n'était jamais allé lui-même, mais où il avait vaincu partiellement grâce à Publius Crassus; il s'y rendit avec deux légions pour y passer le reste de la saison. Tous les états de l'Aquitaine lui envoyèrent des députés et lui donnèrent des otages. Après cela il partit pour Narbonne avec une escorte de cavaliers; il plaça quatre légions en Belgique, il en envoya deux chez les Eduens, dont il savait l'influence capitale sur toute la Gaule, il en plaça deux chez les Turons (Touraine) , à la fontière des Carnutes, pour maintenir toute la région qui touche à l'Océan; les deux restantes dans le pays des Lémovices (Armoricains, Paimboeuf à Clisson), non loin des Arvernes, pour ne laisser aucune partie de la Gaule vide de troupes. Il revint auprès de ses légions en Belgique, et hiverna à Nemétocenne (sans doute Arras, chez les Atrébates) : Nota : douze légions disponibles.

                   Les douze légions levées par Jules César (mort en -44) :

     - avec emblème "TAUREAU" : Legio IV Macedonia -48-70; Legio VI Ferrata -52 -après 250 (+ loup et Romulus/Romus); Legio VII Claudia -51-44; Legio VIII Augusta -59-48; Legio IX Hispania Triumphalis -59-48; Legio X (Equistris=montée)-58-45 ou Veneria (Vénus); 

     - avec emblème "ELEPHANT" : Legio V Alaudae (Alouette; car certains Gaulois portaient des ailes d'alouette sur leur casque) -52-70 : l'emblème de l'"ELEPHANT" est lié à la bataille de -46 en Tunisie contre des ennemis disposant d'éléphants.

     - avec emblème "NEPTUNE" Legio XI -58-45

     autres légions : Legio I germanica -48-70; Legio III Gallica -49-début IVème s.; Legio XII Victris (Victorieuse) -57-45; Legio XIII -57-45

    - et Legio XXX "Classica" (Naval) -48-41 -

     Nota : Livre IV - XXV : en Bretagne "celui qui portait l'aigle de la dixième légion; Compagnons, sautez à la mer si vous ne voulez pas livrer votre aigle à l'ennemi ..." dixième légion : "Veneria"? car "Equistris" avait pour emblème le taureau. L'aigle était un terme générique "aquila" en latin désignant une enseigne romaine.

     L - A la fin de ses quartiers d'hiver, contrairement à ses habitudes, César partit en Italie, pour leur recommander la candidature au sacerdoce de son questeur Marc Antoine, ... et surtout parce qu'il luttait avec ardeur contre une faction puissante qui désirait, en faisant échec à son ami intime Antoine, ébranler le pouvoir de César à sa sortie de charge... ses adversaires se glorifiaient isolément d'avoir fait nommer consuls Lucius Lentulus et Caïus Marcellus pour dépouiller César de toute charge et de toute dignité, et d'avoir enlevé le consulat à Servius Galba, quoiqu'il eût beaucoup plus de crédit et de suffrages, parce qu'il était lié à César comme ami et lieutenant. Il y venait surtout pour "recommander sa propre candidature pour les élections de l'année suivante , en 49 pour le consulat de 48."

     LI - César fut accueilli par tous les municipes et par toutes les colonies avec des honneurs et une affection incroyables; c'était la première fois qu'il y venait depuis la guerre générale de la Gaule. On n'oubliait rien de ce qui pouvait être imaginé pour orner les portes, les chemins, tous les lieux, où César devait passer. La population entière, avec les enfants, se portait à sa rencontre; partout on immolait des victimes; les places publiques et les temples où l'on avait dressé des tables étaient combles, si bien qu'on pouvait goûter par avance l'allégresse d'un triomphe vivement attendu, tant il y avait de magnificence chez les riches, d'enthousiasme chez les pauvres.

     LII/LV - Après avoir parcouru toutes les contrées de la Gaule "togée", César revint avec la plus grande célérité auprès de son armée, à Némétocenne (Arras...);il tira les légions de tous leurs quartiers d'hiver pour les envoyer dans le pays des Trévires (Moselle) ... il entendit fréquemment dire que ses ennemis intriguaient auprès de Labénius, quelques-uns travaillaient à lui faire enlever, par une intervention du Sénat, une partie de son armée... A son arrivée en Italie, César apprend que les deux légions qu'il avait renvoyées et qui, selon le sénatus-consulte, devaient être menées pour faire la guerre contre les Parthes, avaient été remises par le consul Caïus Marcellus à Cnéius Pompée, et retenues en Italie. Bien que ce fait ne laissât plus de doute à personne sur ce qui se préparait contre César, César cependant résolut de tout souffrir tant qu'il resterait quelque espoir de décider le différend par le droit plutôt que par les armes. Il s'efforça...

                                                    Ainsi s'arrête l'ouvrage inachevé de Hitius


                 Généralités et personnages importants :

   Généralités : Comment parlaient les Romains aux Gaulois? ayant conquis le sud de la Gaule au 1er siècle avant J.C. ces gallo-romains , ayant appris le latin en quelques décennies, deviennent des traducteurs. Jules César et les élites romaines s'exprimaient en latin et connaissaient le grec. Dans leurs conquêtes les Romains n'associaient pas les langues et cultures locales. C'était aux vaincus de s'adapter au latin, donnant les bases du français en devenir, avec toutefois quelques racines celtes.

     Les personnages importants :

      1° ) La conjuration des Ides de mars 44 :

     - D. Junius BRUTUS : fils du consul de 77, adopté par Albinus, lieutenant de César en Gaule. Jeune adolescent commande la flotte romaine contre les Vénètes et détruit la flotte ennemie; prend part au siège d'Alésia .. Comblé par César et désigné comme l'un de ses héritiers, se rallie à son parent Marcus Brutus ; A la mort de César se voit disputer par Antoine la Gaule Cisalpine; abandonné par ses troupes et Octave. Mis à mort sur ordre d'Antoine.

     - Lucius Minucius BASILUS : fils de Satrius et adoptif du riche Minucius Basilus, lieutenant de César en 53; commande la cavalerie envoyée à la poursuite d'Ambiorix, chef des Belges Eburons (Liège); siège d'Alésia; meurt quelques mois après la conjuration assassiné par ses esclaves.

     Titus Attius LABENIUS, le meilleur des lieutenants de César en Gaule, tribun du peuple en 63, guerre des Helvètes en 61, des Belges en 60, combat les Germains au bord du Rhin, les Trévires, les peuples de l'Océan, les Sénones et les Parisiens; siège d'Alésia; destruction des Belges Eburons. Quand la guerre civile éclate, bien que comblé des faveurs de César, il prit le parti de Pompée. Séjourna ensuite en Afrique, puis en Espagne où il trouva la mort à Munda , en 45.

     Lucius Cornélius LENTULUS : consul en 49 avec Caïus Claudius Marcellus, se déclara pour Pompée, le suivit en Egypte et périt égorgé avec lui.

     Cnéius POMPEIUS Magnus, "Le grand Pompée, rival de César; né en 106, consul en 70, en 55 et en 52, triumvir avec César et Crassus en 60 et en 56. La guerre civile éclate en 49; vaincu à Pharsale en 48, Pompée s'enfuit en Egypte, où il périt égorgé sur l'ordre du roi Ptolémée.

     Caïus TREBONIUS, questeur en 60, tribun du peuple en 55; présent à la seconde expédition en Grande-Bretagne, au siège de Vellaunodunum, d'Alésia, campagne contre les Bellovaques, .. de retour d'Espagne, il assiège par voie terrestre Marseille. Prêteur urbain en 48, gouverneur d'Espagne, consul en 45. Chargé de la province d'Asie, il entre dans la conjuration. Après la mort de César il périt à Smyrne, tué par Dolabella qui était venu pour le remplacer.

     2°) Les autres intervenants :

     - ANTOINE : Triumvir Marc Antoine; petit-fils de l'orateur Antoine et fils de Marcus Antonius (guerre de Crête); parent de César par sa mère Julia. Lieutenant de César en Gaule, en 52, questeur en 51, à Alésia, commande la plaine de Laumes puis la ville de Bibracte; expédition contre les Bellovaques, soumet Commius et est élu augure.

     - Q.Tullius CICERO (Cicéron) : frère cadet de l'orateur, né en 102; gouverneur d'Asie de 61 à 58, lieutenant de César en Gaule en 54; siège d'Alésia; d'abord pour Pompée, se rallie à César; après la conjuration s'en prend à Antoine; devient proscrit et fut tué en 43.

     - Marcus Licinius CRASSUS Dives : deux fois consul avec Pompée en 70 et 55, fit partie du premier triumvirat; défait à Carrhes (53), il tomba entre les mains des Parthes et fut mis à mort.

     - Marcus Julius SILANUS : frère utérin de Marcus Brutus; lieutenant de César en 53; après le eurtre de César en 44, servit d'abord Brutus, puis passa à Antoine, et après la défaite d'Antoine, rejoignit en Sicile Sextus Pompée; revint à Rome en 39; consul avec Auguste en 25.

     - Quintus TITUIUS SABINUS : lieutenant de César; campagne contre les Belges et défense de Bibracte en 57, avec seulement trois légions tient en respect les peuples de l'Océan en 56; après la seconde expédition en Grande-Bretagne il tombe dans une embuscade des Eburons (Belges, clients des Trévires) et est égorgé avec la plupart des siens.

     3° Généralités :

     - Celtes : César désigne par Celtes tous les peuples de la Gaule celtique, entre la Belgique et l'Aquitaine. Antérieurement à César, les Celtes avaient occupé une grande partie de la Germanie, s'étaient répandus au nord, dans la Grande-Bretagne; au sud, dans l'Espagne (Celtibères) vers la Galice; avaient même poussés jusqu'en Asie Mineure (Galates de Turquie).

     - Eduens, peuple situé entre Loire et Saône, rivaux des Arvernes, étendant leur influence chez les Belges Bellovaques. Alliés des Romains depuis leur arrivée en Gaule en 121.

     L'Empire romain se maintient jusqu'au dernier empereur d'Occident en 476. Les supplétifs bretons des armées romaines s'étaient déjà installés en petite "Bretagne". La période troublée permit l'installation d'irlandais, gallois, Anglais en nombre qui amenèrent leurs moines, culture et langue... 

     Quant au large Empire romain, JUSTINIEN (527 - 565) fut le dernier empereur qui essaya de reconstituer les territoires récupérés par des Barbares amollis par la vie "civilisée". Il reconquiert l'Afrique, l'Espagne du sud, l'Italie, mais il échoue en Orient et paie tribut aux Perses. Ses successeurs seront des empereurs grecs.

       

                                    

       

     

     

                       

 

En cours ....

BRETAGNE CONTEMPORAINE

GWENN ha DU , un siècle en noir et blanc

"Symbole identitaire par excellence, le drapeau breton fête ses 100 ans. Moderne et fédérateur, il n'a jamais été aussi populaire" - page Notre HistoirE "Nous Vous IllE" magazine du Département d'Ille-et-Vilaine N° 142 déc23/jan-fév 24

     On le voit partout, en festival, au stade et il honore les plaques d'immatriculation. Aux quatre coins de la planète, les Bretons l'emportent en voyage, plié amoureusement dans le sac à dos. Le Mont-Blanc? Déjà fait. Le cosmos aussi. L'astronaute Jean-Loup Chrétien l'a emmené dans l'espace.

     Mais d'où vient-il? D'abord de la langue bretonne. Le Gwenn ha Du porte les couleurs de son nom : Gwenn pour le blanc, Du pour le noir. Beaucoup l'imaginent ancestral. Pas du tout, sa création récente est l'oeuvre d'un jeune architecte natif de Vitré (Haute-Bretagne), Morvan Marchal (1900 - 1963). Dans les années folles (1920), le jeune homme faisait partie des "Seiz Breur", courant artistique qui aspirait à dépoussiérer l'art populaire breton. Quoique fondateur de "Breiz Atao", la revue étendard du nationalisme breton, Morvan Marchal a toujours réfuté le geste politique : le Gwenn ha Du est né en 1924 pour doter la Bretagne d'un emblême moderne, inspiré du "star-splangled banner" américain. Les  9 hermines - symbole des Ducs et Duchesse de Bretagne - remplacent les étoiles. Blanches ou noires, les bandes horizontales représentent les neuf anciens évêchés de la Bretagne : ceux de Cornouaille, de Vannes, du Léon, de Tréguier où l'on parle breton, et ceux de Rennes, Nantes, Dol-de-Bretagne, Saint-Malo et de Saint-Brieuc où l'on parle gallo. La Basse-Bretagne et la Haute-Bretagne sous une même bannière.

     Un avènement tardif : sans faire l'unanimité à ses débuts, le Gwenn ha du fut néanmoins rapidement adopté par le parti autonomiste breton puis par les cercles celtiques. En 1937, il flotte au-dessus du pavillon de la Bretagne à l'Exposition universelle de Paris. Une consécration? Le début d'une reconnaissance. "Le drapeau à bandes" est longtemps resté une affaire d'initiés, très liée à la culture bretonne. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la bannière armoricaine navigua sous vents contraires. La collaboration d'une large partie du mouvement nationaliste breton - qui l'avait adoptée - avec l'Allemagne nazie entache ses couleurs à la Libération. Il faudra attendre les années 1960 pour voir le Gwenn ha Du s'imposer. Brandi par une foule en liesse, le drapeau breton pavoise lors de la victoire historique du Stade Rennais contre Sedan en Coupe de France en 1965. A Saint-Brieuc, en 1972, il défile combatif au poing des ouvriers en grève de l'usine du Joint français. A Plogoff, en 1980, il figure la lutte des mouvements écologiques contre le projet de centrale nucléaire. Le Gwenn ha Du devient le symbole de la résistance au pouvoir en place. Il devient alors politique en affirmant l'existence de la Bretagne avec ses particularités. Il s'enracine dans le coeur des Bretons, leur vie quotidienne. Jusqu'à décorer les rayons des supermarchés, les boutiques de souvenirs... devenant le symbole d'un  corpus de valeurs, de convivialité, de fierté et de solidarité. Avec l'appartenance bretonne des cinq départements d'avant 1941 : les supporters du FC Nantes l'ont repris en jaune et vert, la communauté LGBT aux couleurs de l'arc-en-ciel... par Olivier Brovelli

     Archives Secrètes de Bretagne 1940-44

     L'ouvrage de Henri Fréville, maire de Rennes de 1953 à 1977,député d'Ille-et-Vilaine de 1958 à 1968, président du Conseil Général d'Ille-et-Vilaine de 1966 à 1976 et sénateur de 1971 à 1980, est le fruit de recherches d'un Agrégé d'Histoire Délégué pour la Bretagne du "Comité général d'études pour l'information" dans la Résistance. Il paraitra aux Editions Ouest-France en 1985.

     Les écrits reviennent longuement sur le rôle majeur de Werner BEST, chef de l'administration militaire en France occupée, de 1940 à 1942. Il était hostile à la France,  qui fit payer chèrement l'Allemagne humiliée aux lendemains de la Grande Guerre de 1914 - 18 ou 19, une France considérée centralisatrice et guerrière avec ses colonies. Il cultivait une philosophie raciale et nationaliste et une politique des ethnies.

     Seules deux régions françaises semblaient retenir son attention : le Pays Basque et la Bretagne.

     Membre de la société allemande d'études celtiques, il découvrit plus particulièrement la Bretagne grâce à la revue "STUR" (gouvernail en breton), créée en 1934 par Olier Mordrel. L'article du n°13 de juin 1938 était écrit par Roparz Hémon, de son vrai nom Louis Némo. - Ce personnage avait également un pseudo : "Katuvolkos", en référence au chef éburon Catuvolcus. Les Eburons, région de la Bourgogne actuelle, étaient alliés des Germains. Vaincu par Jules César  Catuvolcus s'empoisonna avec des baies d'if. - Que contenait cet article intitulé : "La route vers nous-mêmes"? Il voulait définir un "racisme breton, cherchant à se débarasser de l'emprise mortelle de l'académisme latin et ses dangers face au génie celtique." Selon l'auteur , "depuis 2 000 ans, le latinisme a sapé puis étouffé la société celtique, ses arts, ses aspirations et ses manières de vivre. C'est lui qu'il faut éliminer."

     Dès juillet 1940 Werner BEST envoie un rapport sur la Bretagne qu'il situe comme "une pierre angulaire de la garde atlantique sous influence de l'Allemagne, avec un espace méditerranéen soumis aux impulsions de Rome (!), avec des incertitudes sur la Grande Bretagne non hors de combat et l'entrée, ou non, des Etats-Unis dans le conflit en cours." Il précise que la péninsule bretonne est le seule apte à jouer le rôle de pivot sud d'une garde atlantique, la Norvège en étant son homologue nord , déjà envahie ainsi que le Danemark.

     La Bretagne selon BEST : "le pays est habité par un peuple qui aspire à se détacher de la France." Plus tard ce jugement sera sérieusement nuancé! Porté par un élan triomphaliste il déclame  que "A partir de la Bretagne - en celtique Breiz - indépendante et sous protection allemande, on pourra soulever contre l'Etat anglais les éléments celtes du Pays de Galles (en celtique Cymru) et de Cornouailles (en celtique Kernow)." BEST ne considère "Celte" que les zones avec le parler "Britonnique". Il rejette ainsi les Gaëliques d'Irlande et d'Ecosse. 

 Irish britons anglosaxons

  

     A l'Etat-major allemand Abetz répond qu'il y a lieu de tout faire par la presse, la radio et la propagande pour accentuer les divergences dans l'opinion française en supprimant l'Alliance française et en stimulant les mouvements séparatistes en Bretagne, en Flandre et en Bourgogne. La Wehrmacht défend alors d'apporter un soutien public à l'autonomisme breton. Dès lors, les séparatistes bretons font acte de précipitation. Le 25 juillet 1940, leurs leaders Debauvais, Mordrel et Marcel Guiyesse font publier une dépêche dans "L'Heure bretonne" indiquant avec le Conseil national breton que la Bretagne deviendrait un état indépendant, qu'afin de remédier à l'oppression dont la Bretagne a souffert depuis 150 ans (1790) du fait de l'administration française, les autorités allemandes ont officiellement reconnues l'existence de la province en créant un poste de gouverneur dont l'autorité s'étendra aux (cinq) départements bretons. Ce fut repris par les radios allemande, anglaise, suisse et américaine et fit des remous importants. On fit dire que ce titre "La Bretagne proclame son indépendance" avait été à contresens et le fait d'un journaliste trop enthousiaste et zélé... et qu'il convenait d'observer à l'égard des aspirations autonomistes des Bretons la stricte neutralité. Désormais les Allemands vont exercer une surveillance du journal séparatiste breton.

     Selon un rapport allemand, "la Bretagne n'est rattachée à la France que depuis le XVIè siècle. Elle a perdu, au cours de la Révolution française les droits particuliers qu'elle possédait à l'origine en matière d'administration locale et dans le domaine de la langue. Les habitants appartiennent à une ethnie qui, par ses origines, ses coutumes, est différente du peuple français. La langue bretonne est prédominante dans la partie occidentale du pays. Les Bretons sont au nombre de 3 millions, dont seuls 41% parlent encore breton. L'immigration venue de la France intérieure et l'installation de fonctionnaires exclusivement français ont fait perdre aux villes une grande part de leur caractère breton. La bourgeoisie locale est entièrement francisée. Par contre, la population rurale a conservé ses anciennes caractéristiques ethniques.

     Il existe, depuis plus de 100 ans, un mouvement pour l'indépendance de la Bretagne qui aspire, soit à se détacher de la France (séparatisme), soit à obtenir des droits particuliers (autonomisme). Ce mouvement s'est élargi et renforcé dans les années qui ont précédé la guerre. Ses chefs sont peu nombreux. La masse paysanne est encore indifférente au mouvement. On a remplacé le breton par le français à l'école et dans l'administration. Des mesures ont été prises contre la littérature et le seul journal breton.

     Plusieurs chefs du mouvement breton ont été condamnés à mort. Fin août 1940 le préfet du Finistère ordonnait l'arrestation de Mordrel (Olivier Mordrelle) et Debauvais, chefs du Parti national breton condamnés pour haute trahison au profit de l'Allemagne. Mais une disposition de l'armistice les libérait de ce jugement. Depuis l'armistice le gouvernement français et le corps des fonctionnaires estiment que ce mouvement est particulièrement dangereux. L'église catholique travaille dans le même sens.

     L'Allemagne doit adopter une attitude telle qu'elle empêche les autorités françaises de réprimer le mouvement breton, tout en évitant cependant de paraitre prendre parti. Il faut continuer à maintenir la presse bretonne dans l'orientation autonomiste. On ne tolérera pas de tracts séparatistes.

     Mais qui étaient ces séparatistes? il suffit de lire la prose de Mordrel : "Nous n'avons plus foi dans le peuple qui ne pense pas, n'a aucun sentiment national et ne compte pour rien. C'est le petit nombre qui compte, aller en prison, braver les lois, opérer en secret, frapper, incendier, répandre la terreur (comme le Gwenn ha Du, c'est notre armée... en secret. Nous nous entrainons en groupes dans les bois, la nuit...). Nous ne sommes pas chrétiens. Nous retournerons demain au paganisme. Ce sont le sang des celtes, leur sauvagerie, leur héroïsme qui seront notre foi!"

     A la mi-septembre 1940, on assista à une crise aiguë au sein du parti autonomiste. La frange activiste et séparatiste du mouvement national breton fut écartée du pouvoir, en premier lieu Mordrel et Debauvais. On regroupe alors les autonomistes modérés avec Raymond Delaporte, un catholique militant de Chateauneuf du Faou, membre de l'association populaire chrétienne "Bleun-Brug" (fleur de bruyère). Recevant le total soutien des autorités allemandes, la constitution d'un Etat breton indépendant devient utopique et inconcevable. Les informateurs estimaient que la tendance séparatiste était de plus en plus impopulaire. Le Gouvernement de Vichy ne fut en rien dans cette initiative.

     Encouragés par la section allemande de Propagande France Paris, les autonomistes bretons modérés vont sortir un quotidien : "La Bretagne". Le journal basé à Rennes sera réalisé par Yann Fouéré et Jacques Guillemot à partir du 20 mars 1941. Mais les rapports allemands indiquent à cette période "la faiblesse du mouvement breton pour l'autonomie. Seule une minorité extrémiste est favorable et la population est de plus en plus anglophile." Les autorités allemandes font alors prévaloir des revendications spécifiques dont l'usage des langues régionales. En août 1941, création d'une Commission pour l'écriture d'une Histoire de la Bretagne avec, entre autres, deux bardes Ab Alor et le fameux Taldir, François Jaffrennou.

     On "ménage" les séparatistes Mordrel et Debauvais en les envoyant en Allemagne accomplir un "séjour d'études celtiques". L'idée principale :

"Pour qu'une organisation modérée soit efficace et admise par la population il est nécessaire que l'organisation extrêmiste subsiste." On choisit le moindre mal! 

     Qu'est devenu Roparz Hémon ? il se lance animateur de la radio "Rennes Bretagne" en proposant des causeries en langue française ou bretonne sur l'histoire, géographie, coutumes, chansons et musiques bretonnes. Il devint le défenseur d'une langue bretonne unifiée avec les dialectes du Léon, de Tréguier et de Cornouaille vis-à-vis du Vannetais. Son article du 23 mars 1941 dans "Arvor" n°12 ,"Le breton, langue officielle", demandait le breton comme langue officielle à côté du français.

     Mais en juillet 1942 la proposition de placer un manuel de langue bretonne de Yann Sohier, -Me a lenno" (Je lirai), dans les écoles primaires publiques se traduisit par un article enflammé de Roparz Hémon, "Arvor" du 26 juillet 1942. Il s'emporta avec des relents de racisme et d'antisémistisme, parla de refaire cette Histoire de Bretagne avec des siècles de honte et d'esclavage de nos petits celtes à cause des légions romaines etc... La contrepartie sera un échec allemand voulant jouer la "modération" à cette période orientée sur un appui d'un parti autonomiste breton. Cet article va le discréditer devant tous.

     Quel sera son destin ultérieur? En août 1944, il s'enfuira de Rennes avec des membres de la formation Perrot pour atteindre l'Alsace puis l'Allemagne. Capturé, il sera jugé en Bretagne en 1946 puis deviendra professeur des hautes études celtiques à Dublin et décèdera en 1978. Bezenn Perrot était une formation paramilitaire créée en mars 1944, issue des sections de combat du séparatiste Célestin Lainé. Ses membres portaient l'uniforme allemand et avaient un salut similaire à celui des Waffen SS. Le nom de Yann-Vari Perrot était celui de l'abbé bretonnant et régionaliste du Léon"parachuté" dans une petite commune "rouge" de Scrignac dans les Monts d'Arrée. Fervent nationaliste breton anticommuniste, il est "calomnieusement accusé d'être acquis au nazisme le plus échevelé". Il fut abattu par un jeune résistant communiste.

     La Bretagne, une rebelle!

  Comment mieux répondre aux aspirations de notre Bretagne contemporaine en France et dans l'Union européenne toujours en construction et en interrogations ?

avec Jacques Delors : "On n'affronte pas le présent et on ne construit pas l'avenir si on n'a pas de mémoire."

 

     Depuis la bataille de 1488 à Saint-Aubin-du-Cormier, gagnée par l'artillerie française face aux Bretons et des coalisés de circonstance, puis 1532, année d'un rattachement subi avec le royaume de France, la province associant des peuplades armoricaines et des cousins d'Outre-Manche ne sera jamais complètement "soumise" aux Francs. Son Histoire, la diversité et la personnalité de ses habitants et sa géographie portée par sa péninsule vers la Manche et l'Océan lui confèrent un statut original et singulier. Un "Penn ar bed" vers des libertés!

     De tous temps les échanges commerciaux existaient de part et d'autre de la Manche et la mer d'Irlande.

     Des peuplades de la Bretagne insulaire avaient déjà fuit en Armorique à la fin du IVè siècle. L'armée romaine, confinée sous le mur d'Hadrien, subissait des soulèvements. Des moines, venus de Cornouailles, du Pays de Galles et d'Irlande aux V et VIè siècles, ont apporté leurs cultures et leurs langues en Armorique. On aura choisi seulement "7 Saints" en Bretagne parmi environ 7 500 noms possibles!

     Chez les Gaulois, au VIè siècle, dans la dynastie des Mérovingiens, pour contrer son frère Clotaire, Childebert favorisera l'immigration de Cornouaillais et de Gallois vers l'Armorique, poussés par les Jutes, Pictes et Saxons. A l'inverse, suite à des raids Vikings, l'aristocratie bretonne fuira Outre-Manche de 913 à 935. Dans l'autre sens, le Normand/Viking Guillaume Le Conquérant emmena avec lui un tiers de son armée composée de Hauts Bretons pour conquérir l'Angleterre en1066. Et les Fitzalan/Stuart de Dol-de-Bretagne s'en allèrent s'implanter en Ecosse... Les Anglo-Normands Plantagenets d'Henri II, époux d'Aliénor d'Aquitaine, seront maîtres de la Bretagne de 1166 à 1213, laissant place au capétien Pierre de Dreux. Au XIIè siècle, l'aristocratie bretonne s'exprime en français ou en latin, excepté en Basse-Bretagne. Alain IV Fergant (1084 - 1112) fut le dernier duc bretonnant. Mais le peuple bas-breton, lui, s'exprimait toujours en breton, pénétrant progressivement vers l'est. 

 

     Après la victoire d'Hastings en 1066, Guillaume Le Conquérant impose le franco-normand pour la noblesse anglo-normande. Pendant près de trois siècles, lois et édits sont publiés en saxon pour le peuple et en "français" pour l'aristocratie. La Guerre de Cent Ans mettra fin à cet usage et le français ne sera plus utilisé vers 1450. En 1488, la Ville de Rennes était attaquée par les troupes françaises de la Trémoille qui se vit signifier : "Ne pensez pas que vous soyez déjà seigneurs en Bretagne, le roy n'a aucun droit en cette duchée. Nous ne craignons ni le roi, ni  toute sa puissance.Lui faites part de la joyeuse réponse car n'aurez d'autre chose." Les français quittèrent les lieux ne voulant répéter le siège de Nantes. Mais, voulant porter secours à Fougères - qui avait capitulé le 19 juillet -, l'armée bretonne sortit de Rennes et rencontra l'armée française et son artillerie puissante à Saint -Aubin-du-Cormier...

     Retenons le dynamisme culturel et technique de la Bretagne après la naissance de l'imprimerie Jean Brito de Pipriac, au nord de Redon, vers 1450. Le premier dictionnaire mondial trilingue (breton, françois et latin) sortira de l'imprimerie Jehan Calvez en 1499. Le "Catholicon" fut demandé à Jehan Lagadeuc par le chanoine de Tréguier.

- L'ordonnance de portée générale de Villers-Cotterêts, signée par François 1er en août 1539, comportait 192 articles pour la justice et la police. Fait important, les actes officiels ou notariés (articles 110 et 111) ne s'écriront plus en latin mais se feront en "langue maternelle françois". Nombre de sujets ont estimé que cela s'appliquait à "toutes les langues maternelles du royaume". Les articles 50 à 54 précisent que les curés devront tenir des registres de baptêmes et décès.

 L'ancêtre breton du Gwen (n) ha Du?

     La croix noire "Kroas Du" sur fond blanc aurait été arborée par nos bateaux partant aux Croisades, au Combat des Trente, sur le drapeau de la Ville de Nantes et la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier... Ce qui est bien sûr c'est l'apport du Capétien Pierre de Dreux avec son quartier d'hermines au XIIIè siècle. Son surnom de "Mauclerc" fut donné pour l'absoudre d'une période  vindicative avec le clergé.  Un quartier d'hermines réservé à cet ordre fut confisqué pour se placer dans son blason familial comme Duc de Bretagne de 1213 à 1237. On raconte aussi cette belle histoire de la Duchesse Anne de Bretagne associant l'hermine, animal poursuivi qui fit face plutôt que de salir sa robe blanche et quelque peu noire.

      Leur connotation "Inter-celtique" sera affirmée aux Bas-Bretons en 1701 par la venue du bibliothécaire gallois du musée d'Oxford. Ce linguiste éminent, Edward Lhuyd, continuera son voyage d'études de la Bretagne en descendant la façade Atlantique. Il divisera ensuite les langues celtiques en "Britonniques", Bretagne, Cornouailles et Pays de Galles et "Gaëliques", Ecosse, Ile de Man et Irlande. Si le Cornique a disparu à la fin du XVIIIè siècle, il est connu que de nos jours les marins bretonnant continuent de communiquer en britonnique avec leurs homologues gallois . Cependant, la Bretagne accueillera une communauté irlandaise catholique et gaëlique au XVIIè siècle, fuyant la soumission de l'île par Cromwell.

 

     Les nombreuses révoltes bretonnes envers le roi de France étaient la résultante d'un attachement à leurs terres éloignées du pouvoir autoritaire et centralisateur qui venait ponctionner avec des taxes, s'ajoutant à celles de leurs seigneurs. Si le XVIè siècle fut celui de l'"Age d'or" de la Province, celui-ci s'acheva avec la Révolte des Bonnets rouges de 1675 à Rennes puis de nombreuses villes de Bretagne . On parla de 15 000 coupables à châtier. En Cornouaille, les "Bonnets bleus" inventent un "Code paysan", initiateur des revendications ultérieures de 1789 : abolition des corvées,  des dîmes, de la banalité du moulin, argent des fouages employé à acheter du tabac, distribué avec le pain bénit aux messes paraoissiales, droit de chasse réglementé, colombiers rasés, recteurs et curés salariés par leurs paroissiens, justice plus rendue par le seigneur mais un juge salarié, mariages permis entre noblesse et paysannerie, successions partagées équitablement, ...

     Ces événements durement réprimés restèrent présents dans les mémoires : "les arbres commencent à pencher sur les grands chemins sous le poids qu'on leur donne!" Le Parlement de Bretagne, suspecté d'intelligence avec l'insurrection sera envoyé en exil à Vannes de 1675 à 1690 et fera baisser la population de Rennes d'environ 2 000 à 3 000 personnes sur 45 à 50 000 personnes. On dira que "Rennes sans le Parlement ne vaut pas Vitré". A partir du 23 octobre 1675, les habitants de la rue Haute quittent la Ville. On démolira un tiers de leurs maisons en avril 1676. L'affaire La Chalotais à Rennes, en 1762, signifia également une résistance nobiliaire bretonne. A l'aube de la Révolution française, la conjugaison avec une dure période climatique amenant de faibles récoltes et la misère, les aventures guerrières et coûteuses de rois de droit divin et absolu, l'éveil des consciences avec le libéralisme et la franc-maçonnerie, le Nouveau Monde, les "Découvertes" et la Guerre d'Indépendance américaine furent des déclencheurs d'opinions.Le roi Louis XVI et son épouse l'Autrichienne, mal acceptée, ne furent pas à la hauteur de sa fonction dans une période majeure de profonds changements culturels, économiques et politiques. Les erreurs hésitations  devinrent une valse funèbre.

     La révolte de tuiles jetées sur la troupe dans le Dauphiné en juin 1788, puis l'Assemblée de la Vizille près de Grenoble amenant la tenue des Etats-Généraux, furent des éléments décisifs. Les derniers Etats avaient été convoqués en 1614. 

     Aux Etats-Généraux de Bretagne de décembre 1788, le mécontentement piloté par 300 étudiants de Droit de Rennes, avec Moreau le morlaisien à leur tête,  appuyés par 400 étudiants montés de Nantes, aura son dénouement aux "Journées des Bricoles" des 26 et 27 janvier 1789; les "bricoles" servaient à soutenir les seaux ou les chaises de ces "messieurs"! Tout tint dans l'entêtement des nobles à propos des impositions réservées aux seuls roturiers, les "fouages". Inconscients, lls faisaient fêtes et ripailles et s'arc' boutèrent sur leurs droits séculaires! Les bourgeois et le peuple s'unirent contre ces nobles qui avaient six à sept fois plus de voix que les deux autres ordres réunis, le Tiers état et le clergé. Il en résulta une bataille à la sortie du Couvent des Cordeliers, place du Palais de Rennes avec la mort du fils d'un capitaine de cavalerie, un porteur et l'ami de Chateaubriand, lequel dira : "Lecteur je t'arrête, regarde couler les premières gouttes de sang que la Révolution allait répandre. Franchis le fleuve de sang qui sépare à jamais le Vieux monde dont tu sors, du monde nouveau à l'entrée duquel tu mourras."

     Parmi les nobles présents, il y avait  le Marquis de La Rouërie, le héros de Yorktown et la Guerre d'Indépendance américaine entre 1777 et 1784, l'ami de Georges Washington. Les jeunes étudiants avaient adulé ce jeune noble libéral et franc-maçon,saluant l'idée d'un changement d'époque et opposé à l'absolutisme d'un monarque. Il avait été emprisonné à la Bastille avec d'autres nobles bretons  - certes avec confort - l'été 1788, pour avoir défendu les intérêts de la Bretagne.Par la suite, il sera le précurseur de la Contre-révolution avec son "Association bretonne", ne cautionnant pas la suppression par les Républicains des lois et coutumes particulières de la Bretagne.

     Le Tiers Etat breton comprenait une majorité de bourgeois, futurs fondateurs du "Club Breton". Il deviendra ensuite le "Club des Jacobins" à Versailles, avec Robespierre qui en prendra la présidence en 1790. "Le bonnet phrygien de notre Marianne républicaine n'est autre que celui des bonnets rouges de Sébastien Le Balp tué par un marquis en 1675. En 1782, les criminels condamnés à vie au bagne de Brest portaient l'habillement et le bonnet rouge. La quasi-totalité des députés bretons, convoqués aux Etats-généraux, étaient francs-maçons. Ce Club des Bretons, qui avaient tous leur bonnet rouge dans la poche, a joué un rôle majeur dans l'abolition des privilèges, dans la nuit du 3 août 1789. D'autre part, il existait en Bretagne des liens très forts entre jésuites et francs-maçons qui s'intéressaient aux questions sociétales, faisaient de l'entrisme, de la diplomatie, s'opposaient à Paris ou à Rome. La "Parfaite Union" à Rennes ou les "Amis de Sully" à Brest font partie des loges les plus anciennes de France. C'est aussi en Bretagne que sont nées la franc-maçonnerie forestière et celle des bois, très liées au néo-druidisme", d'après "Le Compas et l'hermine" d'Arnaud d'Appremont.

     Rennes, ville républicaine, s'opposera aux excès de la Terreur de 1793 avec son maire Jean Leperdit, contrairement aux excès de Nantes. Mais, la demande de levée de 300 000 hommes cette année 1793, pour combattre aux frontières de l'Est, provoquera dans l'Ouest de la France une insurrection. "Le paysan breton préferera se battre chez lui pour des biens tangibles que se battre aux frontières pour une abstraction. Le soulèvement de l'Ouest contre la République continuait, par certains de ses aspects, d'autres soulèvements du temps de la monarchie." selon Michel Mohrt.

   Au sud de la Loire, les "Vendéens" disposaient d'une vraie armée bien organisée de près de 50 000 hommes. Ils se sont surtout soulevés pour défendre leur foi et leurs "bons prêtres", proches du peuple. Et parfois pour leurs "seigneurs royalistes". Quant aux "Chouans", répartis au nord du fleuve puis en Mayenne, Sarthe et Normandie,Il s'agissait surtout de bandes indépendantes. Le mot "chouan" provient du surnom donné au contrebandier de sel entre Bretagne, exemptée de droits depuis l'édit d'Union à la France, et le Maine. Jean Cottereau utilisait le hululement du chat-huant comme cri de ralliement pendant ses expéditions nocturnes. Les deux mouvements se déclarent royalistes et catholiques, se démarquant des "Bleus" républicains ou "Patauds". 

     En 1804, le Consulat regroupe environ 400 intellectuels et notables dans une "Académie Celtique". Il convenait alors de développer les vents porteurs du Romantisme ambiant des écrivains vers des références historiques de la nouvelle Nation en constitution après ces terribles années révolutionnaires. A son tour,Napoléon III soutiendra le "Celtisme" et sera un admirateur de la modernité britannique. Cependant, il supprimera la nouvelle "Assemblée bretonne" de 1843. Il faudra attendre 1873 pour qu'elle redémarre sous l'impulsion du député vitréen, catholique et monarchiste, Arthur de La Borderie, avec pour mission le "développement des progrès agricoles et former un centre d'études et de relations". Plus tard, parmi ses membres, Théodore de la Villemarqué (Barzaz), Louis Tiercelin, Anatole Le Bras dit Le Braz, Théodore Botrel, les bardes Abhervé et François Jaffrennou dit "Taldir".

     80 ans après la Révolution française, les Prussiens sont aux portes de Paris. M. de Kératry, ancien préfet de police, quitte la capitale en ballon et propose à Tours au jeune ministre de la guerre et de l'intérieur , âgé de 32 ans, de marcher sur Paris avec une "Armée de Bretagne". Ce Léon Gambetta, originaire de Ligure italienne, natif de Cahors et naturalisé français à 21 ans, était un avocat républicain qui avait lancé un programme radical en 1869 : séparation des églises et de l'état, élection des fonctionnaires, supression des armées permanentes, ... L'armée "Forces de Bretagne" est regroupée près du Mans avec promesse d'obtenir des fusils à tir rapide, canons à longue portée et mitrailleuses perfectionnées. Venus des cinq départements bretons, 25 000 hommes sont stationnés à Conlie avec seulement un armement adéquat pour 2 000 hommes et la plupart sans armes. Alors qu'il restait 15 000 armes à tir rapides à Brest, on ne fit livrer que 2 000 Remingtons de modèle espagnol et 500 revolvers! Des deux bateaux attendus d'Amérique et d'Angleterre, on dérouta l'un d'eux au Havre contenant 38 000 armes à tir rapide. Fin novembre, les 35 000 hommes ne disposaient que de 9 181 fusils à percussions antiques et 5 000 carabines Spencers. On réussit à y ajouter 3 600 fusils à percussion ayant besoin de réparations et 1 400 chassepots ne disposant que de 600 cartouches à se répartir. Début décembre 1870, le maire de Rennes, M. Bidard, alla trouver le préfet qui lui répondit : "On a eu tort de faire une armée de bretons. Que voulez-vous, à Tours ces messieurs craignent que ce soit une armée de chouans..." A la démission du général de division de Kératry, qui ne voulait pas aller au combat pour exposer ses soldats désarmés à une perte certaine, le nouveau commandant passa en revue des soldats bretonnant. "D'ar ger, ma general, d'ar ger!" clament-ils, ce qui signifie "non pas à la guerre mais à la maison!" avec évidemment une mauvaise interprétation du commandant. Le camp de Conlie s'était transformé en camp de la boue piétinés par 50 000 sabots. Ils n'arrivaient pas à trouver de souliers assez grands pour leurs larges pieds de paysans dans ce "KERFANK", en breton ville de la boue.

 

     "Les Révolutionnaires ont commencé par traduire les textes dans nos 35 différentes langues régionales. Mais ensuite ils ont changé de doctrine et décidé de forcer tout le monde à parler le français. L'école obligatoire, à partir de 1882, a permis de concrétiser cette volonté avec des punitions, des humiliations ou des méthodes comme le "symbole". Ce n'était pas généralisé, ça dépendait des écoles, des instituteurs. Le premier enfant qui était pris à parler breton, dans la cour de l'école, devait porter autour du cou ou dans sa poche un objet, un sabot, un morceau de bois... Il devait espionner ses camarades pour le refiler à un autre qu'il surprenait à parler breton. Le dernier qui l'avait, en fin de journée ou de semaine, était puni : retenues après les classes, devoirs supplémentaires, nettoyage des toilettes...

     Les Bretons auraient pu apprendre le français et continuer à parler breton. La majorité de la population mondiale parle plusieurs langues. Ce qu'on a imprimé dans l'esprit des gens, c'est que parler breton c'était être un "plouc", un arriéré. Les Bretons de la campagne et des classes populaires, parce qu'ils ne parlaient pas français, étaient déconsidérés. Ils ont fini par intégrer qu'ils étaient inférieurs et que, s'ils voulaient s'en sortir, il fallait qu'ils ressemblent à ceux qui étaient au-dessus en rejetant leur langue dans un "suicide linguistique". Rozenn Milin, thèse de sociologie UHB2 Rennes - on aurait aussi pu indiquer le même phénomène avec le gallo.

     D'éminents écrivains auront brillé par leurs jugements du peuple et selon les périodes de l'Histoire :

- la formation des élites semblait être une priorité, même chez nombre de propagandistes des "Lumières", à quelques exceptions près, dont Diderot, Turgot ou certains membres du bas-clergé proches du peuple. Ainsi, à Acigné, dès 1718 le recteur de la paroisse proposait un enseignement pour une trentaine de jeunes filles. Les garçons attendront 1833 et la loi Guizot pour aller dans une école de "fréquentation facultative", pas gratuite, sauf pour les indigents.Les filles n'étaient pas concernées!

- Le procureur du Parlement de Bretagne, La Chalotais, soutenait avant la Révolution française que "le bien de la société demande que les connaissances du peuple ne s'étendent pas plus loin que ses occupations." Voltaire l'en félicita par courrier : "Je vous remercie de proscrire l'étude chez les laboureurs." Jean-Jacques Rousseau émit un jugement similaire : "N'instruisez pas l'enfant du villageois car il ne lui convient pas d'être instruit." En 1792 l'abbé Grégoire a combattu contre l'esclavage et pour les Droits de l'Homme, mais aussi pour l'unité linguistique de la République, réservant au seul français le nom de "langue de la Liberté". En 1794, Barrère, du Comité de Salut Public renchérit : "le fédéralisme et la superstition parlent bas-breton et le fanatisme parle basque!"

     Avec les enfants de paysans, dont la motivation était relative, l'assiduité à l'école suivait un rythme saisonnier. Ainsi, dès mi-juin, avec les foins, beaucoup d'enfants disparaissaient pour ne revenir qu'à la Toussaint, après la moisson du sarrasin et la récolte des châtaignes. Il y avait aussi les jours de foire ou de marché, les petits-frères ou soeurs malades et les vaches à garder.

     Si la loi Guizot fut importante en 1833, bien qu'orientée seulement par des classes primaires publiques ouvertes aux garçons, puis les lois Falloux de 1850 et Jules Ferry 1881/82, il faudra attendre 1939 et la loi sur les allocations familiales pour abaisser l'absentéisme à l'école. Dans l'Ouest de la France, l'enseignement était un bon moyen de reprendre les positions perdues dans la société depuis la Révolution française. La course de vitesse entre nos deux écoles privées et publiques suscita un interminable conflit jusqu'au début des années 1970 avec, fait notable, la mixité dans les classes. Cette dualité public/privé provoquera la recherche des bons résultats et de l'excellence. De nos jours les Académies de Nantes et Rennes pointent en tête. Dans les écoles bilingues breton/français on obtient également un plein épanouissement intellectuel, mais il en va de même avec l'enseignement gallo/français ou anglais/français.

 Revenons à nos chers auteurs, chroniqueurs du XIXè siècle :

- en bon républicain, Victor Hugo : "le Breton parle une langue morte, ce qui est faire habiter une tombe à sa pensée." Sur la route menant en Bretagne avec Juliette Drouet, entre Alençon et Fougères, il "essaiera" de dessiner le château de Lassay dans le Maine, le domestique prétextant que "Monsieur ne reçoit pas les vagabonds!" Il placera Lassay dans ses dix belles villes de Bretagne à côté de Fougères, Vitré, Dinan, Lamballe... mais également Sainte-Suzanne et Mayenne...!

    Carnac : "Les monuments celtiques sont étranges et sinistres. J'ai eu presque un moment de désespoir; figures-toi que ces prodigieuses pierres de Karnac, dont tu m'as si souvent entendu parler, ont presque toutes été jetées bas par les imbéciles de paysans, qui en font des murs et des cabanes. Tous les dolmens, un excepté qui porte une croix, sont à terre, il n'y a plus que des peulvens. Te rappelles-tu? un peulven, c'est une pierre debout comme nous en avons vu une ensemble à Autun en 1825. Les peulvens de Karnac font un effet immense. Ils sont innombrables et rangés en longues avenues. Le monument tout entier, avec ses cromlechs qui sont effacés et ses dolmens qui sont détruits, couvrait une plaine de plus de deux lieues. Maintenant on n'en voit plus que la ruine. C'était une chose unique qui n'est plus. Pays stupide! peuple stupide! gouvernement stupide!"

     En 2023, une association veille sur les pierres de Carnac http://www.menhirslibres.bzh Les sites mégalithiques du Morbihan devraient être membres de l'Unesco prochainement. La démarche est sur le point d'aboutir.

 

     Ce qui était moins méprisant que Gustave Flaubert qui n'y compris "que de rauques syllabes celtiques mêlées de grognements des animaux ..." Pour lui, à Carnac "la nuit, quand la lune roulait dans les nuages et que la mer mugissait sur le sable, les druidesses errantes parmi ces pierres devaient être belles, il est vrai,avec leur faucille d'or, leur couronne de verveine et leur traînante robe blanche rougie du sang des hommes. Longues comme des ombres, elles marchaient sans toucher terre, les cheveux épars, pâles sous la pâleur de la lune."

     Hyppolyte Taine  voit à Carnac, en 1865, "des pierres qui frappent dans un âge barbare. Est-ce une oeuvre de ces druides qui, vivant dans les bois, et n'ayant pas de temple couvert, ont voulu, sur cette plage sans arbres, imiter les files de leurs forêts et consacrer de vagues intuitions géométriques? En tous cas, ces blocs ont été remués par des bras nus de sauvages et des rouleaux. Il y a eu là des assemblées de guerriers, des sacrifices d'hommes, et la bruyère, les ajoncs, le coin bleu de la mer à l'horizon sont les mêmes qu'alors. Y avait-il une croyance attachée au voisinage du soleil couchant et de la mer infinie, l'espérance d'une résurrection? Les druides croyaient à l'âme immortelle, aux renaissances futures aux temps où l'espèce humaine a vagué dans les bois, parente des aurochs et des élans qui ont disparu."

     Jules Michelet sera le plus complet avec son "Tableau de la France et la Bretagne de 1831" qu'il qualifie de "la pauvre et dure Bretagne, l'élément résistant de la France.La langue bretonne ne commence même pas à Rennes, mais vers Elven, Pontivy, Loudéac et Châtelaudren. De là, jusqu'à la pointe Finistère, c'est la vraie Bretagne, la Bretagne "bretonnante", race rude de grande noblesse, d'une finesse de caillou.Les paysans qu'on rencontre, sérieux, les cheveux noirs, la figure sèche, vous regardent obliquement. Ici le visage est rond. Imaginatifs et spirituels, ces descendants des opiniâtres "Kymris" (peuple celte ancêtre des Gallois) n'en n'aiment pas moins l'impossible, les causes perdues. Si le Breton perd tant de choses, sa langue, son costume, une lui reste, le caractère. Ce pays a été longtemps étranger au nôtre, justement parce qu'il est resté trop fidèle à notre état primitif, peu français tant il est gaulois, il nous aurait échappé plus d'une fois si nous ne l'avions tenu serré entre quatre villes françaises : Nantes et Saint-Malo, Rennes et Brest... et pourtant, cette pauvre vieille province nous a sauvé plus d'une fois, souvent lorsque la patrie était aux abois et qu'elle désesperait presque, il s'est trouvé des poitrines et des têtes bretonnes plus dures que le fer de l'étranger."

     Gérard de Nerval en 1849 espère "retrouver là un descendant de ces "fiers gars" qui ont remué la Bretagne pendant vingt-cinq ans, donné la main aux "Vendéens", résisté à Hoche, et que seul Napoléon a pu dompter en les incorporant dans l'armée d'Italie."

     et Stendhal, revenant du soleil d'Italie en juillet 1837 précise à Saint-Malo: "j'avais oublié tout au monde. Si l'on m'eût demandé où j'étais, j'aurais répondu : A la Martinique... On trouve, près de cette ville toute du Moyen-Age, un menhir de vingt-cinq pieds de haut (Dol-de-Bretagne) : ces monuments informes font réfléchir et je commence à m'y attacher, à mesure que je vois augmenter mon estime pour les Bretons...On pourrait lever ici une garde impériale de marins. Du temps de l'Empire, les corsaires bretons attendaient, pour sortir, quelque tempête qui ne permit pas aux vaisseaux du blocus anglais de se tenir près de leurs rochers de granit noir. Quelle différence pour Napoléon si, au lieu de faire des flottes, il eût équipé mille corsaires? Que n'eût-il pas fait avec des Bretons?"

     Gauguin sera attiré  en 1886 par "une nature vierge, des dunes et des landes, le "sauvage". Il citera surtout Le Pouldu. "J'aime la Bretagne, j'y trouve le sauvage, le primitif. Quand mes sabots résonnent sur le sol de granit, j'entends le son sourd, mat et puissant que je recherche en peinture."

     Ernest Renan, le Trégorrois, définira la Nation en 1882 : "L'homme n'est esclave ni de sa race, ni de sa langue, ni de sa religion, ni du cours des fleuves, ni de la direction des chaînes de montagnes. Une grande agrégation d'hommes, saine d'esprit et chaude de coeur, crée une conscience morale qui s'appelle une nation... qui est une âme!"

 

     L'hymne breton "Bro Gozh ma Zadou : tout vient du "Hen Wlad Fy Nhadau" écrit par le Gallois Evan James (1809 - 1878), poète et tisserand de Pontypridd. L'air aurait cependant été composé par son fils James James (1833 - 1902) au cours d'une promenade au bord de l'eau", en janvier 1856 : "Glan Rhondda", les rives de la rivière. Un cantique "Dieu et mon pays" reprendra l'air adapté en 1895 par le pasteur protestant de Quimper W.J.Jones. Quant à l'hymne breton écrit par François JAFFRENNOU, il sera publié dans un journal catholique de Morlaix en 1898. Il s'imposera rapidement en Bretagne au début du XXè siècle ainsi qu'en cornique en Cornouailles avec "Bro goth agan tasow"

. L'Union Régionaliste Bretonne fut présidée à sa création en 1898 par le républicain Anatole Le Braz. C'est toutefois une assemblée conservatrice, regroupant des bourgeois, des notables et des nobles, qui oeuvre pour la transmission des traditions menacées, "des costumes nationaux de Bretagne"... Les liens sont étroits avec le "Gorsedd gallois". Déjà, le collecteur La Villemarqué (Barzaz Breiz) y avait été nommé barde en 1838. Il en fut de même pour plusieurs membres de l'URB en 1899. Devenu "Taldir", François Jaffrenou écrit : "Nous sommes Bretons, et nous voulons que nos compatriotes soient comme nous qui nous occupons des destinées de la race (sens différent que de nos jours), c'est un devoir de les instruire et de les guider... "

     Avant la Grande guerre de 1914-18 les grandes fêtes historiques et celtiques attirent les foules en Basse-Bretagne. En 1914, on dénombrait 1,2 millions de locuteurs en langue bretonne, principalement en Basse-Bretagne - de nos jours, ils ne sont que 200.000 avec une moyenne d'âge de 70 ans -. A Saint-Brieuc en 1906 les hymnes breton puis français sont joués par la musique du 71è Régiment d'infanterie! la Grande guerre de 1914 à 1918 sera celle du "sacrifice breton" avec environ 150 000 morts pour la Bretagne dont 49 000 pour l'Ille-et-Vilaine. La proportion très élevée des morts bretons tient au caractère très rural de la population, ce qui orientait les recrues vers l'infanterie, principale "chair à canon" de la guerre dans les 10ème corps de Rennes et 11ème de Nantes. Un général d'origine bretonne expliquait que "le breton est excellent dans la guerre défensive. le breton n'a pas peur. Il tient là où d'autres régiments lâchent prise. Le fatalisme breton, bien nourri par son éducation religieuse en fait une troupe sûre et la rusticité de ces ruraux était appréciée par l'état-major dans cette guerre des terrassiers." En 1920, le Maréchal Foch pourra entendre l'hymne breton à Morlaix ainsi que nombre de présidents de la République française avant la Seconde Guerre mondiale. Quant au barde Théodore Botrel, né à Dinan en 1868, il deviendra, avec l'écriture de plus de 900 chansons, le "chansonnier des armées".

     Longtemps après 1491, on commémora les cinq siècles d'union de la Bretagne à la France royaliste avec une sculpture d'Anne de Bretagne à genoux devant le roi de France. Cette sculpture, posée en 1911 dans une niche sur la façade de la mairie de Rennes, subira une explosion en 1932. Les indépendantistes bretons faisaient ainsi payer l'édit de François Ier de 1532 qui proclamait l'union de la Bretagne à la France, sans faire signer un vrai traité par les deux parties. De quoi rendre caduque cette union?

     Catholiques et Républicains, la bataille du sport :

- Dans les années 1885 - 1890, Dinard, Saint-Malo et la baie de Saint-Brieuc sont prisés par les Britanniques aisés qui importent leur football. Après la loi de 1901, qui facilite la création d'associations, le Stade Rennais est créé par des étudiants.Son premier entraîneur est un Gallois. Dès 1902, l'Union sportive servannaise et malouine joue avec des joueurs issus des îles britanniques, et un seul joueur français.

- Le tournant entre la fin du XIXè et le début du XXè siècle est un moment critique pour l'Eglise : son influence dans la société française est contestée par les républicains et la pratique religieuse baisse. A la séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905, les catholiques s'appuient sur les "patronages" des grosses cités pour aller au contact des masses. Déjà, le patronage proposait de nombreuses acivités : chorale, troupes de théâtre, gymnastique ... Les sports collectifs sont encouragés car développant l'esprit d'équipe. Mais le rugby est écarté car trop violent et contraire à la morale regilieuse.

- dans nos petites cités, il n'en fut pas de même, le sport collectif ne prit racine qu'avec le Front Populaire de 1936. Celui-ci incita certes le droit aux congés payés pour tous mais s'inquiéta aussi de la montée en puissance des Allemands revanchards depuis leur défaite humiliation de la Grande Guerre. Pour des raisons démographiques, depuis 1935, les français doivent effectuer deux ans de service militaire. L'esprit n'est pas totalement à la sérénité. Quelques parties de football se sont déroulées sur notre commune en 1936, peuplée de 1 450 habitants, avec une prépondérance du monde agricole et ses 207 exploitations produisant du blé, du lait et un cidre très réputé. 1936, apparation du premier tracteur dans la commune!

- L'Association "Union Sportive d'Acigné" ne figure au Journal Officiel qu'en janvier 1937 avec pour but "la pratique du sport et la préparation militaire". Le siège est situé au Patronage Saint-Martin. Pour s'ouvrir à tous les acignolais, on note dans l'article I que "toute discussion politique et religieuse est interdite", l'article II ramène aux réalités du moment : "l'Association a pour but de développer par l'emploi rationnel de la gymnastique, du tir et des sports et par la préparation militaire, les forces physiques et morales des jeunes gens, de préparer au pays des hommes robustes et de vaillants soldats et de créer entre tous ses membres les liens d'amitié et de solidarité."

- Depuis mai 1936, Noyal sur Vilaine avait déjà son équipe "Patronage Saint Pierre". Aussi, pendant la Guerre 39/45 on regroupa le peu de joueurs disponibles Acigné et Noyal, en jouant en alternance au champ des "Clouères" haut du bourg d'Acigné ou à la "Moinerie" et aux "Forges"sur Noyal. Les cafés proches servent de vestiaires et sans doute à se désaltérer. Pour les déplacements, on utilise les vélos, très bon échauffement, ou les voitures à gazogène du docteur et du boulanger. Mais la guéguerre catholiques et laïcs repris à nouveau avec alors créations de clubs laïcs, parfois dans la même commune comme à Liffré. On arrêta le sport pendant les guerres de décolonisation. La reprise se fera sur Acigné en 1962.

 

     On l'aura observé avec les écrits rapportés par l'ouvrage d'Henri Fréville, des acteurs opportunistes de la période de la Deuxième Guerre mondiale auront nuit à la cause bretonne.

     Comment va se relever la culture bretonne?

- en 1946, Dorig Le Voyer et Polig Montjarret fondent l'assemblée des sonneurs "Bodadeg ar sonerion" qui s'appelle depuis 2014 "Sonerion" avec 10 000 adhérents dans 130 groupes www.sonerion.bzh 

 - avec une fédération "Kendalc'h" créée à Quimper qui, dès 1950, permettra de "Maintenir" un potentiel de bagadoù et cercles celtiques allant progressivement vers 15 000 membres répartis parmi 150 associations. Malgré une scission en 1967 avec l'autre Fédération, "War'l Leur", l'aire à battre ou à danser, qui réalisa 10 000 membres avec 60 groupes de danses classés et 20 groupe loisirs, en juin 2020 une grande Fédération "Kenleur" aura contracté les deux noms dans un esprit de communauté et de partage du sol. Basée à Auray, elle réunie Bretagne, Divroët et Ille-de-France avec 210 associations représentant 20 à 22 000 membres. www.kenleur.bzh  avec un agenda très chargé de présence aux Fêtes régionales  www.gouelioubreizh.bzh avec comme festival majeur www.festival-interceltique.bzh FIL Lorient 

- 1972, Le Président Georges Pompidou annonce qu'"il n'y a pas de place pour les langues et les cultures régionales dans une France appelée à marquer l'Europe de son sceau!" Rien que cela... Mais, 20 ans après, en 1992, le Président François Mitterrand, également fin lettré,  signa l'article II de la Constitution faisant du seul français la langue de la République.

- Régions : au 19ème Congrès des Régions à Saint-Malo des 27 et 28 septembre 2023, le Gwenn ha Du qui flottait à la tribune, à côté des drapeaux français et européen, était prié, par les services de l'Etat, de sortir du champ des caméras. O.F. 29/9/2023

 -  Place à l'Europe:  la Charte européenne des langues minoritaires sert de promesse électorale puis sera taclée en s'appuyant sur l'article II : il en sera ainsi avec Jacques Chirac en 1996 puis Emmanuel Macron le 19 avril 2017 qui rajoutera "Bonjour la Loire-Atlantique!", à chaque fois ce fut déclamé à Quimper. La France a signé en même temps que l'Italie une "intention" à cette Charte en mai 1999. Mais les deux pays n'ont jamais ratifié, impliquant une obligation juridique d'un Etat. Cette ratification engagerait au moins 35 actions, activités et équipements culturels, autorités admninistratives et services publics, échanges transfrontaliers, Enseignement, Justice, médias, vie économique et sociale, ... Fin mai 2021, la page Facebook d'Emmanuel Macron indiquait que "les langues régionales sont un trésor national qui ne cessent d'enrichir notre culture française." Autant de paroles, à nouveau prononcées à Quimper en juin 2018, avec le projet Girondin d'une Loi 4D, "décentralisation, différenciation, déconcertation et décomplexification". Puis rien en vue, il fallait ajouter "déconcertant".

-  Le "Moulinet d'Acigné" s'honore de pratiquer des danses de Bretagne et d'ailleurs le mardi soir dans une salle baptisée "Glenmor".

     Ce fut la première salle polyvalente avec du sport, basket, tennis de table, ...mais aussi très festive avec le premier fest-noz de mars 1980, les Roidec costumés gorgés de confettis où les artistes et fanfares joyeuses jouaient sur des plateaux empaillés dans une ambiance kermesse pour la jeunesse insouciante. Les murs étant tout d'abord décorés sur des parpaings bruts avec de pandulants dazibaos à la chinoise puis peints par les services municipaux suite à des essais colorés de jeunes du pays... Une autre salle, dite "Le Moulinet", servit d'appoint à l'occasion d'un grand fest-noz pour faire danser au regard d'un poste TV les images filmées de la grande salle à proximité!

     Il était alors grand temps de réfléchir à des plans de vraie salle des "Fêtes" : ce fut plus tard le "Triptik". Notre premier fest-noz s'y déroula le 25 septembre 2010 avec Dans'Meizë, Glaz Bihan, R'K2 et Termen.

Pourquoi une salle rendant hommage à Glenmor?

     1959 : Emile Le Scanv, Milig ar Scanv, l'enfant de paysan de Cornouaille, l'ancien séminariste de Quintin, rassemble des chansons célébrant la Bretagne. "Sa chanson dérange la tranquilité de "militants" alanguis par de faux complexes de collaboration," selon André-Georges Hamon.Le titre "Les nations" sert de détonnateur dans ce tour de chant de celui qui s'habille du nom mythique de Glenmor, "terre et mer" confondues. Fin 1959, la Bretagne a trouvé son héraut. Celui de toute une génération à lever!" en délivrant un carburant pour prendre conscience des racines bretonnes, celtes, de leurs richesses et d'en éprouver une certaine fierté...

     - En 1968, Glenmor expliquera que "De Gaulle avait dit : "nous allons aborder l'ère des nationalismes"; et il parlait pour la France. Il savait, il sentait venir, que l'homme refuserait l'unformité, le jacobinisme, que toutes les provinces de France - ce que j'appelle moi les nations de France -, les peuples de France refuseraient l'uniformisation. Un Occitan ne sera jamais un Parisien, ni un Breton. Nous avons tous nos originalités. Et la richesse culturelle du pays vient de ces différences. Voilà pourquoi notre revendication d'autonomie et d'autogestion en Bretagne est une revendication moderne et pour demain." Parlant de Chateaubriand, De Gaulle avait dit de lui "C'était un désespéré. On le comprend, il avait prévu l'avenir." Glenmor n'était pas un "désespéré"; même si son franc-parler pour dire des vérités, même avec des échecs médiatiques, lui amènent des claques dans sa carrière de chanteur, notamment chez Barclay. Il s'en défendra, invoquant  qu'"il était mieux d'exiger que l'on écoute et entende d'abord ... si j'ai perdu un public nombreux, j'ai gagné un public de qualité." L'homme n'oublie pas que le quotidien se vit auprès du peuple, dans les luttes locales et pour lequel la culture populaire se partage aussi au bistrot. Avec une profondeur philosophique il jouait du langage avec son bilinguisme en vantant le génie et la richesse de la langue bretonne.

     Depuis les années 1960, les textes de Milig, en dépit de l'insolent silence des médias, s'ancrent dans les têtes. Dans leur écho, les guitares fleurissent de gwenn-ha-du. Alors, progressivement, apparaît fière et nombreuse la filiation de Glenmor-le-solitaire.

     - Depuis ses Marches de Bretagne, Philippe Mouazan revendique haut et fort son appartenance à la fratrie. "Les feuilles tombent sur les chemins trempés qui mènent au Couesnon. La rivière tranquille coule entre deux mamelons de verdure et des aulnes géants ... Ici les vents d'automne n'ont pas la rage des galernes meurtrières. Sur une rive la Bretagne, sur l'autre, la Normandie...

     "Dans les années soixante, je parcourai cette contrée des Marches avec le même regard que les touristes endimanchés. Bocage, pâturages aux troupeaux placides dans la sérénité d'une nature endormie. A mes yeux points de différence. Puis vint Glenmor! il secoua les pommiers de mon enfance bretonne.... Milig a colmaté les voies d'eau du chalut aidé par un autre manouche de la lande, Xavier Grall. Le bateau file. La tempête est calmée"

     Selon Edmond Hervé, ancien maire de Rennes : "pour Glenmor, la liberté, c'est l'humiliation que l'on venge. Pour libérer, il a choisi d'écrire et de parler, de chanter et de traduire" Léo Ferré disait que Milig était viking, lequel lui disait "je ne vais jamais chanter en France." Gilles Servat répondra : "Dormir ce soir en Bretagne!" Son copain musicien Hervé avouait : "Etre copain avec ce gars-là, ce n'est pas drôle tous les jours, mais ce n'est jamais triste!" En 1970, Glenmor perdra un ami essentiel, le pamphlétaire du "Canard Enchaîné" Morvan Lebesque. L'ayant perdu à son tour, la Ville de Rennes dressera une sculpture de Glenmor en plein parc du "Thabor". Une revanche pour celui qui provoquera une panique des officiels de la mairie  en chantant le "Bro gozh ma zadoù" dans son salon pour invités à une époque où le breton n'y avait pas le droit.

- Un soir en 1972 avec Gilles Servat et sa "Blanche Hermine" : "on devait jouer sur la presqu'île de Rhuys dans le Morbihan, sous chapiteau. Un arrêté préfectoral avait été déposé pour nous interdire de chanter en breton. Un paysan nous a offert son champ en solution de repli. Pendant la soirée, les gendarmes sont venus pour relever les numéros des plaques de voitures. Mais on a persévéré et les gens voyaient qu'on chantait en breton et qu'on n'était pas punis. C'était les années post-68, la langue s'est développée, la jeunesse commençait à s'y intéresser.Il y avait un fossé entre cette jeunesse bouillonnante qui redécouvrait la culture bretonne et une autre frange qu'on appelait les "Bretons d'avant", avec parfois une langue bretonne considérée d'extrême droite. Cette image a changé quand, avec Tri Yann par exemple, nous sommes devenus solidaires des ouvrières lors de la grève du "Joint français" en 1972. Nous avons chanté en les soutenant." O.F. 29/7/17

- 1972 : avec Alan Stivell, Dan Ar Bras, Tri Yann et donc Gilles Servat, on les désigne comme "pères refondateurs de la culture bretonne". Mais, 1972 c'est aussi la création de "Britanny Ferries" (Alexis Gourvennec, SICA St Pol de Léon, CCI Morlaix), des révoltes sociales avec la "Guerre du lait", pour une juste rémunération, et le "Joint français" de Saint-Brieuc... annonciateur du combat contre la centrale nucléaire de Plogoff dans le Finistère entre 1978 et 1981 et qui sont dans la lignée de révoltes de la jacquerie de Plouyé dans le Poher en 1489 avec ce massacre de paysans armés de fourches dans ce "pré des mille ventres" ou des Penn Sardines des douarnenistes de 1924.

- 1972 : l'Olympia d'Alan Stivell à Paris le 28 février. On dit qu'après ce concert les Bretons cessèrent d'avoir honte de leur culture! Formé à la harpe et au piano dès l'âge de 9 ans, Alan apprend le breton avec des scouts. Devenu professionnel avec le nom de Stivell il comprend que les influences multiculturelles des Beatles peuvent se développer en Bretagne. Sa rencontre de Bénodet avec Daniel Le Bras, futur Dan Ar Bras, sera déterminante. Le guitariste amateur de Van Morrison et Rory Gallagher amènera une modernité anglo-saxonne. Si son premier album "Reflets" en 1970 et sa "Renaissance de la harpe celtique" de 1971 sont traditionnels, il avance vers la fusion électrique folk/rock celtique. Chanter en breton n'a plus rien de ringard, un vrai choc psychologique qui fait vibrer sept millions d'auditeurs sur Europe 1, au concert du Vieux Colombier, avec ce harpiste de 28 ans avec ses cheveux longs, sa chemise de lin et son énorme triskell porté en collier, entouré de huit musiciens. Le vinyle "A l'Olympia" de mai 1972 s'écoule à plus de deux millions d'exemplaires et reste 50 semaines dans le top 50. "Bretons", mars 2022

- Ce réveil culturel et social s'accompagne cependant de celui de la politique extrême avec l'attentat de Roc'h Trédudon attribué dans la nuit du 13 au 14 février 1974 au Front de Libération de la Bretagne, qui le revendique, mais opportunisme ou réalité? L'émetteur situé à Plounéour-Ménez dans le Finistère fut détruit par des bombes privant l'Ouest de la Bretagne de télévision pendant plusieurs semaines. Avec une réelle renaissance du mouvement nationaliste breton cet attentat déclencha de vives réactions quant à la véritable identité des auteurs qui ne seront jamais retrouvés. Cette action ne pouvait être réalisée qu'avec des professionnels aguerris au maniement des explosifs, comme ces militaires qui faisaient des manoeuvres au même moment. LA DST, Direction de Surveillance du Territoire, pouvait également en être. Elle avait déjà détruit la villa de Francis Bouygues à Saint-Malo en 1972 en maquillant son action sur le dos du FLB qui fut toutefois très actif entre 1966 et 1972, avec plus de 27 attentats ou tentatives qui s'étaient estompées en 1973. Sa période la plus marquée durera ensuite jusqu'en 1979, dont l'attentat de Versailles du 25 juin 1978 avec la dégradation d'une partie de l'aile gauche du château. Quant à l'attentat d'avril 2000, au Mac Donald de Quévert dans les Côtes d'Armor qui tua une employée, il fut attribué à la vitrine légale Emgann de l'Armée révolutionnaire bretonne, faisant suite à d'autres actions à Plévin, Rennes et Pornic. L'explosif employé dans trois lieux était identique à celui dérobé sept mois plus tôt par des militants basques et bretons déjà interpellés. Mais, après acquittement par la Cour d'Assise spéciale de trois hommes soupçonnés, on ne sait toujours pas qui a posé la bombe à Quévert et pourquoi. 

     Les "30 Glorieuses" de 1945 à 1973, année du "choc pétrolier", seront celles de la forte croissance, de l'Etat providence et de l'augmentation du niveau de vie. Mais toutes les régions ne sont pas logées à la même enseigne. En Bretagne bocagère, la mécanisation agricole demande moins de main d'oeuvre. Le remembrement participe à des espaces plus conséquents pour les cultures mais oublie de faire replanter de nouveaux talus. On en voit de nos jours les dégâts écologiques. On assiste à des départs de bretons vers le Québec, eldorado des années 1960, faisant oublier les années de service en Algérie. Les "yéyés" s'opposent aux "blousons noirs" et tout finit en mai 1968 dans la confusion mais aussi par un vrai changement d'époque.

     Alors, Bretagne Terre d'accueil et/ou d'émigration? selon Anne Morillon, docteure en sociologie, "c'est une hypothèse de travail. Le fait que la culture et la langue bretonne ont longtemps été considérées comme "arriérées" permet d'expliquer une empathie avec l'étranger minorisé. Mais, en Bretagne, face aux réfugiés espagnols qui fuyaient le Franquisme, il y a eu des phénomènes de rejets comme ailleurs. Récemment les gens qui ont fait annuler l'accueil des réfugiés à Callac (22) n'étaient pas tous bretons mais l'obsession actuelle ce sont les réfugiés, les étrangers. A l'inverse, on peut noter cet énorme élan de solidarité pour accueillir les "Boat people" des années 1970. Le catholicisme social, le syndicalisme plutôt classé à gauche et le dynamisme associatif ont été des vecteurs d'intégration.

     Terre d'accueil au XVIIè siècle avec l'arrivée d'Irlandais fuyant la soumission de l'île par Cromwell. Au XVIIIè on voit arriver des Vénitiens, des Gênois, des Portugais ou des Espagnols à Morlaix et à Saint-Malo. Lors de la Première Guerre 1914/18, les hommes sont partis au front alors que l'industrie de guerre marche à plein. Les étrangers arrivent, on le voit dans les arsenaux, mais il n'y a pas forcément appel à la main d'oeuvre étrangère et ce n'est pas une immigration d'installation comme on le voit après la Seconde guerre. A cette époque, il y a un appel pour reconstruire le pays. Dans les années 1970, il y a l'immigration de travail avec le regroupement familial, surtout dans les grandes villes. La noria des travailleurs étrangers qui venaient trois mois pour travailler puis retournaient au pays, puis revenaient, n'était plus possible. Avec le durcissement des conditions d'accès, ils ont du choisir entre rentrer définitivement au pays ou faire venir leur famille.

     Dans les années 2000, on aura une augmentation du nombre de personnes qui fuient leur pays, suite à la Chute du mur de Berlin avec les pays de l'Est, mais aussi conflits Arméniens, Tchétchènes, Ivoiriens, Guinéens, nord du Mali,... également pour les femmes excisions ou mariages forcés... En 2020, les étrangers venaient surtout du Royaume-Uni, Maroc et Portugal. Au total c'est 4% de la population. Les Bretons estiment avec 63% d'avis qu'il "n'est pas indispensable d'être né en Bretagne ou de parents bretons pour devenir breton si on aime la Bretagne." La Bretagne est aussi marquée par l'émigration. Entre 1850 et 1920, plus de 500 000 Bretons ont quitté la région pour fuir la pauvreté." O.F. janvier 2024 

 - En Haute-Bretagne, naissance de "La Bouèze" en 1979 sur les bords de la Rance avec Yves Defrance, jeune enseignant de musique et futur professeur à l'Université de Rennes 2. Il aura collecté dans les campagnes des airs de "violoneux, la plupart nés avant 1900. Avec deux autres passionnés, il fonde une association pour éditer des livres et des disques pour faire découvrir ce patrimoine méconnu. Les Rennais jouaient alors de la musique du "Finistère"! En 1980, le chercheur en ethnomusicologie croise le chemin de Bernard Hommerie et de Pierrick Cordonnier, chanteur et accordéoniste diatonique qui organisaient des bals bretons mettant en valeur les musiques du Pays de Fougères. Les accordéons étaient auparavant laissés dans les armoires. Tout le monde était fasciné par ce qui se passait en Basse-Bretagne sur une ligne Vannes - Saint-Brieuc. La bouèze, du nom d'une cornemuse disparue après la Révolution, désignait l'accordéon diatonique qui a commencé à faire de l'ombre au violon à la fin du XIXè siècle www.monviolon.org . Celui-ci permettait de jouer des danses redécouvertes, comme l'"Aéroplane d'Acigné", qui changeaient des danses musettes de l'accordéon chromatique.Un groupe chants, musiques et danses s'est créé, dans la foulée d'un collectage avec le "Club Acignolais" en 1979 qui organisera son premier fest-noz en mars 1980 puis deviendra "Le Moulinet", nom d'une autre danse recueillie. Entre 1983 et 1988, des "Rigodailles" envahissent la Maison de la Culture en plein centre de Rennes, l'actuel TNB. C'est le grand renouveau de la culture rurale qui envahit le monde urbain du Pays dit "Gallo", lequel associait la langue gallèse avec Henriette Walter à l'Université de Haute Bretagne. De nos jours, "Ferme des Gallets" à Rennes www.laboueze.com lieu de contact tout comme la "Ferme de la Harpe" lieu d'accueil du Cercle Celtique. La Haute-Bretagne ne pourra jamais égaler la richesse et l'importance de la culture traditionnelle de la Basse-Bretagne. Elle se réjouit cependant de nos fêtes majeures comme le "Carrefour de la Gallésie"à Monterfil , le prix Froger-Ferron à Parcé, près de Fougères, la "Bogue d'Or" dite "Teillouse"de Redon, "Sevenadur" et le plus grand fest-noz de Bretagne à Rennes www.yaouank.bzh organisé par www.skeudenn.bzh infos sur  www.wiker.fr/skeudenn 

-  www.dastum.bzh 1972 : sauvegarde, transmission chansons, musiques, contes, proverbes, récits...120 000 documents sonores recueillis et 50 000 iconographiques.Lien avec la revue "Musique bretonne".

- Depuis, avec l'aide de la Région www.bretagne.bzh , Bretagne, Culture et Diversité, basée à Lorient,  est un très important et précieux centre-documentation pour les amateurs de la culture bretonne www.bcd.bzh ses tutos danses sont remarquables, quoique pas assez nombreux.

- la conservation www.cinematheque-bretagne.bzh  à Brest 

- Rennes dispose d'un espace intéressant aux "Champs-Libres" www.musee-bretagne.fr avec centre documentation et expositions, conférences

- Pour les langues de Bretagne www.diwan.bzh www.institutdugallo.bzh www.academie-du-gallo.bzh www.chubri-galo.bzh www.bertegn-galezz.bzh ; avec une course empruntée aux Basques pour soutenir les langues de Bretagne www.ar-redadeg.bzh et meilleure vision langues du monde www.axl.cefan.ulaval.ca (accord Jacques Leclerc Laval Québec)

- Allons aux nombreux festoù-noz ou festoù-diez  danser, écouter les musiques traditionnelles bretonnes en consultant le site www.tamm-kreiz.bzh de Saint-Brieuc. Le bal breton peut aussi s'associer aux autres danses régionales avec des bals folks ou trad' www.agendatrad.org   et www.accrofolk.net 

- dans les médias, le journal Ouest-France n'arrive pas à produire une feuille quotidienne uniquement basée sur la culture bretonne. Mais, régulièrement, des articles réalisés par des journalistes spécialisés offrent des approches intéressantes sur notre Patrimoine vivant et riche, et tellement admiré dans les autres régions françaises. Comme disait Victor Hugo en 1836 :" Quand vous leur dites que leur ville est belle, charmante, admirable, ils ouvrent d'énormes yeux et vous prennent pour un fou. Le fait est que les Bretons ne comprennent rien à la Bretagne... quelle perle!" Et que dire de ces municipalités qui n'arborent pas fièrement les drapeaux bretons, européens et français à leur balcon de mairie ? Sont-ce des maisons purement administratives sans vie et sans âmes? 

- Une revue marquante www.bretons.bzh  et plus politique www.lepeuplebreton.bzh  avec des éditeurs www.coop-breizh.fr et www.skolvreizh.com On peut aussi s'informer www.abp.bzh et www.nhu.bzh 

- un sujet majeur reste en attente avec la "Réunification de la Bretagne historique" dans ses cinq départements, actuellement privés de la Loire-Atlantique www.bretagnereunie.bzh et s'appuyant sur une pétition de 2018, signée par 105 000 habitants de Loire-Atlantique,  le label Breizh 5/5 affiché par une centaine de communes et le conseil régional de Bretagne, les revendications à Nantes portées par son adjoint aux Enjeux bretons, A la Bretonne! 23 Cercles celtiques de Pornic à Clisson, une culture bretonne restée vivante après 80 ans de non-enseignement scolaire en Pays de la Loire et de nombreux défilés et actions diverses. 

     Pourtant, 2 juin 2014, Président François Hollande, 17H30 Bretagne historique réunie. 18H30, intervention attribuée au premier ministre BZH+Pays de Loire, Jean-Yves Le Drian, ministre ancien président région Bretagne,  écarte l'idée sans pouvoir acter la réunification avec la Loire-Atlantique... La Bretagne reste avec ses quatre départements. Marylise Lebranchu, bretonne en charge de la réforme territoriale! avouera : "nous n'avons pas été bon!" et François Hollande dans son livre "Les leçons du pouvoir" : à la fin des fins (entre 18H30 et ...?),  j'étale la carte de la France sur la grande table de mon bureau et, armé d'un crayon et d'une gomme, je propose un nouveau découpage de la France...".

     Signe des temps nouveaux, fin septembre 2023, c'est la première fois qu'un Président français, Emmanuel Macron, évoque le terme d'Autonomie devant l'Assemblée corse. Cette ouverture a été aussitôt saluée par les présidents de Régions, à commencer par le breton Loïg Chesnais-Girard qui a réclamé "la même chose" pour s'affranchir d'un "centralisme passéiste". Beau cadeau médiatique pour l'UDB (Union Démocratique Bretonne) qui fête ses 60 ans (1964 - 2023). Présente au Conseil régional avec son groupe "Breizh a-gleiz" et à l'échelon européen dans l'Alliance libre européenne (ALE), elle réclame depuis toujours l'Autonomie pour une Bretagne réunifiée dans le cadre d'un statut particulier (modèle britannique), ou Autonomie à la faveur d'une évolution générale de la France vers le fédéralisme (modèle allemand), ou encore statut particulier dans le cadre d'une régionalisation à pouvoir législatif (modèle espagnol). www.lepeuplebreton.bzh 

     - Paul Molac, député du Morbihan, groupe Libertés et territoires, aura apporté à l'Assemblée nationale une proposition de loi sur la protection patrimoniale des langues régionales en février 2020. Son habit breton, porté comme jadis par le paysan de Montgermont Le Père Gérard en 1789, n'aura pas eu la suite méritée. On lui reprocha sa "critique de la République et de la Révolution française, un combat d'arrière-garde." 380 000 élèves étudient les langues régionales en France.

     Place au Gallo! La première revendication pour le gallo à côté du breton, pas à sa place...eut lieu en octobre 2022, se basant sur une enquête linguistique de 2018 qui comptabilisera en Bretagne 191 000 locuteurs de gallo et 207 000 en breton. "Le breton est promu, mais à faible dose, et le gallo n'a encore aucune place." est-il rappelé. Toutes les communes sont traduites en breton avec "Egineg" (aucune traduction devinée!) pour Acigné et "Acignaë" Payz de Renne en gallo. Début 2023 on installe six panneaux "Gwitreg" à l'entrée de Vitré en plein pays Gallo; on oublie d'y mettre des panneaux en Gallo. En réaction, une Brigade "Albert Poulain" les déplace jusqu'à Carhaix, ville de Christian Troadec, adjoint aux Langues de Bretagne à la Région. Puis ce fut l'affaire des panneaux de Liffré, ancienne commune où le président du Conseil régional fut maire. Trouvant ainsi une idée pacifique et populaire, les Jeunes agriculteurs ont revendiqué fin 2023 avec des panneaux inversés tête en bas.

- les transports aériens sont surtout concentrés à Brest et à Nantes, ce dernier aéroport limité en espace au sol n'offre pas l'envergure internationale suffisante; les Bretons et Vendéens se doivent alors d'aller régulièrement à la capitale Paris au détriment d'une écologie dans l'air du temps.

- la mode façon Bretagne www.pascaljaouen.com  www.nolwennfaligot.fr et www.stered.eu 

- Pour approfondir ses connaisances sur la Bretagne et les Pays Celtiques, un Diplôme d'Etudes Celtiques est préparé sur une saison le jeudi à l'Université de Haute-Bretagne à Rennes. Il est particulièrement destiné aux jeunes retraités, mais pas seulement...L'association "Kendeskin" est très active pour soutenir vos démarches et animer nombre d'actions avant, pendant et après.

- Alors qu'à la fin des années 1970 seulement un quart des jeunes passaient leur "Bac à lauréat", la Ville de  Rennes, disposant des campus de Rennes I et Rennes II, puis "Ker Lann" à Bruz,  aura su attirer de nombreuses écoles supérieures privées. Début 2 000 on comptait environ 55 000 étudiants rennais, dont 6 600 pour le privé. En 2022/23, Rennes est classée 8ème ville étudiante de France, dépassant les 80 000 étudiants dont 22 000 dans le privé avec 18 établissements et 7 700 étudiants au Nord Ouest, dont 5 000 à Rennes School of Business qui délivre ses certifications internationales pour ses masters et MBA. 27 écoles occupent le centre de Rennes pour 4 300 étudiants, 4 200 dans 13 écoles secteur sud-est. Enfin 12 écoles à "Ker Lann" pour 4 000 étudiants. Les secteurs sont variés : Institut catholique, Ecole catholique arts et métiers, commerce Aforem ou Aftec, kiné, podologie, ergo IFFPEK, vétérinaire UniLaSalle, ... Plusieurs Ecoles d'intérêt national y sont présentes.

     Le nombre d'étudiants baisse en France en raison de la baisse de la  natalité amorcée dès 2005 - 2006. Mais on sait que Rennes est très attractive, contrairement à Nantes à l'ambiance difficile. Une centaine de nationalités y sont représentées. L'ouverture à l'accueil sur Rennes d'ukrainiens, indiens ou américains est amorcée. Récemment,  Rennes et la French touch des métiers créatifs attire avec l'ESMA, école supérieure des métiers de l'animation et l'implantation de "l'école d'art Icônes", mais aussi l'école de design l'Iffdec ou l'école d'art appliqué Pivault vers le quartier Baud Chardonnet. On y trouve également l'école des métiers du cinéma d'animation, des prises de vue réelle CinéCréatis. Le quartier de la gare est destiné à contenir à partir de 2026 plusieurs grands bâtiments de plus de  huit étages et tout un environnement d'accueil étudiants école d'art, avec résidence, salle de sport, d'expo, cinéma, restaurant/bar, co-living.

 

- Toutes nos régions et pays de France nous disent aimer la Bretagne, son maintien de traditions et de valeurs, ses paysages sublimes... La Bretagne a toujours gardé son dynamisme, son esprit "fêtes" concrétisé par ses défilés costumés, ses Rave-Party, ses festivals permanents, son imagination vivante et renouvelée.

    

     

 

 

 

 

 

             

 

 

     

 

 

     

Le Pommé, une tradition de Haute-Bretagne ! 

                                                                                                                                                                           387090881 801632125304692 8530127183740323323 n

                                                                                                 L'équipe Inter-associations pour la bonne réalisation du Pommé 2023 à Acigné (©Photo Serge Barbot)

Pour des compléments d'infos contactez le Vice-Président et bouézou du "Moulinet" d'Acigné  Aloïs ROBINARD 06 88 61 70 43  Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.


     Le " Pommé" est une réduction épaisse faite à base de pommes et de cidre doux.Traditionnellement fabriqué à l'automne, il a parfois remplacé le beurre dans les périodes difficiles comme durant la Seconde Guerre Mondiale. Depuis les années 1970, il revient sur le devant de la scène dans le Pays du Coglais, du Couesnon et de Rennes notamment à la "Ferme de la Bintinais", mais aussi dans les Côtes d'Armor.

     Le "beurre du pauvre" est devenu ambassadeur du patrimoine.

    Généralement, les ramaougeries de pommé sont organisées dans les granges, dans les fermes. Elles s'accompagnent de chants, de musiques et bien sûr de danses très variées. Les conteurs disposent du temps calme de la nuitée pour dévoiler toutes leurs histoèr's des campagnes profondes, les écoutants étant alors éblouis par les personnages évoqués près des chaudes flammes de la cuisson et ses effluves parfumées. 

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Sur cette photo : Louise Guilard, habitante d'Ercé près Liffré aujourd'gui âgée de 92 ans, qui pratique la confection du Pommé au sein de l'association Gallo-Tonic de Liffré.

Depuis la Seconde Guerre Mondiale, Louise confectionne le pommé, autrefois avec ses parents, en famille.

Dans les années 80, dotée d'un savoir-faire sur la tradition du Pommé, Louise participe et veille à la confection du Pommé organisée par l'assocation Gallo-Tonic, en présence de son fils Francis, conteur reconnu dans le pays Gallo.

Louise Guilard est très connue dans le monde du Pommé. On lui souhaite encore de nombreux pommés.

Le "Pommé" d'Acigné, Ferme de la Motte : samedi 21 et dimanche 22 octobre 2023

voir les photos du samedi 21  et les photos du dimanche 22, et  la fête du pommé 2023 par Acigné Autrefois.  

   Coordonné par Thierry BESNARD, Co-Président, avec les associations Acigné Autrefois, Folk'N Breizh de Noyal/Vilaine, Gallo-Tonic de Liffré, La Nouzille de Châteaubourg, La Rimandelle de Châteaugiron, Oxygène de Brécé, Tisseurs de contes de Rennes. Le samedi fut doux et pluvieux. Les panneaux fléchages et parkings de Dominique furent positionnés de bon matin par Loïc et Pierre. A partir de 10H00, atelier galettes de sarrasin de Gilles. L'épluchage des 427 kg de pommes "Petit jaune", des  Vergers Miltan Cranne de Domagné, se réalisa à partir de 14H sous le chapiteau (8 x 16 m) avec une soixantaine de personnes. Dans la grange décorée de toiles pomologiques de Martine et de l'Atelier Arts plastiques de Cesson, film en boucle sur la Fête d'Automne 1997,  lancement de la cuisson du jus de pommes par Yannig dans la bassine en cuivre (pelle) empruntée à Rimou. Jean-Yves n'était pas loin. L'an passé, un pommé s'était réalisé chez lui à Servon.  Abel gérait tranquillement la confection de gelée. A l'extérieur la buvette était calme, Pierre et Loïc s'impatientaient tandis qu'André faisait sentir la bonne odeur des saucisses grillées,conservées ensuite en cocotte-minute. Progressivement la grange fut animée par des musiciens,  Abel, Aloïs, Anne-Marie, Martine, Michel (2), Nicolas, Yannig et l'équipe Gallo-Tonic... D'autres bénévoles, Alain, Christine, Eliane, Françoise,  Hervé, Jeannine, Marie, Martine, Marylène, Monique (2), Nadine, Nicole, Olivier, Odile, Serge, Sylvie,Yolène s'affairaient ici et là à la vente des gâteaux, boissons, galettes saucisses et tâches diverses. Véro préparait sa bonne soupe avec l'apport des légumes amenés par l'assistance. Un vrai travail esprit Collectif avec Jacques à la prise des photos. Bernard et Nicolas géraient avec attention la sono. Sous le chapiteau, des panneaux de l'Asso"Les Ramaougeries" présentaient le "pommé" dans ses généralités. Après un repas partagé, le fest-noz pouvait commencer, les pas s'emballaient avec rebonds sur le parquet de bois, Gilles étant maître de cérémonies pour les passages artistes. La nuit s'animait peu à peu des sonorités de chants et musiques de Bretagne dans ce cadre magnifique près de la Vilaine : Christine et Serge, La Marmithe, Les Lif'fredaines, Duo trad (Aloïs/Catherine), Gwak , Les Ribots, les Grabotins (Didier/Thierry) et Gilles guitare/dulcimer. La ramaougerie se prolongea dans la nuit avec Marie, Martine, Serge et Yannick qui se relayèrent au ribot...

      Le dimanche midi, les bénévoles furent largement récompensés par un soleil radieux. Un bon poulet grillé aux "Volailles du Pâtis du Moulinet" de Thorigné fut le bienvenu avec de petites pommes de terre. Il fallut accélérer car le public arriva très nombreux dès 14 heures. Une sensibilisation au gallo par l'atelier gallo de la MJC Servon avait été effectuée dans nos deux écoles primaires la semaine précédente et des familles entières s'étaient déplacées. Les articles de presse d'Aloïs dans notre Ouest-France, ainsi que le direct sur France Bleue Armorique par Thierry attirèrent une foule venue des alentours et des anciens acignolais exilés de leurs commune d'origine.

     Puis tout s'enchaina dans la bonne humeur partagée : un accueil avec Jean-Claude, du veil'zinaïj, prêteur de bersoule, et des collectionneurs de voitures anciennes, les 8 conteurs sous le barnum récupéré par Marie-Jo au faiseur de pommé, Jean-Luc de Bourg-des-Comptes, les trois récits de la Motte féodale avec Acigné Autrefois, Françoise, Georges et Jean-Jacques, les jeux en bois pour enfants de Ludo Poisson Lune, le film "Pommes, pommes.." d'Antonio Allogio projeté dans le pressoir, le fest-deiz avec Albert, Nicolas,  les Goulettes, Bal à 4, Enter'Nous, Dans'Meizë Trio/Lavigne, Goustadig.

     Vers 16H00, les patons du boulanger des Clouères étaient cuits. Depuis la veille, le feu du four communal était entretenu avec des fagots par Alain et Philippe. Le pommé pouvait désormais être proposé avec 230 pots pour 5 euros. Le beau temps permanent aidant, la buvette fut assaillie, les galettes-saucisses et crêpes ou gâteaux des bénévoles partaient comme les petits pains... Notre trésorière Monique était radieuse : les comptes seraient à l'équilibre. Elle eut une pensée pour les aides de la municipalité, du CMB et Thélèm... Au lendemain, le démontage général se réalisa sous le soleil. Tout aurait été au mieux sans un léger enlisement d'un camion et des frelons attirés par de petits morceaux de pommes.

     Mi décembre, une réunion Inter-Assos décida d'attendre mi-octobre 2025 pour probablement renouveler un pommé. 

Lien vidéo du pommé d'acigné: Fête du Pommé à Acigné, 21 et 22 octobre 2023. (youtube.com) Cliquez !

Le "Pommé" d'Acigné, Ferme de la Motte de 1992 à 2012 

On peut retrouver ce "pommé" façon Gallo-Tonic de Liffré 1992/2012 sur notre site www.lemoulinet.bzh ,rubrique Vidéos-photos "Film Fête d'Automne Acigné" (YouTube). Cette fête était appuyée par la Municipalité et son Adjoint à la Culture Bernard Corlay. De nombreuses associations y contribuaient sous l'égide de l'Office Culturel. Les animations à la ferme de la Motte s'étalaient sur trois jours.

     Une grande randonnée pédestre préparée par Alain Gouaillier permettait de découvrir la campagne le samedi après-midi avec une thématique et des lieux différents, mais à chaque fois un arrêt bienvenu cidre/jus de pommes dans une ferme. Quelques souvenirs en 20 années de randos : un beau temps constant avec, selon la presque légende, une seule averse tombée par erreur, une fois, en tout début d'après-midi! Citons quelques acteurs et lieux : Albert Poulain vers le four du Chesnais et déclamant au Pont au fèvre, la descente en radeau/kayak sur la Vilaine, partant de la Moinerie,  avec des chanteurs "Boulinerien" de Plozevet et un couple de biniou bombarde (dont Lannig). La rando-théâtre costumée de 1996 avec la légende "La malédiction du château d'Acigné" et celle de 1997 "Ca va barder!" avec le guide Franck, le barde André et Saint-Martin à cheval, les prairies de "Gould'Oeuvre" ou le beau village de"Vernay" avec le maire Guy Jouhier, la traversée du Pont Briand,  les musiques baroques et médiévales "Granges"  vers les "Prés Hauts" et la "Cour au Bourcier" avec l'AMHV... 


 Si le vendredi soir était confié aux conteurs et aux joutes, le "Moulinet" prenait place le samedi soir et surtout au fest-deiz du dimanche avec "Termen" : Thierry Besnard violon, chant, Martine Boutard accordéon diatonique, Hubert Jumel veuze, flûte, Roger Négaret clarinette, chant, bodhran, Thierry Toquin guitare, parfois Lanig Jumel bombarde.

     Parmi les animations régulières : le four à pain, la grillée de châtaignes de la rue Seica Mare avec des harassouères sur l'île, les artisans et exposants croqués par l'artiste Charles Montigné, le palet du Club de l'Amitié, les jeux pour enfants, ... 

 

 

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Le Pommé de l'Auberge du Pont d'Acigné (2018-2021)

 De 2018 à 2021, Antoine Guillemot, fils du chef gastronome Sylvain Guillemot et Aloïs Robinard, bouezou et sonneur au Moulinet d'Acigné ont organisé 4 petites ramaougeries de pommé à l'Auberge du Pont d'Acigné. Plus de détails en cliquant ici.

Le pommé pour l'émission "Météo à la carte"

Le pommé en Clic  video au Vieux Viel 35. 

Laurent Fabry, secrétaire des "Ramaougeries de pommé" du Couesnon Marches de Bretagne - 35 Maen Roch/St Brice-en-Coglès  : "Vendredi 17 novembre 2023 ,deux journalistes de France 3 sont venus à Vieux Viel faire un reportage sur le pommé pour l'émission "Météo à la carte" qui passe en semaine entre 13 et 14 heures. Ce documentaire tourné au Pressoir de Henwiel présente toutes les étapes qui conduisent à sa fabrication, depuis le ramassage des pommes jusqu'aux préparations culinaires, en passant par le pressage et l'épluchage, la réduction du jus et la longue cuisson traditionnelle tout en n'oubliant pas de ramaouger constamment." https://lesramaougeries.fr 


Deux cités revendiquent le renouveau du "pommé" :Bazouges sur Pérouse, Bâzouj https://bazougeslaperouse.fr 

et Gallo Tonic de Liffré https://gallotonic.org 

Sur Acigné, dans le bas du bourg, des habitants se réunissaient au début des années 1960 pour faire un pommé... c'était familial et en voisinage.

Les différentes étapes du pommé par l'association Gallo Tonic de Liffré

Elles sont  décrites dans ce document. (cliquez SVP). Contact : 02 99 23 54 57.

1ère étape :

Ramassage des pommes ,environ 450 kg :  250 kg à éplucher, épépiner et couper en fines lamelles si possible, 200 kg pour le jus de pommes. Choisir des pommes à cidre douces pour le cidre et des pommes à couteau pour le rajout. Nombreuses variétés selon les lieux de ramassages ou d'achats. 

Temps de ramassage: 2-3 bonnes heures. Tout dépend du nombre de personnes présentes, cela peut être rapide.

L'idéal est de les ramasser quelque jours avant pour qu'elles ne soient pas trop pourries le jour de l'épluchage( surtout les pommes à couteau).

2ème étape :

Installation de la pelle et du fourneau :  bassine en cuivre, ribot pour mélanger, bois, fagots, bacs pour mettre morceaux pommes et les pluches, spatules en bois, sécurité avec une plaque pour ne pas tacher le sol.

3ème étape : Pressage des pommes.

Broyeur à pommes, pressoir, paille (Ercé-près-Liffré, photos Anne-Marie Friction)

Pots à lait pour récupérer le jus (ou autre contenant). Durée 2 - 3 heures

150 litres de jus pour ramaougerie Gallo Tonic, 200 litres pour méthode Bazouges avec réduction de jus plus importante.

4 ème étape : de 15 h à 18 h

Réduction du jus de pommes dans la bassine pendant 3 heures environ méthode Gallo-Tonic.

A noter qu'à Bazouges, il réduisent le jus pendant 12 heures puis 12 heures à remuer les pommes. La durée reste la même, 24 heures minimum !

A Cuguen près de Dol de Bretagne, leur pommé dure plus de 30 heures !!! Ils réduisent le jus de 20 h 00 à 14 h 00 soit 18 heures de réduction.

5ème étape :

Méthode Gallo-Tonic : ajouter des pommes à partir 18 h 00  et ce toute la nuit jusqu'à 10 h 00 le lendemain matin. Soit environ 150 kg de pommes ajoutées progressivement dans la bassine.

6ème étape :

De 10 h 00 à 16 h 00, réduction du Pommé, bien maintenir le feu !

La texture doit réduire d'au moins 15-20 cm dans la bassine pour obtenir une marmelade qui tiendra bien sur du pain.

Action récompense , le Ribot doit tenir debout au milieu de la bassine ! Joie de satisfaction du faiseur...

Vers 16 h 00- 17 h 00, le pommé est prêt !

7ème étape : Mise en pots.

Nota : la bassine en cuivre de Rimou ( M. Dardennes) est légèrement plus grande que celle de Gallo Tonic.

Prévoir des étiquettes pré-imprimées pour coller sur environ 300 pots.

 

 

 

 

Acheter des pots neufs (car on peut avoir des soucis avec l'hygiène). Selon la grandeur et le contenant du pot, le prix de vente varie.

On le trouve généralement autour de 5 euros. 


Recette Gallo Tonic Liffré/Ercé :

24 heures de cuisson dont 3 heures de réduction= 110 litres de jus + 16 heures d'ajouts de pommes, et les 6 dernières heures à remuer pour réduire le contenu jusqu'à obtention d'une bonne confiture sans sucres ajoutés! 

Pommé de couleur marron clair, avec un goût léger de pruneaux.

 


Recette vers Bazouges, Tremblay: depuis 1974

24 heures de cuisson : 12 heures de réduction=200 litres de jus + 6 heures d'ajouts de pommes et les 6 dernières heures à remuer pour réduire l'ensemble.

Pommé de couleur marron très foncé, avec un goût  léger de pruneaux et plus marqué en sucré.


Recette Cuguen :

30 heures de cuisson :  18 heures de réduction= 250 litres de jus + 6 heures ajouts de pommes, et les 6 dernières heures à remuer en rajoutant du jus de pommes froid.

Pommé noir, très foncé, avec un goût très fort caramélisé.


Le choix des pommes

Quévert dans le 22 organise depuis 1984, début novembre,  une "Fête du patrimoine fruitier" avec Conférences, exposition pomologique avec identification de fruits (+ de 600 pommes à couteaux et à cidre), concours identification pour les enfants de 6 à 12 ans, Conseils techniques, greffages, pressoir à l'ancienne, chargement du fût, distillation et alambic, animations et concours de gâteaux à base de pommes et de cidre amateur, fabrication du pommé, recettes à base de pommes, paniers et art floral et fruitier, dégustations de pommes crues, de compotées et gelées à base de variétés anciennes, également marché d'automne, des poires, châtaignes, noisettes et autres fruits d'automne, cercliers, tonneliers et vanniers, vente de livrets et fiches techniques... Organisation www.mordusdelapomme.fr  1, rue du Val 22100 QUEVERT Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser. 

et regardons sur https://www.maisoncidricoledebretagne.bzh , interlocuteur régional de la filière auprès des pouvoirs publics, des interprofessions nationales et des instances diverses. Le "cider" et ses différentes composantes sont actuellement en débat dans les instances européennes. L'Union, les Unions font la force et renforcent la qualité et la durabilité.

Concours régional en juin dans un des cinq départements historiques de la Bretagne . Dans nos festoù-noz d'Acigné ou Rennes, on aime se ravitailler en cidre et jus de pommes au "Drugeon" La Bouëxière et à Bédée dans la famille Berthelot http://www.coat-albret.com

ceci est un test vvvvv

 

 

  I - Acigné  en 1979, 2 500 habitants (chiffre équivalent à la population de 1826),  début des cours danses; Mars 1980 premier Fest-Noz, ...

      Depuis 1963 le Foyer paroissial Saint-Martin accueille les animations culturelles de la commune. L'équipe locale de théâtre "Les Arlequins"  tient une place importante. Au début des années 1970, les deux salles latérales s'ouvrent aux jeunes avec du ping-pong, billard, baby-foot, jeux de société. Un téléviseur noir et blanc permet de regarder les aventures de Thierry la fronde, Rintintin et Zorro.Tout ce petit monde passe du bon temps avec un système de gestion du bar tenu par des volontaires. Les dépenses courantes sont prises en charge par des collectes de journaux et cartons et surtout les soirées sketches, groupes musicaux, danses présentées par les jeunes aux vacances de Pâques. La grande salle familiale est toujours au complet. En 1973, la municipalité gère le "Foyer". Il n'y avait pas d'animateur salarié, que de l'autogestion qui avait la chance de bien fonctionner. L'association du cinéma "Le Foyer" ne sera créée qu'en 1984.

     Novembre 1978 : Alain GOUAILLIER et Jean-Michel TANFIN déposent des affiches dans les commerces du bourg. Il était écrit en grand :  "Du Nouveau!" au local bibliothèque et on y indiquait des projets d'activités culturelles avec le "Club L'Acignolais" dont une section de troc disques et prêt de cassettes audio. En parallèle, un hall d'affichages proposait des activités à Acigné, Rennes et la région, une exposition philathélique et même des démonstrations de techniques de karaté! La bibliothèque d'Acigné était alors située dans une vieille maison en haut de la rue de Calais. Elle était prêtée par un particulier. Un petit local disposant d'une cheminée fut aménagé durant l'été 1978 avec des fonds privés (peinture, électricité, ramonage, ...). L'idée était de s'en servir le samedi et dimanche pour attirer la population et lancer de nouvelles activités. Ce prêt musical était complémentaire au prêt de livres et assurait des allées et venues des adhérents. L'argent récolté servait aux nouveaux achats. Radio Armorique était omniprésente; les radios locales n'arriveront en pirates que peu après et 1981 pourra s'ouvrir à la "Radio Rennes" de Gaby AUBERT et bien d'autres...

     Le Club L'Acignolais, Disques, Loisirs et Culture, venait juste d'être admis en octobre 1978 au sein de l'Association Familiale et Rurale qui regroupait le groupe musical "La Lyre", de la gymnastique volontaire, une bibliothèque, un centre aéré "Ruche, Vacances, Loisirs", un groupe de danse et une bourse aux vêtements. Chaque activité avait 4 à 9 membres dont un président, vice-président, secrétaire et trésorier. Fin 1978 le Club L'Acignolais avait 21 adhérents. L'organisation d'un repas "Réveillon" galvanisa de nouvelles troupes et permit d'organiser une soirée dansante à la salle "polyvalente" fin février 1979.Ce fut le début d'une (future) association qui durera 20 ans (1978/1998) avec de nombreuses animations et activités.

     En mai 1979 il fut décidé de prolonger un voyage en Laponie avec de jeunes acignolais : le film qui avait été réalisé avec un cinéaste amateur de Rennes aura donné l'idée d'en faire un sur Acigné. Après plusieurs réunions de préparation, une collecte d'argent près de commerçants et artisans permettra de débuter des tournages en super 8 avec l'ektachrome et des lampes pour des intérieurs. Ce sera une longue aventure qui durera cinq années, montage compris. Le plus éprouvant sera cette virée en avion à ailes hautes pour filmer à l'air libre nos campagnes et notre bourg. "Visages d'Acigné" sera projeté en salle en 1982 puis réactualisé en supports divers pour se retrouver à la Cinémathèque de Bretagne à Brest. De nos jours,"Acigné Autrefois" a effectué des découpes thématiques du film. Certains extraits sont disponibles sur www.lemoulinet.bzh.

     En juin 1979, un week-end rencontre fut organisé pour lancer deux activités :

  • DANSES BRETONNES : sous l'impulsion de Jean-Marie PUYAU furent réunis Thierry BESNARD, Bruno COUTARD (joueur de bombarde), Jean-Luc DUBOIS (récemment arrivé de Rennes où il donnait des cours), Hubert JUMEL (joueur de biniou) ...
  • RANDONNEES PEDESTRES : Joseph PILLET, membre du Club Alpin de Rennes, décida avec Patrick GALLIER de préparer une première randonnée mi-octobre 1979. Rennes était alors la première ville de France à disposer d'une boutique de la randonnée boulevard Beaumont avec un Topo-guide du 35.

   La mayonnaise commençait à prendre avec alors 37 adhérents aux prêts de cassettes! En juillet 1979, une quinzaine de personnes étaient inscrites aux danses bretonnes.

   Assemblée générale du 29 septembre 1979 : Président Alain GOUAILLIER, Vice-Président Jean-Pierre COLASSE, Trésorier Dominique VEILLARD, Secrétaire Véronique DERENNE - responsables Film Alain GOUAILLIER, Celtique Jean-Luc DUBOIS et Jean-Marie PUYAU, Cassettes Jean-Michel TANFIN, Randonnées Joseph PILLET, Spectacles Eric AUFFRET

Fin octobre 1979, le Club L'Acignolais comptait 26 adhérents danses bretonnes et 24 prêts de cassettes.

   Danses bretonnes : soirée familiale vendredi 19 octobre 1979 avec une bonne vingtaine de personnes.Jean-Luc et Jeanne DUBOIS lancent des cours le vendredi soir en faisant appel à des musiciens.

   Randonnée du 14 octobre 1979 avec 21 participants vers Louvigné, Bourgon, Vernay, Chanclin, Moncorps/Moinerie.   

     Février 1980 : le COLLECTIF CHANSON BRETAGNE du 35 à la MJC de Pacé et la Paillette de Rennes et à Acigné avec 150 personnes venues aux trois jours. Les Trois Couleurs, Jean-Yves Hirel, Allanic, Klaskerien Vara (IRL), Guy Monfaur, et un certain PHILIPPE MOUAZAN écrivain/chanteur qui reviendra habiter Acigné 40 ans plus tard!

    Samedi 8 mars 1980 : premier FEST-NOZ à Acigné dans l'actuelle salle "Glenmor"qui était une salle polyvalente sports/fêtes avec du parpaing décoratif.Enorme succès,350 personnes pour danser avec Nono, le couple Blanchard/Philouze, Job Lefevre et nos sonneurs Bruno et Hubert.L'entrée valait 6 francs + 1 franc pour Diwan

    La dynamique était crée : avec des cours de chants gallo et la constitution d'une magnétothèque, des collectages près des Anciens pour le parler en lien avec l'Université de Villejean/Rennes, des stages organisés par la BOUEZE, jeune association lancée en 1979 : stage à Dol où les 13 acignolais ont découvert des danses avec l'existence d'un "Moulinet d'Acigné"; un autre stage à Saint-Brieuc puis une grande fête familiale en plein air le 15 juin à Saint-Vincent-sur-Oust, "L'Hermine d'Or". Des contacts furent pris avec Pierre GODARD accordéoniste local.

    LA BOUEZE, équipe de passionnés des traditions de danses, musiques et chants de Haute-Bretagne dispersés entre Saint-Brieuc et Fougères. Les deux animateurs Yves DEFRANCE de Pleudihen et Pierrick CORDONNIER de Gahard proposent des collectes de la tradition orale des anciens, la diffusion des recherches et des animations locales. Depuis 1979 on aura rapidement un disque sur les 11 "derniers" violoneux, une cassette sur les traditions orales du pays de Dol et une autre du Coglais, une exposition itinérante sur la musique traditionnelle en lien avec DASTUM, une magnétothèque violon, vielle, clarinette, accordéon, chant, une vidéothèque avec 35 danses sur Bazouges La Pérouse, Corseul et Plaintel, des carnavals bidoche pour enfants, des Assemblées de sonneurs (60 réunis dans le Coglais en juin 1981), des stages de danses, concours de musiciens et des Ramaougeries de pommé... De nos jours La Bouèze est à la Ferme des Gallets de Rennes www.laboueze.com.

    Une seconde randonnée pédestre fut organisée fin avril 1980 vers les Ecures avec une cinquantaine de personnes et un pique-nique dans une ferme.  

    Des échanges culturels : un colloque s'était tenu en janvier 1979 à l'invitation de la municipalité de Rennes sur les échanges économiques Occitanie - Bretagne avec l'Association de Solidarité Occitanie-Bretagne (A.S.OB.). Y participaient des écononomistes, des chercheurs,avec côté breton des représentants du BREIS (PS), PSU, UDB et Radicaux de gauche et côté occitan la chambre régionale d'Agriculture du Languedoc-Roussillon, la FDSEA de l'Hérault et des responsables des comités d'action viticole. Quelques éléments développés par le secrétaire général ASOB Guy CARO : vivre, travailler, décider et créer au Pays dans le respect de leur identité, échanges directs producteurs/consommateurs, souci de la meilleure qualité des produits, plus particulièrement du vin "naturel" différent de ce qui est proposé à nos consommateurs bretons, développer des échanges de groupes avec des fêtes bretonnes et occitanes, du tourisme d'amitié et solidarité, Trois fêtes du vin "naturel" s'étaient tenues à Pontivy 1977 et 1978. Les 7 et 8 juillet 1979 Rennes organisa la 3ème Fête du vin naturel avec des stands, des jeux populaires, tire à la corde, lever de perche ou d'essieu, Baz-Youd (court-bâton),des récitals de Gilles Servat, Kerguiduff, Claude Marti, le clown agricole Kergrist et un FEST-NOZ/BAL OCCITAN . Un échange avait été établi en 1980 entre Locmariaquer et Laure Minervois (48 occitans); un autre eut lieu entre Le Sel-de-Bretagne et Conilhac de Corbières, occasion pour Alain GOUAILLIER et Jean-Marie PUYAU de prendre des contacts dans le café du Maire et découvrir le sculpteur Eugène AULNETTE, poète qui laissait des oeuvres devant sa porte "Si c'est pris c'est que ça plait!". Autre opportunité, l'ASOB avait son siège à Acigné. Notre groupe danses bretonnes d'Acigné eut la proposition d'une commune occitane disposant d'un groupe de danses traditionnelles à Roumagne (Lot et Garonne).Fin août 1981, ce groupe fut accueilli à l'occasion de notre Fête de la Saint-Louis. Parmi les grosses têtes, un groupe d'Antillais, un autre far-west et des Moyen-âgeux défilant à cheval, le Carnaval fut très coloré. L'année précédente le thème était la Bretagne avec de nombreux Cercles Celtiques. Tout comme à la Saint-Louis 1979, les liens Club L'Acignolais et Comité des Fêtes permirent des animations traditionnelles de qualité. Il est vrai que leur secrétaire en était aussi le Président de l'autre association.

     Pour la saison 1980/81, le bureau du Club L'Acignolais y recevra Thierry BESNARD, Hubert JUMEL et établira d'autre part de fructueuses animations avec le Foyer Inter Action de Noyal sur Vilaine. Noyal se distinguait pour ses feux de la Saint-Jean fin juin; plus tard Acigné en organisa également à la "Motte".Sur le bulletin municipal de décembre 1980 nous demandions d'écrire 140 mots avec sa prononciation dans le parler connu, au singulier et au pluriel, avec utilisation de l'alphabet phonétique si possible.Les enquêtes reçues furent transmises aux "Amis du Parler gallo" qui nous donnèrent des numéros de leur revue "Le Lian". 

         L'événement resté en mémoire fut ce BAL COSTUMé du 6 décembre 1980 avec élection du Roidec et ses dauphins (23 candidats). Un orchestre jazzy d'étudiants rennais "12 Douces Grandes Coquines" anima la soirée où un public très nombreux vint très déguisé après un défilé dans le cafés du bourg. L'affiche était très attractive "rock bestial, danses musettes endiablées, hyper new-wave de derrière les fagots, slows chplaff chlurp, disco boum boum!" Salon maquillage et photo souvenir polaroïd. Fort réussi sur CR presse. D'autres bals costumés suivirent avec des engins trafiqués motorisés et feux d'artifices. A regarder sur www.lemoulinet.bzh "Festivités en Acigné".

     Club des Retraités (devenu de l'Amitié") avec une "Soirée DANSES ANCIENNES, dite Not'Patrimoene" très appréciée au Café/Restaurant de la "Bretonnière" rue de Calais (devenu le Qu'Atre") le 14 février 1981. Bulletin de mars : "Le thème était la découverte de danses anciennes comme le Moulinet, l'Avant-Deux, la Pastourelle,...Tout le monde a bien dansé, s'est rudement amusé.Il faut dire que pour créer cette ambiance les accordéonistes ne se sont pas fait prier : M. GODARD d'Acigné, DELAUNAY de La Bouëxière, Francis du Club Nord St Martin de Rennes, Pierrick CORDONNIER de Gahard, Alain NOEL de Rennes et beaucoup d'autres. La cinquantaine de personnes n'a pas eu le temps de s'ennuyer. Et un sacré feu ronronnait dans la cheminée." La soirée fut collectée en film par M. PAUGAM.

     Une nouvelle randonnée permit de découvrir arbres et animaux fin avril 1981 avec un technicien de l'Office National des Forêts. Présence remarquée de membes de la bibliothèque. Mi-mai fest-noz avec des chanteurs kan ha diskan de Basse Bretagne et nos sonneurs, chanteurs et accordéonistes d'Acigné.En juin 1981, une trentaine d'acignolais et noyalais sont allés à ROUMAGNE dans le Lot et Garonne grâce aux contacts A.S.O.B.. Au pot offert par la municipalité on échangea nos pas de danses bretons et occitans avant de visiter le château de Duras. Le lendemain ce fut la fête champêtre du "Campestral" à Nérac avec des jeux traditionnels et des contous. On y aura dansé au son des violons, vielles, accordéon et leur cornemuse locale la "Cabrette".Ensuite fête de MONTETON...

     Assistant au Festival musical de CARENTOIR (56) où une douzaine d'acignolais découvrirent le blues de Bill Deraime l'été 1980, une équipe du "Club L'Acignolais" travailla au premier grand Festival musical de Rennes les 24, 25 et 26 juillet 1981. C'était organisé dans le parc des Gayeulles par les folkeux d'ADN et l'aide de futurs éléments moteurs du rock rennais "TERRAPIN" (salle de la Cité) qui deviendront les "TRANSMUSICALES". On aura parlé d'une double billetterie. Ce fut un dur apprentissage qui donna cependant une forte impulsion en Bretagne. O.F. 27 juillet 1981 : "Un beau coup d'essai malgré un lourd déficit. Malgré une asistance relativement nombreuse, les organisateurs se retrouvent avec un passif de 3 à 400 000 Francs." Le prévisionnel s'établissait à 787 000 Francs, dont 380 000 Francs pour les groupes. Parmi les points positifs, l'organisation à la quasi-perfection. Pour un coup d'essai, ce fût un coup de maître. Tout y était : l'accueil  chaleureux, l'aménagement excellent, les diverses animations dont une piscine gratuite, la rotation parfaite entre les groupes. La prestation de "Blues Band" restera dans les mémoires mais, après avoir chauffé l'audience, il a suffi de quelques  minutes aux "Dubliners" pour faire tomber l'atmosphère! Radio Armorique voulait enregistrer le passage de James Brown, mais M. Sex-machine demandait un petit chèque en plus des 100 000 francs Festival...et comme la  radio ne roule pas sur l'or...Parmi les autres groupes au top : Steel pulse, New Celeste (Ecosse), Orchestre rouge, Los jaivas (Chili), ... Le Comité des Fêtes d'Acigné avait prêté 2 projecteurs de 1 000 W. Ils furent remboursés car disparus!  En 2023, la Bretagne compte 600 Festivals.

     En octobre 1981 arrivée d'Antoinette BARON, gallésante, comme Vice-présidente. Elle amena son entrain, ses danses anciennes dont l'"Aéroplane d'Acigné" déjà découvert et filmé à la Saint-Louis 1977, sa participation au théâtre et ses nombreux souvenirs d'antan.Le deuxième ROIDEC fut encore plus réussi avec 320 personnes, la fanfare Uranus Bruyant, un WC ambulant et un char romain dans le bourg, puis dans la salle où les confettis furent distribués avant le grand feu d'artifices (de jardin) et l'élection.

      Un FEST-NOZ en Mars 1982, salle polyvalente (Glenmor), avec des Chanteurs d'Acigné et de Brasparts, nos bouézous Denis PéPIN et Christophe Lemartret et le couple de sonneurs local Bruno Coutard/Hubert Jumel.

      En février 1983, le groupe "Club L'Acignolais" avait pris du nombre et augmenté ses activités. Nous disposons d'une grande salle au dernier étage de la maison servant de nos jours à l'AMHV, l'école de musique. Cette saison permettra l'organisation d'un Bal FOLK, la création d'un groupe d'artistes peintres dont Charles MONTIGNE, un collectage photographique sur Acigné (principalement fin XIXè et début XXè), du café-théâtre, un rallye pédestre, des stages danses bretonnes, au printemps un GRAND FESTIVAL Rock, Jazz, Blues au "Foyer" avec 400 personnes. Les recettes auront servies à l'achat d'une moto de 80 cm3 pour le groupe "24 H de Ploubalay". Une deuxième moto fut sponsorisée. Soit deux équipages de 4 motards.

     Un fait marquant au printemps 1984 : le deuxième Festival Jazz Rock, Reggae, Blues avec la venue de l'harmoniciste Jean-Jacques MILTEAU! On aura aussi joué en faveur du GALLO avec un groupe punk de Rennes baptisé "Les Grands Begaws" qui aura appris quelques mots de cette langue de Haute-Bretagne pour la valoriser près des jeunes générations... Cette provocation fut notre Grand réveil et, on le sait, quelques groupes se sont ensuite constitués pour faire du Gallo-Rock. Gallo ne signifiait plus ringards ou Ploucs !

     Autre activitée importante avec le groupe de danses de SALON animé par Isabelle RIAUX. Pour l'échange avec la ville allemande jumelée de Wachtendonk, des costumes furent imaginés et portés par notre équipe de musiciens et danseurs. Le bas des robes avait un ruban reprenant les motifs ciselés de bracelets de bronze découverts en 1972 près de la "Motte". On les présenta ensuite à la population aux "Fêtes de la Bretagne" organisées vers le 19 juin pour la Gouel Erwan/Saint-Yves, en lien avec la Région Bretagne et la "Mutinerie". Un autre déplacement fut très important dans le Béarn à la Fête des bergers d'Aramits à la fin de septembre. Sur scène et au défilé, nos intervenants furent très appréciés parmi tous ces groupes de chanteurs de montagnes.

       Les temps changent et la liberté d'action permet de dynamiser les associations : le "Club Acignolais" s'arrêta. Quelques activités continuèrent en se déclarant association 1901 : "Le Moulinet" en 1988 pour les chants, danses et musiques, "La Musaraigne" www.lamusaraigne.net  pour les randonnées pédestres, "Ainsi danse Acigné" pour les danses de salon. En 1986, le Comité des Fêtes s'arrêta et avec lui la "Fête de la Saint-Louis". Mais, à partir de 1992, l'Office Culturel permit pendant une vingtaine d'années une "Fête d'Automne" sur trois jours à la mi-octobre. Le "Moulinet" y fut très présent avec une randonnée chantée et un fest-deiz. Le "pommé" fut géré par "Gallo-Tonic" de Liffré et le Club de l'Amitié. voir www.lemoulinet.bzh "Film Fête d'Automne".

     Une Grande Fête marqua les 10 ans du début "Club L'Acignolais" vers le "Moulinet" : 1978 - Samedi 26 mars 1988. 15H Randonnée pédestre; Exposition de peintures et sculptures à la mairie, Apéritif d'honneur à 19H salle polyvalente avec un Buffet dansant : sonneurs, chanteurs et bouézous d'Acigné et danses de société. Org. Antoinette Baron, Jean-Luc Dubois, Alain Gouaillier, Hubert Jumel, Joseph Pillet et Isabelle Riaux.

      Création de l'Association "LE MOULINET d'Acigné" : Le 1er décembre 1998, "Promotion de la culture bretonne à travers la pratique de la danse, de la musique, du chant, ..." Président Yves ROUVIèRE, natif du Calvados, animateur danses, Vice-Présidente Anne ROUTEAU, native du Morbihan, animatrice danses, bretonnante, Secrétaire Maryvonne PORTIER, native des Côtes d'Armor, Trésorière Françoise MéNORET, native du Pays de Redon (35). Dix ans plus tard, le 3 juin 2008, Président Alain GOUAILLIER, Vice-Présidente Martine BOUTARD, Secrétaire Marylène FONTENEAU et trésorière Thérèse LAMONTAGNE. AG Mai 2022 Co-Présidents Thierry BESNARD et Alain GOUAILLIER, Vice-Président Aloïs ROBINARD, Secrétaire Marylène FONTENEAU et trésorière Monique MOSSET.

Le 25 ans mars 2012, Termen fête ses 25 ans:

TERMEN 25 ans mars 2012

     La tradition a besoin d'être collectée pour survivre au temps présent et à venir : en 1999, l'ouvrage d'Alain RACINEUX "Histoire d'Acigné et de ses environs" sera marquant. Il complétait les écrits de René VEILLARD, lesquels furent placés à l'initiative du Club L'Acignolais sur le bulletin municipal au début des années 1980. Et il lança une association "Acigné Autrefois" www.acigne-autrefois.fr . Avec le dessinateur de Patrimoine Charles MONTIGNé et le collecteur Alain GOUAILLIER un second ouvrage "Acigné au Fil du temps" sortit en 2004; et une légende locale basée sur une "Parebatte au Pagus d'Acigné" de 1921 nous emmena voyager au temps des gallo-romains et des Celtes.Disponibles à la Médiathèque


  II -  Acigné et la Bretagne en 2023

      En 2023, la cité d'Acigné s'approche des 7 000 habitants. Elle est située à une dizaine de kilomètres de la Ville de Rennes qui accueille près de 70 000 étudiants sur trois campus et une cinquantaine d'écoles d'enseignement supérieur, soit 20% de la population rennaise. Cette jeunesse amène un réel dynamisme dans la capitale régionale avec l'arrivée d'apports culturels venus de Basse-Bretagne, d'autres régions de France et du monde entier. Ce brassage est bénéfique dans la diversité des expressions artistiques.              Pour les Cultures de Bretagne avec ses composantes Basse et Haute Bretagne, langues bretonne et gallèse, "Skeudenn Bro Roazhon" fédère une cinquantaine d'associations culturelles bretonnes du "Pays de Rennes" et organise en novembre un grand FEST-NOZ au Parc expo avec 8 000 danseurs :"YAOUANK" (jeune en breton). www.wiker.fr/skeudenn 

     La Région "Bretagne" soutient activement la Culture et les Langues de Bretagne, a émis le voeu d'autonomie en avril 2022 et se verrait bien constituer une Assemblée de Bretagne. A l'initiative du groupe "Breizh a-gleiz" (Aziliz Gouez), des conseillers régionaux proposent l'autonomie à la commission décentralisation au Sénat. Paul Molac annonce un passage également à l'Assemblée nationale. La Bretagne bénéficie d'un espace à fort sentiment identitaire reconstitué à la fin des années 1960 et surtout au début des années 1970 par les actions culturelles militantes d'Alan Stivell, Gilles Servat, Tri Yann, Glenmor, et bien d'autres..., qui se sont associées aux actions sociales et environnementales...En 40 ans, cette Région aura su créer de grands Festivals (Inter-Celtique Lorient, Vieilles Charrues à Carhaix, Chants de Marins à Paimpol, Transmusicales à Rennes, ...). 

        La Réunification de la Bretagne historique reste toutefois un sujet d'actualité majeur. La Région Bretagne y est favorable et les sondages d'opinions et pétitions en Loire-Atlantique confirment la revendication de Breizh 5/5. Les pages écrites par nos historiens et géographes ne peuvent s'arrêter à 1941 et les 1 000 ans précédents. Le seul drapeau au monde blanc et noir marquant ce territoire patrimonial est "agité" par nos générations contemporaines de Brest à Clisson, ainsi que par la diaspora d'origine bretonne en France, en Europe et dans le monde. Nantes et Rennes se parlent toujours et les nombreux éléments culturels identifient clairement un passé commun. Nantes abrite le château des ducs de Bretagne; l'actuel conseil municipal, un Adjoint aux "Enjeux bretons".                www.bretagne.bzh   www.bretagnereunie.bzh www.lepeuplebreton.bzh 


 III le Référendum sur l'Indépendance d'Acigné/Trouziniec.

A découvrir avec "A consulter en ligne", et sur www.leschampslibres.fr "Les collections du Musée", "Collections en partage" : écrire Acigné pour découvrir tout en bas de page la fameuse "Déclaration d'Indépendance d'Acigné" (Roidec An I), mais aussi des bracelets de bronze (1 000 av JC), des urnes cinéraires des "Onglées" et quelques dessins et photos anciennes d'Acigné.

 

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